Les rois minuscules, armés de cuillères catapultes, très talentueux pour percer les tympans les plus résistants et fort instruits quant à l'impact émotionnel de leurs larmes, sont capables de bâtir de vrais régimes tyranniques.
Il suffit d'arpenter le rayon «pédagogie» des librairies pour tomber sur une nuée de titres rassurants, promettant d'aider les parents submergés à gérer leurs petits despotes. Car notre envie naturelle de leur faire plaisir peut rapidement leur apporter la preuve implicite que nos limites sont malléables... Sans oublier qu'il est beaucoup plus simple de céder à un caprice, dans l'espoir de gagner vingt minutes de sérénité, que de rester ferme en risquant une crise de sanglots tonitruante.
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Comment reconnaître un enfant «pourri-gâté»?
Ainsi que l'explique la psychologue pour enfants Michele Borba auprès de CNBC, plusieurs signes peuvent suggérer que votre enfant est un peu trop gâté, malgré vos meilleurs efforts pour lui imposer des limites.
Parmi eux, l'experte cite notamment l'incapacité du bambin à accepter le refus, une absence de reconnaissance lorsqu'il reçoit quelque chose, une tendance à demander que ses désirs soient exaucés immédiatement, une propension à exiger constamment un traitement de faveur et une insatisfaction perpétuelle.
Heureusement, la psychologue précise que rien n'est gravé dans le marbre: «Puisque ces comportements sont appris, ils peuvent aussi être désappris, encourage-t-elle. Par contre, ne vous attendez pas à ce que vos enfants apprécient le changement, lorsque vous vous montrerez plus ferme. Ils risquent probablement de résister à votre nouveau style d'éducation, donc prenez votre temps et n'abandonnez surtout pas.»
Le choix des mots est important
Ce genre de constat ne concerne évidemment pas les nourrissons et les jeunes bébés, ainsi que le martèle la plateforme Stanford Health: à ce stade du développement, les enfants ont besoin de créer un rapport de confiance avec leurs parents, qui peuvent donc déverser toute leur attention et leur amour, sans s'inquiéter de «gâter» excessivement le nouveau-né. C'est vers 2 ou 3 ans que les choses se compliquent (on parle d'ailleurs de la période du terrible two).
«La manière par laquelle nous parlons avec nos enfants [...] influence leur compréhension de nos limites et les conséquences d'une éventuelle transgression, estime la pédopsychologue Ann-Louise Lockhart auprès du Huffington Post. Avec le temps, ils risquent de se persuader que certaines choses leur sont simplement dues, sans qu'ils aient besoin de les mériter, ce qui peut impacter leurs relations et leur comportement, en grandissant.»
Voici donc 7 phrases communes à éviter au maximum, si vous souhaitez freiner les ardeurs de votre petit roi ou mini-reine:
«Bon d'accord, mais juste pour cette fois!»
Notons d'emblée que l'idée n'est pas non plus de s'autoflageller: de nombreux parents ont souvent recours à ce genre de propos, surtout lorsque leurs nerfs menacent de flancher! Or, pour Ann-Louise Lockhart, il faudrait essayer de l'éviter un maximum: «Cette phrase implique que nos limites sont flexibles et peuvent être brisées avec un peu de persistance, explique-t-elle, toujours auprès du Huffington Post. Avec le temps, les enfants intègrent l'idée qu'en insistant, ils finiront forcément par obtenir ce qu'ils veulent.»
En guise d'alternative, la psychologue Eileen Kennedy-Moore propose de s'en tenir au «non» ferme, notamment si l'enjeu vous semble important. «Il est tout à fait acceptable de dire 'Oui, je t'ai entendu, j'y ai réfléchi, et la réponse est toujours non», indique-t-elle au média américain.
«Si tu es sage, tu auras un bonbon»
Pour Ann-Louise Lockhart, cette phrase peut créer une dynamique de transaction, poussant l'enfant à croire que la seule raison de bien se comporter est la récompense qui en découlera. «À la place, vous pouvez lui dire 'Tu as fini tes devoirs et tu es resté très concentré. Maintenant, tu as plus de temps pour jouer avant de manger!»
Selon la spécialiste, les récompenses peuvent être réservées aux réussites plus conséquentes et prendre la forme d'un encouragement verbal («Je suis très fier de toi!»), d'un geste tel qu'un high five ou encore d'un petit cadeau, comme le choix du dessert familial quotidien ou d'un nouveau jouet.
