L’aquarium contient 34’000 litres d’eau et jamais encore les deux jeunes crocodiles n’ont connu pareil espace pour nager. A peine sortis de la boîte qui a servi à leur transport, ils glissent doucement vers le fond, puis apprivoisent leur nouvel environnement.
«On est content. Ils n’ont pas l’air de trop stresser», confie à l’ATS Sabine Wirtz, curatrice, qui est allée les chercher le matin même à Genève avec Michel Ansermet, directeur d’Aquatis.
Nés dans un zoo en Tchéquie il y a cinq ans, en mai 2017, les gavials ont d’abord passé quatre ans au bout du lac pour faire l’objet d’une recherche universitaire.
Espèce menacée par la pollution
Ces crocodiles piscivores vivent en Inde et au Népal et sont reconnaissables à leurs mâchoires étroites et allongées. Il n’en resterait plus qu’entre 300 et 900 adultes en liberté. La pollution des eaux, les barrages, la surpêche et la chasse menacent la survie de l’espèce.
Les deux spécimens d’Aquatis mesurent pour l’heure 89 et 99 centimètres. «A l’âge adulte, ils peuvent devenir très grands et atteindre les six mètres», explique Michel Ansermet. Ils sont encore trop jeunes pour qu’on puisse connaître leur sexe.
«Une première en Suisse»
«C’est la première fois que des gavials du Gange sont exposés en Suisse», selon le directeur. Ils devraient rester entre quatre et six ans à Lausanne. Après, devenus trop grands, il est prévu qu’ils partent pour un zoo de Jersey, en Angleterre.
Au-delà de l’annonce «spectaculaire» de cette nouvelle arrivée, l’aquarium-vivarium insiste sur son «engagement fort» dans les programmes de conservation. Y compris pour des espèces moins attractives, comme des insectes ou des invertébrés. «Ils sont importants pour l’écosystème total. Ils permettent la survie des grands animaux», insiste Michel Ansermet.
Mille-pattes et araignées protégés
Un crochet par la nurserie d’Aquatis permet de découvrir, dans des boîtes transparentes, 50 escargots et 20 mille-pattes venus des Seychelles, tous en grand danger d’extinction. Ces mille-pattes peuvent atteindre 30 centimètres à l’âge adulte.
Au-dessus, des boîtes abritent une centaine d’araignées d’une vallée de l’archipel de Madère menacées de disparition en raison d’une plante invasive qui colonise trous et crevasses, diminuant ainsi les abris possibles. L’objectif est qu’ils se reproduisent.
Chaque animal – qui mesure jusqu’à 12 centimètres – peut avoir entre 250 et 500 bébés et il faut les élever individuellement. «C’est un travail de ouf», s’amuse Michel Ansermet. «Dans un an, il y aura des milliers de petites boîtes. Si vous voulez venir faire du bénévolat!»
La conservation doit suivre une ligne éthique
Enfin, la conservation des espèces doit s’accompagner d’une ligne éthique. Lara, le dragon de Komodo d’Aquatis, a récemment pondu des œufs. «Nous aurions pu les faire éclore et ainsi attirer un public fou», explique le directeur. Mais il n’en sera rien, pour des raisons de diversification génétique.
Dans le programme de conservation de l’Association européenne des zoos et aquariums (EAZA), Lara a 19 frères et sœurs, dont deux ont déjà vu leurs œufs éclore. Michel Ansermet se dit «triste» de devoir détruire ces œufs – pondus sans qu’il y ait eu un accouplement, une particularité de l’espèce – mais aussi «fier de tenir une ligne éthique et de suivre les recommandations du coordinateur du programme de conservation».
(ATS)