C'est parti pour la cent trente-deuxième saison de Top Chef. Comment ça, la quatorzième seulement? Le temps ne passe pas si vite que ça. Comme l'émission en fait. Le show culinaire diffusé sur M6 est, aux dires de tous mes proches, aussi long qu'un discours de Fidel Castro et finit de toute façon trop tard pour être regardé (j'ajouterais que dans mes souvenirs, ça me semblait aussi vachement truqué, sûrement mon côté complotiste). Bref, je me suis sacrifié pour visionner le premier épisode et vous en faire un récap pour que vous puissiez suivre les conversations à la machine à café.
Les choses commencent mal, c'est-à-dire pas avant 21h10 officiellement, soit 21h15 dans les faits. Après une pub aussi préventive que ciblée pour du Dulcolax, viennent celles des partenaires commerciaux. C'est toujours bizarre de voir la grande distribution sponsoriser une émission de haute gastronomie. «L'espuma de pommes de terre M-Budget revisitées, et son coulis de fraises espagnoles de février à 99 centimes en ce moment chez Auchan», ça ne fait pas vraiment saliver.
Rendez-vous... dans la gadoue
Pour une fois, la saison est déclinée en thèmes bien définis: la street food, les palaces, les trompe-l'œil (j'espère que vous aimez ça), une battle contre des Meilleurs ouvriers de France et les inévitables épreuves de la boîte noire (qui sera blanche) et la mythique guerre des restos. Mais avant de tutoyer le firmament culinaire, les candidats démarrent tout en bas, dans la gadoue, sur une épreuve libre autour de la pomme de terre, filmée dans les champs.
Sur 15 candidats, 11 seront sélectionnés et répartis dans 3 brigades. Oui, trois et pas 4 car la cheffe Hélène Darroze récupèrera les éliminés dans une seconde émission en deuxième partie de soirée et dont le gagnant aura le droit de rejoindre, surprise, le concours en quart de finale. Mais là, ce soir, l'émission n'a pas eu lieu, et Hélène Darroze était là en dernière chance. Top Chef c'est comme la cuisine zéro déchet: on recycle, on réutilise, on ne jette rien.
Première épreuve: la pomme de terre
Jean, 25 ans, Paris, AKA «on va essayer de filouter». Il aime l’humour et le prouve en disant «chaud patate» (vous l’avez?). Ce grand dadet au sourire de Fernandel, qui comme Patrick Balkany kiffe jouer au golf, aller aux champignons et mettre ses pantoufles, a l'air porté sur l'autodérision et ça me plaît. Trois points pour Gryffondor.
Brigade: Paul Pairet
Carla, 25 ans, Naples, AKA «le but c’est de survivre», pas comme les oursins qu’elle est en train de charcuter. Passée dans les cuisines de plusieurs chefs elle s'est mise à son compte en Italie, où sa pizzeria a un temps fait partie des 100 meilleures du pays. Hommage à son pays d'adoption, elle part sur une «pomme de mer»: spaghettis de patates avec des oursins, que je n'ai pas trouvés très appétissants. Son portrait dure longtemps, signe d'une potentielle élimination, et pourtant, elle passe.
Brigade: Etchebest of big mac
Danny, 27 ans, Genève, AKA «je râpe pas que des carottes». Bon, lui, on vous a assez bassinés avec: c'est le genevois de la bande, qui bosse en tant que sous-chef au Bayview sous la houlette de Michel Roth. Et sinon, il fait aussi du rap à ses heures perdues. Il est drôle, chou, stylé avec ses longs cheveux tressés, et il a un rire complètement débile: je l'aime un peu, et même beaucoup, puisqu'il part sur des croissants de patate en trompe-l'œil, sûrement pour flatter ma fibre patriotique.
Brigade: Etchebest, bien sûr.
Miguel, 27 ans, sous-chef à Lyon, AKA «je vais tous vous enterrer». Bon, la vue d'un Mexicain qui creuse une tombe fait un peu flipper en début d'épreuve, mais c'est pas pour les candidats, c'est pour faire une cuisson de ses patates à la barbacoa, dans laquelle il fait cuire ses aliments dans un trou rempli de braises. Évidemment, ça n'excite que Paul Pairet. Il se fait un peu allumer par Glenn Viel: «Avec toutes ces couleurs, on s’attend à voir un dessin animé et on mange un film en Noir et blanc». Fais gaffe Miguel.
Brigade: repêchage.
Mathieu, 30 ans, Nouvelle-Zélande, AKA «le plus gros challenge de ma vie». Bon Mathieu, j'espère que ta cuisine est plus originale que cette citation toute pourrie. Son profil l'est en tout cas: il participe à Top Chef avec son frère Jacques, avec qui il a bourlingué dans le monde avant d'atterrir en Nouvelle-Zélande, où leur restaurant a été élu le meilleur du pays. Il parle un peu à la Van Damme («je vais utiliser du mushroom broth») et écrit comme un enfant de 10 ans, ce qui est décidément très choupinet.
Mathieu a préparé un taco de patatas végétarien en créant l'illusion de viande dedans, et ça a tellement bluffé les chefs qu'ils l'ont tous voulu dans leur brigade, une première en quatorze ans. Je lui décerne un Blick Food d'or, et lui offre un an d'abonnement premium, allez.
Brigade: Glenn Viel.
Son frère, c'est Jacques, donc, grand barbu barraqué qui a bricolé un os à moëlle de bistrot rempli de pommes de terre. On l'a peu vu, mais j'aurais bien goûté. Pas de Blick Food d'or par contre, c'est un seul par famille.