«Bien sûr, je te l'apporte tout de suite!»
«Ils doivent apprendre qu'ils ne peuvent pas toujours avoir ce qu'ils veulent dans l'immédiat», souligne Michele Borba, également au Huffington Post. Si votre enfant formule une demande alors que vous êtes occupé, la psychologue conseille de le faire attendre et de le distraire pendant qu'il patiente, en lui donnant une petite mission, en lui proposant de compter jusqu'à dix ou de chanter une chanson, selon son âge.
Vous vous sentez coupable à cette idée? Sachez qu'une étude a démontré que la gratification retardée peut améliorer le succès académique de votre enfant, en lui enseignant la persévérance et la patience.
«Je te le donne maintenant, à condition que tu sois sage plus tard»
Pour Eileen Kennedy-Moore, le risque que l'enfant ne se souvienne pas de ce genre de marché, même conclu à l'amiable avec toute la bonne volonté possible, est immense: «Plutôt que d'imposer des conditions, aidez-le à se concentrer sur les conséquences positives de l'action que vous souhaitez qu'il entreprenne. Par exemple, 'Si tu t'habilles maintenant, on aura le temps de jouer ensemble avant l'école!'»
«Tu ne dois pas faire ça si tu n'en as pas envie»
Évidemment, cette phrase est totalement acceptable et nécessaire dans certains contextes précis. Pour les expertes citées par le média américain, elle doit toutefois être évitée lorsqu'il s'agit de contourner une tâche ménagère ou toute forme de responsabilité que l'enfant, absorbé dans un jeu ou pris d'un soudain élan de fatigue, n'a plus envie d'accomplir. «Cette phrase lui montre qu'il n'est pas obligé de tenir sa promesse s'il n'en a pas envie, ce qui limite sa capacité à gérer l'inconfort ou les situations difficiles», pointe Ann-Louise Lockhart.
La psychologue recommande plutôt de valider les émotions de l'enfant, tout en lui rappelant qu'il s'est engagé à accomplir sa tâche: «On peut se mettre d'accord avec lui quant à un délai précis pour accomplir la tâche, et réévaluer la situation ensemble.»
«Mais je t'ai déjà dit ça vingt fois!»
Même si c'est la pure vérité, même si vous n'en pouvez plus de répéter une consigne identique à longueur de journée, cette phrase est à éviter aussi: «Si vous dites à votre enfant de faire quelque chose 12 fois de suite, vous l'entraînez à vous ignorer 12 fois de suite», souligne Eileen Kennedy-Moore, qui recommande plutôt de vous assurer que l'enfant vous écoute pleinement, avant de lui parler clairement, une bonne fois pour toutes:
«Dites-lui ce qu'il doit faire plutôt que ce qu'il ne doit pas faire et donnez-lui une seule consigne brève à la fois, explique-t-elle, toujours au Huffington Post. N'hésitez pas à rester debout à côté de lui, dans un silence total, en attendant que la tâche soit accomplie ou débutée.»
«Je vais aller chercher un autre jouet pour ton copain!»
Au beau milieu de la place de jeux, votre enfant refuse catégoriquement de partager son ballon avec un autre enfant. Bien que ce genre de situation paraisse tout à fait banale, les expertes citées par le média américain estiment qu'elle est cruciale pour le développement de l'empathie, de la résilience et du partage:
«Demandez-lui comment il se sentirait s'il était à la place de son camarade, propose Michele Borba. Une fois que votre enfant comprend qu'il peut aussi donner, en plus de recevoir, il va commencer à abandonner l'égocentrisme pour réaliser l'impact qu'il peut avoir sur les autres.»
Et si ça ne marche pas?
Auprès du média CNBC, Michele Borba conseille également aux parents de modifier leur comportement au quotidien, afin de déraciner les comportements tyranniques de leurs bambins: pour la psychologue, cela passe notamment par la capacité à dire «non» sans culpabiliser, à les faire attendre plus longtemps lorsqu'ils exigent quelque chose, à les encourager à développer le sentiment de gratitude et à les féliciter lorsqu'ils se montrent empathiques, apportent leur aide à quelqu'un d'autre ou acceptent de partager.
Si vous vivez une situation difficile qui impacte votre quotidien, n'hésitez jamais à vous tourner vers l'aide d'une ou d'un thérapeute spécialisé dans l'éducation.