Il se serait bien passé de ce coup de pub pour McDonald’s. Seulement voilà: la photo postée sur les réseaux sociaux dimanche 17 novembre l’a été par le fils du président élu lui-même. C’est en effet Donald Trump Jr., moins influent qu’auparavant mais toujours omniprésent dans l’entourage de son père, qui a pris le cliché controversé. On le voit tout sourire, assis à table dans un jet privé, brandissant un cornet de frites orné du fameux M, aux côtés de Donald Trump, du milliardaire Elon Musk… et du futur chef du Département de la Santé.
Raté donc, pour l’image de fantassin anti-malbouffe que cherche à se donner Robert F. Kennedy Jr, nommé à ce poste trois jours avant. «Du poison», avait-il répondu quelques jours plus tôt à un journaliste qui l’interrogeait sur les habitudes alimentaires de l’ancien promoteur new-yorkais. Une remise en cause de la nourriture industrielle et de l’overdose médicamenteuse des Américains serait pourtant justifiée. Kennedy peut-il engager ce combat? Résumé en 5 infos.
L’obésité, fléau américain
Il suffit de voyager aux États-Unis pour s’en rendre compte, mais le magazine scientifique «The Lancet» vient de le confirmer, statistiques à l’appui: selon cette publication de référence, près des trois quarts des adultes américains sont en surpoids ou obèses. Publiée jeudi 21 novembre, cette étude révèle l’augmentation frappante des taux d’obésité à l’échelle nationale depuis 1990, date à laquelle un peu plus de la moitié des adultes étaient en surpoids ou obèses.
«Elle montre que de plus en plus de personnes deviennent obèses ou en surpoids à un âge plus jeune que par le passé. Ces deux affections peuvent accroître le risque de diabète, d’hypertension artérielle et de maladies cardiaques, et réduire l’espérance de vie», note le «New York Times». Or Robert F. Kennedy Jr s’est engagé durant la campagne présidentielle – d’abord comme candidat indépendant, puis comme soutien de Trump – à transformer le système alimentaire américain, en promettant de sévir contre les aliments et les ingrédients qu’il accuse d’être à l’origine de nombreux maux du pays, notamment les aliments ultra-transformés et les additifs alimentaires.
Kennedy Jr, une crédibilité questionnée
La carrière du fils de Robert Kennedy, le frère du président JFK (tous les deux furent assassinés), est celle d’un avocat à succès, en particulier dans la défense de l’environnement. L’une de ses victoires juridiques les plus remarquables concernait des habitants d’une vallée de l’État de Virginie-Occidentale, dont les rivières étaient polluées par des compagnies minières.
Il a aussi fait condamner en août 2018 le géant agricole Monsanto lors d’un procès historique, pour l’utilisation du fameux insecticide «Roundup» à base de glyphosate. Kennedy avait alors convaincu les jurés que ce produit était responsable de la mort de son client, un ancien gardien d’un terrain contaminé. Puis la pandémie est arrivée, et la controverse sur les vaccins – dont il dénonce les effets secondaires, surtout chez les enfants – l’a propulsé au premier plan médiatique. Ses détracteurs affirment aussi, sur un tout autre plan, qu’il serait responsable du suicide de son ex-femme en 2012, suite à ses nombreuses liaisons extraconjugales.
Mehmet Oz, un autre choix contesté
S’il est confirmé par le Sénat en janvier, Robert F. Kennedy Jr ne sera pas seul aux commandes du Département de la Santé. Quelques jours plus tard, Donald Trump a nommé le très médiatique chirurgien Mehmet Oz à la tête des programmes Medicare et Medicaid, l’assurance médicale publique que Barack Obama n’a pas pu étendre en raison de l’opposition farouche des républicains à son «Obamacare». Or, à la différence de Kennedy, le Dr Oz, chirurgien, a profité de sa notoriété acquise sur les chaînes de télévision pour investir dans les pharmas.
«Oz a récemment détenu des investissements, dont certains partagés avec sa famille, dans le secteur de la santé, dans des sociétés pharmaceutiques et dans des entreprises technologiques actives dans le secteur de la santé, telles qu’Amazon. Collectivement, les avoirs d’Oz s’élèvent à des dizaines de millions de dollars, selon les déclarations financières qu’il a déposées lors de sa candidature ratée en 2022 à un siège au Sénat de Pennsylvanie. Cela inclut une participation dans UnitedHealth Group d’une valeur de 600’000 dollars», notait, le jour de sa nomination, la radio NPR. Pas sûr qu’il soit, dans la bataille, du côté de Robert F. Kennedy Jr.
Déréguler et protéger, possible?
Robert F. Kennedy Jr va vite se trouver pris dans une contradiction. Donald Trump veut moins de régulation. Or, dans le domaine de la santé et de l’alimentation, seules des règles strictes peuvent faire changer les choses. Seulement voilà: le président élu ne veut pas entendre parler d’un renforcement de la Food and Drug Administration (FDA), l’agence qui édicte les normes. Au contraire, il vient de nommer à la tête de celle-ci le Dr Marty Makary, chirurgien et auteur qui s’est opposé aux obligations de vaccination et à certaines autres mesures de santé publique pendant la pandémie.
Point commun avec Robert F. Kennedy Jr: ce médecin a souvent critiqué la prescription excessive de médicaments, l’utilisation de pesticides sur les aliments et l’influence indue des sociétés pharmaceutiques et des compagnies d’assurance sur les médecins et les régulateurs gouvernementaux. Mais peut-on croire que la «réduction de la paperasserie bureaucratique de la FDA», promise par Trump, permettra «de garantir aux Américains les remèdes et les traitements médicaux qu’ils méritent»?
Big Pharma, la politique du dollar
Le projet 2025 préparé pour les Républicains par le think-tank Heritage Foundation vise l’industrie pharmaceutique, «appelant à des garanties contre la mainmise des entreprises pharmaceutiques sur la réglementation de nos agences de santé publique». En clair: halte au lobbying des firmes pharmaceutiques. Problème: quatre géants du secteur, Pfizer (producteur de l’un des vaccins anti-Covid), Amgen, Merck et AstraZeneca, ont contribué plus généreusement à la campagne du candidat républicain qu’à celle de son adversaire Kamala Harris. Cette dernière a toutefois, au total, davantage encaissé de donations en provenance du secteur de la santé.