Pendant des années, Vladimir Poutine s'est efforcé de tenir sa famille à l'écart de la vie publique. Aujourd'hui, un changement de génération s'annonce au Kremlin et le président russe redistribue les postes. Et surprise à Moscou, sa famille et ses proches occupent des postes de plus en plus puissants. Ainsi, il a récemment nommé Anna Tsivileva, la fille de son cousin, au poste de ministre du Logement et de la Sécurité sociale.
Les filles de Poutine, Katerina Tikhonova, 37 ans, et Maria Vorontsova, 39 ans, occupent elles aussi de plus en plus le devant de la scène. Comme l'explique à la SRF Fabian Burkhardt, spécialiste de la Russie à l'Institut Leibniz de recherche sur l'Europe de l'Est et du Sud-Est, elles ne sont certes pas promues à des postes supérieurs, mais elles sont de plus en plus présentes. Elles ont d'ailleurs toutes deux fait leur apparition au forum économique de Saint-Pétersbourg.
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L'expérience, la loyauté et la performance
«Il y a actuellement un changement de génération constant, mais lent. Nous observons ce phénomène en Russie depuis un certain temps déjà», explique Fabian Burkhardt. Les proches de Poutine sont de plus en plus âgés (lui-même a fêté ses 71 ans). Il est donc normal «que la génération suivante soit introduite à des postes de haut niveau».
Autre que leur proximité avec le chef du Kremlin, qu'est-ce qui joue en joue en faveur des proches de Poutine? Selon Fabian Burkhardt, beaucoup d'entre eux ont une «certaine expérience dans l'administration ou dans de grandes entreprises publiques». Anna Tsivileva, par exemple, a récemment dirigé un fonds d'Etat destiné à soutenir les soldats qui combattent en Ukraine.
Mais il n'y a pas que la proximité avec Poutine qui permette d'occuper des postes élevés: la performance et la loyauté sont également prises en compte dans l'attribution de nouvelles responsabilités. Pour Fabian Burkhardt, c'est impressionnant: «S'affirmer pendant de nombreuses années dans ce réseau de relations où des groupes d'élite s'affrontent n'est pas chose aisée».
Par exemple, le nouveau ministre de la Défense, Andreï Belooussov, n'est pas apparenté à Poutine. Mais cet homme de 65 ans a passé beaucoup de temps avec le président. Ce qui permet à Poutine de compter sur sa loyauté, un aspect important pour le président russe.
«Les conflits au sein de l'élite pourraient s'intensifier»
Bien que cette préparation à «la transition vers le post-poutinisme» ne soit pas un processus conscient de la part de Poutine, celui-ci a reçu cette année une impulsion marquée. Fabian Burkhardt considère également la nouvelle organisation de l'appareil du pouvoir russe comme risquée – la construction ne fonctionne actuellement que parce que Poutine est encore le chef.
«Dès que le patron perd sa position, la lutte pour les ressources et la position commence. Si Poutine mourait ou se désistait maintenant, cela augmenterait le risque que les conflits au sein de l'élite s'intensifient» explique le spécialiste de la Russie.
Les grands perdants de ce système sont tous ceux qui n'ont pas de relation familiale ou amicale avec Poutine. Ceux-ci devraient alors «se frayer un chemin dans leur carrière par d'autres voies» – ce qui, selon Fabian Burkhardt, pourrait conduire à des conflits au sein de l'appareil.