Les consommateurs d'aujourd'hui veulent de plus en plus que leurs produits soient sans viande, sans sucre, ou encore sans additifs. «De nos jours, 'sans' est un meilleur argument de vente que 'avec', explique Karin Frick, chercheuse en tendances à l'Institut Gottlieb Duttweiler. Les consommateurs recherchent l'authenticité, et sont de plus en plus conscients de leurs problèmes de santé. Le Covid a renforcé ce phénomène davantage encore.»
L'industrie du chocolat doit changer
La Gen Z contribue également à ce changement, selon Karin Frick: «Les moins de 30 ans sont la première génération à avoir grandi avec des parents conscients de l'importance d'une bonne alimentation. Les jeunes consommateurs veillent donc sans compromis à consommer des aliments aussi naturels et sains que possible.»
Cette évolution met l'industrie du chocolat dans l'embarras: cet aliment n'est pas vraiment considéré comme faisant partie intégrante d'un mode de vie sain, pour ce qui est du chocolat au lait du moins. Le secteur doit donc, à présent, faire preuve de créativité.
Le transformateur laitier finlandais Valio vient d'analyser 1,5 million de discussions publiques sur les réseaux sociaux à propos du chocolat au lait, ceci à l'aide de l'intelligence artificielle. Résultat: le chocolat ultime d'aujourd'hui, au goût du jour, devrait contenir 30% de sucre en moins, et être sans lactose. En septembre déjà, Nestlé a (re)lancé la course au chocolat végétalien en lançant dans toute l'Europe un kitkat à base de riz.
Un chocolat à deux ingrédients
Cette semaine, la lutte pour le chocolat de demain est passée à la vitesse supérieure. Le géant du chocolat Barry Callebaut, dont le siège est à Zurich, a présenté son nouveau produit: un chocolat composé de deux ingrédients seulement. La variante noire contient du cacao et du sucre, tandis que le chocolat au lait est mélangé à du lait en poudre. Le chocolat se passe donc d'émulsifiants tels que la lécithine et d'arômes. Par rapport au chocolat traditionnel, il contient deux fois moins de sucre.
«Notre processus de fabrication met pour la première fois en valeur les nuances particulières du goût de chaque fève de cacao, ce qui nous évite d'avoir recours à des ingrédients supplémentaires», explique Peter Boone, CEO de Barry Callebaut, au SonntagsBlick. On ne trouve pas Barry Callebaut dans les supermarchés, mais l'entreprise est présente dans un produit industriel à base de chocolat sur quatre dans le monde. Elle fournit des groupes comme Nestlé ou Mondelēz. Sa pâte de chocolat enrobe par exemple les glaces Magnum.
Les clients pas encore convaincus
Si l'entreprise lance un «chocolat deuxième génération», cela peut secouer le marché. «Nous voulons accélérer les efforts de la branche pour répondre au souhait des consommateurs d'un plaisir plus conscient», déclare le CEO Peter Boone. Mais pour cela, il doit encore convaincre ses clients de passer au chocolat à deux ingrédients et de modifier leurs recettes, leurs emballages et leurs étiquettes.
Il devrait donc encore s'écouler au moins un an avant que ce chocolat ne soit disponible dans les rayons. A terme, le secteur devra s'adapter d'une manière ou d'une autre. Selon l'institut de recherche britannique Foresight Factory, le chocolat qui mise sur le plaisir conscient a connu une croissance de 6% entre 2016 et 2021, soit nettement plus que le marché global. Les gouvernements du monde entier réglementent déjà la consommation de sucre. Pour ce qui est de la Suisse, dans certains cantons romands, on discute actuellement d'une taxe sur le sucre.
«En outre, les jeunes consommateurs regardent aujourd'hui de près les entreprises, que ce soit en termes de contenu ou de fabrication durable des produits», explique la chercheuse Karin Frick. «Si quelque chose ne va pas, ils se servent des réseaux sociaux pour le dire haut et fort.»
(Adaptation par Lliana Doudot)