Vétroz (VS) est la Mecque pour les amoureux du cépage amigne. Les trois quarts de la production suisse s’épanouissent sur les pentes ensoleillées de cette zone viticole. À 59 ans, le viticulteur Serge Roh élève cette spécialité sous toutes ses formes avec son fils Vincent, 30 ans, à la Cave Les Ruinettes.
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Serge Roh met en valeur le patrimoine culturel unique de sa région. Aux côtés d’autres cépages autochtones tels que la petite arvine, l’humagne blanche et le cornalin, il consacre un hectare de ses terres à l’amigne.
L’amigne est un cépage fin et extrêmement délicat, sujet à la coulure et à l’éclatement. Mais si on lui prête suffisamment d’attention, comme Serge Roh, on est récompensé au centuple.
«Capable d’endosser plusieurs rôles»
L'amigne est connu pour ses capacités de transformation: sec, moelleux, liquoreux, il sait tout faire. «Les vins doux exhalent un parfum intense d’agrume, de poire et d’abricot sec. L’acidité naturellement élevée du cépage leur donne un goût délicieusement équilibré. Quel que soit le rôle dans lequel il se glisse, il impressionne à sa façon», se félicite Serge Roh.
Lui aussi jouer différents rôles: «J’aime les changements de perspective: je suis à la fois vigneron, homme d’affaires, hôte et batteur.»
Un roc dans la tempête
Malgré ses multiples activités, Serge Roh affiche une sérénité inaltérable. Même lorsque, en 2021, des merles se sont abattus sur sa récolte d’amigne destinée au vin doux, ne laissant du raisin que pour l’équivalent d’une caisse de vin, il est resté stoïque: «Mon métier réserve toujours son lot de surprises.»
Il ne savait pas non plus si son audace serait récompensée quand il lança en 1996 la première vendange tardive d’amigne élevée en fûts de chêne (grain noble), sur le modèle du légendaire sauternes du Château d’Yquem. Elle le fut, pourtant, avec un vin expressif, au potentiel de garde étonnant et qui s’est taillé une place de choix dans la collection du vigneron. Depuis, Serge Roh a passé les épreuves du feu les unes après les autres et a toujours brillé lors des concours.
Une production très prisée
Tout ce qui sort des caves de Serge Roh est très demandé. Ses vins charismatiques figurent sur la carte des restaurants étoilés et se sont même retrouvés sur les étagères d’un caviste new-yorkais.
Interrogé sur les raisons de son succès, Serge Roh évoque d’un côté ses exigences élevées en matière de qualité. De l’autre, il le met également sur le compte des efforts qu’il a consentis dès son plus jeune âge. «À Vétroz, les vignerons s’entendent bien et mettent toute leur passion pour faire connaître leurs vins. Cela vaut également pour la mise en place de l’appellation Grand Cru, réservée aux vins de qualité particulièrement élevée et présentant des caractéristiques typiques», explique-t-il.
L’amigne de Vétroz a surtout gagné en notoriété grâce au lancement de l’étiquette «Abeille» par l’association des vignerons locaux, dont Serge Roh fait partie. Ce petit insecte zélé indique le caractère des vins.
Une abeille sur l’étiquette représente un vin sec, jeune et frais, deux abeilles un vin moelleux et trois abeilles un vin doux et complexe.
L’année à retenir: 1963
Né en pleines vendanges en 1963, Serge Roh fête cette année son 60e anniversaire. Il pense à tout sauf à la retraite: «Je ne veux pas m’accrocher, mais rester actif aux côtés de la jeune génération.»
Et la jeunesse ne fait pas défaut dans la Cave Les Ruinettes. Pour la plus grande joie du père, deux enfants sur trois ont suivi une formation dans ce métier et le fils aîné, Vincent, travaille déjà dans l’entreprise familiale. Même si les bougies sur son gâteau d’anniversaire ne seront soufflées qu’en octobre, Serge Roh a déjà reçu un cadeau. «Les vendanges 2022 ont été extraordinaires. C’est déjà un cadeau en soi. Mais il y aura d’autres surprises quand la fête arrivera… Peut-être un grand format de mon assemblage rouge 1963, qui porte à la fois mon année de naissance et le code postal de Vétroz.»