Au cours des 12 derniers mois, les décès se sont succédé: Israël a tué au moins 15 membres haut placés du Hamas et du Hezbollah. Le 16 octobre dernier, l'armée israélienne a tué Yahya Sinouar, le responsable de l'attaque du 7 octobre 2023 contre Israël. Cela fait partie intégrante de la stratégie du Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui a promis de tuer tous les responsables. Mais une organisation comme le Hamas peut-elle vraiment être vaincue de cette manière?
Des hauts dirigeants tués en série
La mort de Yahya Sinouar est un peu le moment «Oussama ben Laden» d'Israël. Le sexagénaire a fait partie des principaux dirigeants du groupe dès la création du Hamas. Mais après le 7 octobre 2023, qui a fait plus de 1200 morts civiles israéliennes, il était considéré comme l'ennemi public numéro un du pays. Benjamin Netanyahu l'a déclaré «homme mort», et il y est désormais parvenu.
Yahya Sinouar est loin d'être le seul dirigeant de haut rang du Hamas qu'Israël a éliminé pendant cette guerre. Ismaël Haniyeh, le chef politique du Hamas; son adjoint, Saleh al-Arouri; Mohammed Deïf, le chef de l'aile militaire du Hamas et son adjoint, Marwan Issa, ont été tués par Israël pendant la guerre à Gaza. Le Hezbollah, grand soutien du Hamas, a également subi de lourdes pertes: Israël a tué en septembre passé Hassan Nasrallah, le chef de l'organisation. Au moins neuf autres hauts responsables du Hezbollah avaient été tués auparavant par Israël.
Il faut avoir en tête à quel point tuer 15 dirigeants de haut rang de deux organisations terroristes différentes en un peu plus d'un an est difficile. A titre de comparaison, il a fallu 15 ans aux Etats-Unis pour retrouver et tuer Oussama Ben Laden, le chef de l'organisation terroriste Al-Qaida. Mais cette prouesse morbide permettra-t-elle à Israël de gagner la «guerre contre la terreur», comme l'appelle Netanyahu?
Les «décapitations», stratégie gagnante contre la terreur?
La tactique utilisée par Israël contre le Hamas et le Hezbollah est appelée «décapitation» dans les milieux spécialisés, soit l'élimination des piliers d'une organisation. L'idée est la suivante: sans dirigeants importants, l'organisation est considérablement affaiblie, et peut potentiellement se dissoudre.
Il existe quelques exemples dans lesquels l'élimination d'un leader a permis de remporter des victoires définitives sur l'organisation. Lorsque les services secrets israéliens, le Mossad, ont tué en 1978 le chef d'une faction dissidente du Front populaire de libération de la Palestine, Wadi Haddad, son groupe s'est dissous.
Mais il y a aussi d'autres exemples qui prouvent le contraire: en Afghanistan, l'assassinat d'un certain nombre de dirigeants talibans a été salué à l'époque, mais n'a rien changé aux circonstances régionales et locales qui ont finalement donné sa force au mouvement. Les talibans ont sans aucun doute été affectés par leurs pertes, mais ils ont néanmoins été en mesure de reprendre le pouvoir en 2021.
Pour en revenir au conflit à Gaza, Israël a effectivement réussi à affaiblir lourdement les capacités militaires du Hamas. Selon le gouvernement israélien, les forces de défense israéliennes ont tué plus de 17'000 combattants du Hamas sur un total de 25'000 à 35'000. Mais en même temps, il faut aussi le reconnaître: au cours des 20 dernières années, Israël a déjà tué de nombreux dirigeants et collaborateurs compétents du Hamas. Chacune de ces morts a certes imposé un changement au sein de l'organisation, mais rarement celui qu'Israël souhaitait, soit la fin du Hamas.