Brigade: Paul Pairet.
Et à part ça, il y a eu deux candidats vus en coup de vent: Jérémy, 40 ans, expatrié à Québec. Il a sorti une patate en œuf à la coque qui ne ressemblait à rien. Mais comme la plupart des candidats dont on ne voit pas le portrait, il va revenir. La preuve: sa patate cheloue le fait atterrir dans la brigade de Glenn Viel.
Quant à la dernière, Bérangère, 33 ans, cheffe de son propre resto à Paris, elle me fait penser à Droopy et elle a tenté une assiette de dessert qui avait l'air pas mal mais qui n'a pas fait mouche: repêchage.
Deuxième épreuve: la pomme pas de terre
Victor, 23 ans, Paris, AKA «il y a peut-être quelque chose écrit pour moi». Bon alors là, il faut suivre, parce que si Victor dit ça, c'est parce qu'il a les chiffres 1 et 4 tatoués sur les paupières. Faut les passer en début d'émission ces profils, on ne comprend déjà plus rien. Rôtisseur à la base, il se montre charmeur, charismatique et la prod' de M6 le montre même sous un jour carrément érotique en le filmant en train de remplir des saucisses: c'est chaud. Bref, on sent tout de suite que ce candidat va tout déchirer dans le concours. Son hot dog au pain perdu à la pomme, porc et foie de volaille est finalement très marronasse, pas de Blick Food d'or.
Brigade: Paul Pairet.
Alexandre, 25 ans, chef de son propre restaurant à Paris, AKA «votez pour moi les chefs». Lui son nom c'est Alexandre Marchon, du coup la prod' en fait des caisses en passant la Marseillaise («marchons, marchons») et en l'affublant d'un pull marinière. Du grand M6 bien débile. Cet ancien publicitaire passé par… Un diner presque parfait a un peu une tête à claques. Pire, il nous prend la tête immédiatement en présentant son plat qui doit illustrer «la détresse des producteurs de pommes due au changement climatique». Et tout de suite, une page de pub. Bon, il s'est un peu foiré sur ses meringues, mais les chefs étaient contents. Allez, va pour un deuxième tour.
Brigade: Glenn Viel
Albane, 23 ans, cheffe exécutive de 2 restos à Paris, AKA «je suis en train de réfléchir sur la lune». Sa présentation est peu cringy, avec son oignon qu'elle appelle Groot et à qui elle parle avec sa voix toute cassée. Son plat, c'est de la «cuisine holistique» censée allier saveurs et santé, et ça a l'air tellement chiant qu'on a l'impression d'écouter une conférence d'homéopathe.
Brigade: repêchage, direct
Gaston, 28 ans, chef privé, Londres, AKA «à chaque situation, je trouve une solution». Ce grand rouquin «queer, gay et fier de l'être» bosse dans un immense penthouse à Londres où il fait à bouffer «pour des VIP ultra-confidentiels». Ses pitreries moléculaires impressionnnent peut-être Susan Boyle, mais pas nos chefs qui se sont fait chier sur son plat et ont déploré son absence de risque.
Brigade: repêchage
César, 26 ans, chef indépendant, AKA «la cuisine m'a donné la force de me battre tous les jours». Ha, le voilà enfin, le Belge de service, on va pouvoir se marrer. Ha bah non en fait, on va pas se marrer du tout puisque son portrait démarre immédiatement sur sa leucémie, diagnostiquée à l'âge de 8 ans, et pour laquelle on lui donnait 3 mois à vivre. On ne va pas se mentir, ça casse un peu l'ambiance, mais ce survivant tout mignon a l'air attachant, on a envie de le voir plus loin et ça tombe bien, parce que son sandwich à la pomme avec des gaufres bruxelloises et des tourteaux a carrément séduit le jury. Je ne mets pas de Blick Food d'or, parce que vous allez dire que je ne récompense que les sandwiches, et vous aurez raison. Offrons-lui un an d'abonnement à Blick quand même, c'est mérité.
Brigade: Glenn Viel
Hugo, 23 ans, second dans un resto 3 étoiles, Annecy, AKA «c’est pas parce qu’on est jeune qu'on peut pas faire de grandes choses». Lui, il a l'air de déchirer, en même temps quand on bosse au Clos des Sens avec Laurent Petit, on doit pas mal se débrouiller. Son trompe-l'oeil (oui, encore un) de pâtes au pesto faites en pommes a bien cartonné.
Brigade: Etchebest
Et sinon, il y avait aussi un certain Léo, 27 ans, chef à Paris dont on n'a pratiquement rien vu si ce n'est quelques larmes quand Paul Pairet l'a choisi pour son boudin aux pommes servi, wait for it, en trompe-l'oeil.
Brigade: Paul Pairet
Troisième épreuve: la dernière chance
Les quatre candidats en ballotage se retrouvent pour une heure sur le thème de la volaille. L'épreuve part sous l'air de «Paint it black», on se dit que ça devient n'importe quoi, mais étant donné qu'il est déjà 23h30, plus personne n'y fait vraiment attention. Mention spéciale débilité à M6 encore, qui n'a pas pu s'empêcher de foutre un air de mariachis quand Miguel était filmé avec ses chaussettes tacos.
Les assiettes sont pas vilaines, enfin sauf celle de Bérangère, qu'on dirait sortie du Dîner presque parfait.
Repêchés: Albane et Gaston, qui devront gagner une épreuve la semaine prochaine pour rentrer dans une brigade à la place de deux autres candidats. Comme c'est cruel.
La semaine prochaine ce sera, devinez quoi? Des trompe-l'oeil, ouais.