Matt Damon et Ben Affleck entretiennent ce qui est probablement l'amitié masculine la plus célèbre d'Hollywood. Ils se connaissent depuis qu'ils ont remporté ensemble l'Oscar en 1998 pour le scénario de «Good Will Hunting». Pour Ben Affleck, cette amitié est particulièrement importante: «Avoir son meilleur ami à ses côtés, ça aide à ne pas perdre pied, après plus de 20 ans sous les feux de la rampe.»
Aujourd'hui, pour la première fois en 25 ans, les deux copains ont écrit un scénario ensemble et jouent dans un film. «The Last Duel» sera présenté en avant-première au Festival du film de Zurich à la fin de cette semaine. Dans celui-ci, la femme (Jodie Comer) d'un chevalier (Matt Damon) accuse le noble écuyer Jacques (Adam Driver) de l'avoir violée. En réponse, le roi français Charles VI (Ben Affleck) ordonne le dernier duel de chevaliers de France. Le combat consiste à décider de la culpabilité ou de l'innocence de l'écuyer.
Ben Affleck, croiser les lames et défendre l'honneur, cela ressemble à un film classique de macho?
Ben Affleck: Cette impression est trompeuse. «Le dernier duel» est l'histoire vraie d'une grande femme, Marguerite de Carrouges, qui, en 1368, a eu le courage de confronter son violeur et de demander justice. Elle défie un homme puissant en tant que femme, au péril de sa vie. C'est un film vraiment féministe.
Quelque chose comme «MeToo» au Moyen-Âge?
Affleck: Exactement. C'est pourquoi le sujet est toujours aussi pertinent aujourd'hui.
Pourquoi n'en parlez-vous que maintenant?
Matt Damon: Je connais le livre dont le film est tiré depuis 2011 et je l'avais trouvé fascinant. Mais il nous a fallu du temps pour obtenir les droits.
En tant qu'hommes, comment avez-vous pu aborder le point de vue des femmes?
Damon: Nous n'avons écrit que les rôles masculins. Pour la perspective féminine, nous avons coopéré avec la scénariste Nicole Holofcener. Elle a écrit presque toute la troisième partie seule, car elle raconte presque exclusivement le côté de Marguerite.
Affleck: A part ça, je me considère comme un féministe.
Damon: Ah! C'est pour ça la perruque blonde dans le film?
Affleck: Non, je voulais juste porter une perruque pour une fois! Sérieusement, je ressens une profonde empathie pour Marguerite et son destin. Mais surtout, c'est une histoire vraie!
Les chevaliers du Moyen Âge sont souvents dépeints comme des hommes d'honneur prêts à sacrifier leur vie pour des femmes innocentes. Votre film présente ces hommes sous un jour complètement différent!
Affleck: Tous ces stéréotypes ne sont qu'une illusion historique. Le fait est que les hommes refusaient aux femmes tous leurs droits fondamentaux à l'époque. Chevaliers, mon cul ! C'était la loi du plus fort qui prévalait dans la société. Pour les femmes, cela signifiait qu'il importait peu qu'elles soient dans leur bon droit ou non.
Damon: L'écuyer qui viole Marguerite ne voit rien de mal à cela. Selon lui, il a simplement pris ce qui lui revenait de droit. C'est ce qu'on lui a appris et c'est ce que tout le monde fait. Les femmes n'étaient alors pas des personnes, elles étaient la propriété de leur père ou de leur mari.
Comment était-ce d'écrire à nouveau un scénario ensemble après un quart de siècle?
Damon: Nous étions beaucoup plus efficaces que lorsque nous avons travaillé ensemble pour la première fois. Pour «Good Will Hunting», nous avons écrit des milliers de pages parce que nous ne savions pas vraiment ce que nous faisions. Après 30 ans sur les plateaux de tournage, on a intérêt à s'y retrouver! Nous étions nous-mêmes assez étonnés d'avoir terminé après six bonnes semaines.
Affleck: J'ai complètement choqué Matt quand je lui ai présenté un plan au début.
Si vous revenez 25 ans en arrière, au moment où vous avez écrit «Good Will Hunting»: Dans quelle mesure votre vie a-t-elle changé aujourd'hui?
Damon: A l'époque, nous avions un temps infini et aucune obligation. Nous avions une vingtaine d'années, étions au chômage et n'avions rien d'autre à faire que d'écrire. Aujourd'hui, nous avons tous les deux des enfants et nous devons organiser notre emploi du temps en fonction de qui doit emmener ses enfants où et quand qui doit les reprendre.