Lorsque les Russes ont pris le contrôle de la centrale nucléaire de Tchernobyl, les craintes quant à une potentielle nouvelle catastrophe nucléaire étaient grandes. Vladimir Poutine allait-il réellement ordonner la destruction du réacteur et ainsi libérer une nouvelle fois des radiations radioactives? Selon une étude, lors de l’accident nucléaire de 1986, des centaines de milliers de personnes sont mortes directement et indirectement de l’exposition à ces radiations radioactives, et des millions d’autres ont souffert de conséquences tardives sur leur santé.
Trente-six ans plus tard, la catastrophe ne s’est pas reproduite. Les Russes ont quitté le site de la centrale après un mois d’occupation et le réacteur est resté intact. Les Ukrainiens sont désormais en train de procéder à une analyse des dommages. Et celle-ci est très complexe.
D'importants dommages économiques
«Je ne peux pas dire qu’ils aient causé des dommages à l’humanité, mais certainement de gros dommages économiques à l’Ukraine», déclare Mykola Bespaly, directeur du laboratoire central d’analyse de l’installation, au «Washington Post».
Il énumère tout ce que les Russes ont volé ou détruit, et la liste est longue: 689 ordinateurs, 344 véhicules, 1500 appareils de mesure des radiations, des logiciels non remplaçables, et quasiment tout l’équipement de protection contre les incendies.
Équipement volé puis transporté en Biélorussie
Avant l’invasion russe, environ 6000 personnes travaillaient dans la centrale nucléaire. Même si la centrale ne produit plus d'électricité depuis longtemps, les effets de la catastrophes de 1986 continuaient d'y être analysés. Peu avant l’attaque russe, tous les employés, à l’exception de quelques centaines, ont été évacués, selon le «Washington Post», qui cite des responsables de Tchernobyl.
Ceux qui sont restés ont été pris en otage et auraient travaillé des centaines d’heures sous la surveillance des Russes, souvent sans se reposer pendant des jours, afin de s’assurer que les systèmes fonctionnaient et que la sécurité de la centrale reste garantie.
Maintenant que les Ukrainiens ont repris le contrôle, ils sont à la recherche de l'équipement volé, dont une partie est équipée de traceurs GPS. Certains équipements se trouvent à la frontière avec la Biélorussie, d’autres en Biélorussie, par exemple à Gomel ou à Minsk.
Coût de la restauration de l'installation: environ 135 millions d'euros
Le remplacement de tout ce qui a été perdu lors de l’invasion coûtera environ 135 millions de dollars, estime Yevhen Kramarenko, un responsable de la centrale, dans le «Washington Post».
Interviewés par le quotidien américain, les employés ne savent pas pourquoi les Russes ont attaqué Tchernobyl. Le logiciel qui a été volé est par exemple inutilisable en dehors de la centrale. Certains employés formulent l'hypothèse selon laquelle les soldats russes auraient cru dur comme fer à la propagande du Kremlin: les Ukrainiens seraient en train de construire une armé nucléaire avec l'aide de l'Occident sur le site de Tchernobyl... «Quand j’ai lu cette propagande, j’ai ri», a déclaré un collaborateur. «Même si la situation est loin d’être drôle».
Les responsables espèrent pouvoir reconstruire l’installation dans les mois à venir. Mais pour cela, ils ont besoin de l’aide de donateurs et du gouvernement. Il s’agit en particulier d’obtenir du matériel de protection contre les incendies. Selon le manager Yevhen Kramarenko, la situation pourrait devenir critique en été en cas d’incendie de forêt.
(Adaptation par Quentin Durig)