Il y a deux ans, le journal de gauche radicale «Tageszeitung» dépeignait l’année 2025 comme celle où le parti d'extrême-droite Alternative pour l'Allemagne (Alternative für Deutschland, AfD) atteindrait une part de voix de 33%. Il envisageait alors le scénario fictif du pire: «Dehors, les hooligans s’entraînent à la guerre civile.»
Les derniers sondages, cependant, montrent une toute autre image. Les élections fédérales de dimanche prochain ne verraient pas l’AfD devenir le plus grand parti d’Allemagne. Au contraire, il aurait même perdu une part de son soutien par rapport aux élections de 2017. Les 12,6% lors de son entrée au Bundestag tomberaient à 11%. Même le parti libéral FDP, chassé du Bundestag en 2013, aurait déjà rattrapé l’AfD.
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Une guerre de positions au sein du parti
Il y a plusieurs raisons qui expliquent pourquoi l’AfD, tant redouté, perd du terrain. L'unité que le parti présente à première vue ne représente pourtant pas son état interne réel. En son sein, les dissensions sont fortes, le fossé entre l'aile modérée et radicale se creusant, la plus extrême prenant le dessus.
Les deux candidats de la fraction radicale, Alice Weidel et Tino Chrupalla, ont été élus par les membres comme duo de tête pour les élections au Bundestag. Il s’agit d’une défaite pour le chef du parti, Jörg Meuthen, plus modéré.
Le congrès du parti a également renforcé certains points du programme par rapport aux propositions du groupe de travail interne. Le retrait de l'Allemagne de l'Union européenne est exigé, et ce contre les recommandations de Jörg Meuthen. Concernant la politique des réfugiés, le congrès a demandé la construction de clôtures aux frontières, la fin du regroupement familial et l'augmentation des expulsions en demandant la reconnaissance de plus de pays comme sûrs pour le retour.
En ce qui concerne le Covid-19, le parti avait déjà fait connaître sa position il y a un an lorsque le chef du groupe parlementaire du Land de Brandebourg, Hans-Christoph Berndt, avait déclaré qu'il considérait la pandémie comme terminée. Leur programme s’oppose aux masques, aux tests, aux vaccins et certificats obligatoires.
Un parti sous surveillance
L'Alternative pour l'Allemagne a dérivé si loin sur la droite que, fin 2020, le renseignement intérieur allemand l'a classé comme potentiel foyer d'extrémisme, d'abord localement puis à l'échelle nationale. Un de ses responsables, Jörg Müller, avait alors déclaré que «le positionnement extrémiste des membres de l'AfD va à l'encontre de la dignité humaine, du principe de démocratie et de l'État de droit».
Avec sa ligne, l’AfD n’aura pas non plus la possibilité de participer au gouvernement. Le Parti social-démocrate (SPD) et les Verts refusent catégoriquement d'en entendre parler. Quant à l'Union chrétienne-démocrate (CDU) de Merkel, elle refuse également de créer la moindre coalition avec les partis d'extrême-droite ou gauche: «Une coopération avec Die Linke (gauche radicale) ou l’AfD ne serait pas seulement une atteinte à notre identité et une trahison de nos valeurs démocrates-chrétiennes. Cela porterait également atteinte à notre atout le plus important: notre fiabilité et notre crédibilité.»
Le FDP exclut également toute coopération. Le président du parti, Christian Lindner, a déclaré dans une récente interview: «On ne peut pas laisser un parti comme l’AfD à la tête d’un État dont il combat ouvertement les institutions et les valeurs.»
L’AfD ne croit pas en son succès
Suite aux résultats du sondage, les espoirs s’amenuisent en interne de voir le parti continuer à monter en intentions de vote. Même le principal candidat de l’AfD dans le Brandebourg, Alexander Gauland, a concédé qu’il ne fallait pas s’attendre à un excellent score.
Il y a quatre ans, il clamait encore: «Nous allons tous les chasser.» Pour les prochaines élections, il se rétracte, mais nuance: «J’espère que nous resterons assez forts pour avoir une influence sur les autres partis, comme nous le faisons actuellement au Bundestag.»