Des risques pour la santé
L'eau de pluie devient de plus en plus toxique

Des substances chimiques, appelées PFAS, sont présentes dans de nombreux produits du quotidien, sans avoir l'obligation d'être déclarées. Les chercheurs alertent: partout, la pluie et la neige affichent un taux de pollution à ces produits beaucoup trop élevé.
Publié: 21.08.2022 à 06:01 heures
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Dernière mise à jour: 21.08.2022 à 09:06 heures
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Lorsqu'il pleut, du poison nous coule-t-il dessus?
Photo: IMAGO/Jochen Eckel
Tina Berg

Selon de nombreuses études, l'eau de pluie est contaminée dans le monde entier par les produits chimiques de type PFAS. Quel danger cela représente-t-il? «La présence globale de PFAS dans l'eau de pluie montre que la planète ne peut plus absorber toutes ces substances d'origines humaines», explique au «Beobachter» Martin Scheringer, scientifique à l'EPFZ.

Concrètement, que sont les PFAS? Il s'agit de substances chimiques industrielles, l'abréviation désignant tous les composés alkyles perfluorés et polyfluorés. Beaucoup sont utilisées dans des produits tels que les poêles en téflon, les vêtements de plein air, les emballages alimentaires, les mousses anti-incendie ou encore les cosmétiques. En Suisse, seuls les deux produits les plus toxiques qui entrent dans cette catégorie sont interdits.

Un danger pour l'homme et l'environnement

«On s'interroge toujours beaucoup sur la toxicité des PFAS. C'est surtout l'extrême longévité de la nocivité des produits qui fait que le problème est désormais hors de contrôle», poursuit Martin Scheringer. Il existe des substances certes très toxiques mais qui se décomposent rapidement dans l'environnement, comme la nicotine. «Mais, en plus d'être toxiques, les PFAS restent très stables, et c'est bien cela qui est inquiétant.»

En collaboration avec des chercheurs de l'université de Stockholm, le scientifique a démontré que même dans des régions éloignées comme l'Antarctique, les PFAS sont présentes dans l'eau de pluie et la neige à des concentrations qui peuvent être inquiétantes pour la santé. L'eau de pluie n'est plus potable nulle part.

Ainsi, sur le haut plateau tibétain, le taux de toxicité de l'eau recommandé par l'Agence américaine de protection de l'environnement est 14 fois plus élevé que la normale. «Le fait que l'environnement soit si clairement pollué par ces substances à l'échelle mondiale est un énorme signal d'alarme», affirme Martin Scheringer.

Faut-il pour autant céder à la panique? Selon le chercheur de l'EPFZ, on ne peut répondre clairement à cette question. Car chaque produit chimique a des effets différents sur la santé humaine. Une grande quantité de produits toxiques dans le corps peut par exemple entraîner une baisse de l'immunité après une vaccination chez les enfants.

Pas de déclaration obligatoire

Dans d'autres cas, le nombre de spermatozoïdes diminue chez les hommes. Une grande toxicité dans le corps peut bien sûr entraîner de nombreux cancer. Les PFAS s'accumulent toujours plus dans le corps des individus et nous sommes de plus en plus nombreux à souffrir de problèmes de santé. Pour le spécialiste, cela ne peut pas continuer ainsi. «On ne peut pas rester indifférents face à ces substances», alerte-t-il dans le «Beobachter».

Actuellement, les diverses substances PFAS ne doivent pas être déclarées. Les consommateurs ignorent donc où elles se trouvent. L'industrie et les politiques ont un devoir à remplir, clame Martin Scheringer. Au lieu de toujours retirer certaines PFAS particulièrement dangereuses de la circulation, il faudrait les réglementer et ne les autoriser que pour des utilisations spécifiques. Pour le scientifique, c'est la seule façon d'éviter le pire.

(Adaptation par Thibault Gilgen)

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