Le pays a essuyé des salves de missiles roquettes et drones visant en particulier son infrastructure énergétique civile, des frappes présentées par le président russe Vladimir Poutine lui-même comme des représailles à l’attaque à l’explosif qui a endommagé le pont de Crimée, un attentat «terroriste» imputé par Moscou à Kiev. La Russie a annoncé d’ailleurs mercredi l’arrestation de huit personnes suspectées de participation à cette attaque et affirmé avoir déjoué deux attentats fomentés par les services spéciaux ukrainiens sur le territoire russe.
Vladimir Poutine a promis une réponse «sévère» à tout nouvel attentat contre la Russie et ce qu’elle considère être comme son territoire et ses infrastructures, alors que Moscou a proclamé l’annexion de la Crimée en 2014, puis de quatre autres régions ukrainiennes en septembre. Kiev n’a ni confirmé ni infirmé son implication dans l’explosion sur le pont reliant le territoire russe à la Crimée, mais l’Ukraine a toujours souligné qu’elle comptait bien reconquérir cette péninsule, comme l’ensemble des territoires occupés par la Russie depuis l’invasion lancée le 24 février.
L'«erreur de calcul» de Poutine
Dans la région de Kherson, l’une des quatre dont Moscou a revendiqué l’annexion, cinq nouvelles localités ont été reconquises, a indiqué mercredi la présidence ukrainienne, ce qui constituerait le dernier revers en date pour l’armée russe qui recule dans cette zone comme dans le nord-est et l’est depuis début septembre. «Les forces armées de l’Ukraine ont libéré cinq localités de plus dans le district de Beryslav de la région de Kherson: Novovasylivka, Novogrygorivka, Nova Kamianka, Tryfonivka, Chervoné», a indiqué la présidence ukrainienne. Elle a cependant noté que l’artillerie russe opposait de la résistance. «L’ennemi continue de bombarder les positions de nos unités pour dissuader la contre-offensive tout au long de la ligne de contact», a-t-elle relevé.
L’Ukraine a infligé d’humiliants revers aux forces russes depuis septembre, conduisant le président russe à ordonner la mobilisation de centaines de milliers de réservistes pour tenter d’inverser la tendance. L’explosion qui a éventré une partie du pont de Crimée apparaît, dans ce contexte, comme une humiliation, tant ce viaduc était présenté en symbole de la puissance russe, un projet voulu par M. Poutine. Le pont est aussi essentiel à l’approvisionnement des troupes russes dans le sud ukrainien.
Le président américain Joe Biden a affirmé mardi que son homologue russe avait «clairement» mal évalué la situation en Ukraine et avait «fait une complète erreur de calcul» sur la résistance qu’il rencontrerait. Il a jugé aussi «irresponsable» que M. Poutine ait pu menacer d’utiliser une arme nucléaire tactique pour défendre ce qu’il considère comme ses conquêtes. Le dirigeant américain a néanmoins dit «ne pas penser» que M. Poutine utiliserait une telle bombe.
L'Ukraine a reçu des systèmes de défense anti-aérien
Après deux jours de bombardements russes qui ont notamment visé l’infrastructure énergétique ukrainienne, laissant villages et villes avec des coupures de courant et d’eau chaude, l’Ukraine a indiqué avoir commencé à recevoir les systèmes de défense anti-aérien qu’elle réclamait depuis des mois pour abattre plus efficacement les missiles russes. «Une nouvelle ère de la défense aérienne a commencé» en Ukraine, s’est félicité dans un tweet le ministre ukrainien de la Défense, Oleksiï Reznikov. «Les Iris-T d’Allemagne sont déjà là. Les NASAMS américains arrivent». «Ce n’est que le début», poursuit M. Reznikov, «et nous avons besoin de plus. Aucun doute que la Russie est un Etat terroriste. Il existe un impératif moral à protéger le ciel de l’Ukraine afin de sauver notre peuple».
Mardi, en réunion virtuelle avec le G7, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait réclamé de l’aide pour créer un «bouclier aérien» au-dessus de l’Ukraine, prévenant que M. Poutine avait «encore les moyens d’une escalade». Ces frappes russes massives, outre les infrastructures, ont également touché lundi en plein centre de Kiev un parc, un terrain de jeux, un pont et une allée piétons. La capitale n’avait plus été visée depuis fin juin.
De nouveaux charniers découverts
Dans l’est, les autorités ukrainiennes ont annoncé la découverte de deux nouveaux charniers dans des villes de la région de Donetsk récemment reprises aux troupes russes. A Lyman, noeud ferroviaire repris début octobre, une équipe médico-légale vêtue de tenues de protection exhumait des dizaines de corps, a constaté un journaliste de l’AFP. «Nous avons déjà trouvé plus de 50 corps de soldats et de civils. Nous avons une longue tranchée, une fosse commune, où nous avons découvert des corps et des parties de corps», a expliqué Pavlo Kyrylenko, gouverneur de la région de Donetsk.
La Russie a été accusée de nombreuses exactions – tortures, viols, exécutions sommaires – dans les villes d’où elle s’est retirée. Moscou a systématiquement nié l’implication de ses soldats en dépit de l’accumulation des éléments de preuve.
(AFP)