Le dernier jour de l'été!
C'est (bientôt) le retour du vacherin Mont-d'or

La saison de ce délicieux fromage est officiellement lancée le 21 septembre 2024. Quelles différences entre le vacherin Mont-d'or suisse et son cousin français le Mont d'or? Blick fait le point.
Publié: 01.09.2024 à 20:01 heures
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Dernière mise à jour: 02.09.2024 à 20:48 heures
Le vacherin Mont d'Or a une croûte orangée et plissée.
Photo: Blick
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Fabien GoubetJournaliste Blick

Une belle croûte plissée qui rappelle les montagnes, une pâte onctueuse, crémeuse et coulante, avec de subtils tanins boisés transmis par la fameuse sangle en épicéa: le vacherin Mont-d'Or est de retour. On le célébrera samedi 21 septembre aux Charbonnières (VD) à l'occasion du lancement officiel de la saison de ce fromage dont la production démarre chaque année aux alentours du 15 août.

Le fameux fromage du Jura vaudois, qu'on déguste simplement chauffé au four, dans des recettes plus élaborées ou plus simplement à la cuillère directement dans sa boîte, est le meilleur des lots de consolation pour qui doit supporter l'automne et l'hiver.

Pourtant, niveau popularité, c'est un peu le Poulidor des fromages fondus, mais en troisième. Tout le monde l'adore, n'empêche qu'il finit toujours à l'ombre des grosses meules de raclette et de gruyère, qui squattent les plus hautes marches du podium.

Le Poulidor des fromages fondus

Celui qu'on surnomme malgré tout le «roi des fromages» (comme… le gruyère, l'emmental, le roquefort, le brie et certainement à peu près tous les fromages) a pourtant de sérieux arguments pour lui, malgré un contexte économique fragile.

Prix en hausse d'un franc au kilo, ventes en baisse de 8,3%: en fin de saison 2022, 12 tonnes de fromage avaient dû être détruites. Mais le directeur de l'interprofession, Pascal Monneron, voit le verre à moitié plein: «Cette année se présente plutôt bien, les commandes sont intéressantes, y compris depuis l'étranger, en France et en Amérique du Nord notamment.»

Le seul fromage AOP à pâte molle

Le responsable préfère penser à l'Appellation d'origine protégée (AOP) du vacherin Mont-d'Or, qui fête ses 20 ans cette année: «En vingt ans, la qualité des fromages a augmenté très positivement. Et puis l'AOP nous a permis d'être mieux considérés par les grossistes.» Et même si ce n'est pas stipulé dans le cahier des charges de l'AOP, la production des boîtes et des sangles a été rapatriée en Suisse en 2021 (elles étaient auparavant fabriquées dans le Jura français), rendant à ce fromage son identité 100% locale.

Autre particularité qui rend le vacherin Mont-d'Or unique: c'est la seule AOP de fromage à pâte molle en Suisse. Et ça, au pays du gruyère, ce n'est pas anodin. «On apporte de la variété. Quand il n'y a que des pâtes dures sur le plateau, on a vite fait le tour!», glisse avec malice Pascal Monneron.

Enfin, dernière bizarrerie de ce fromage: il a un cousin fabriqué de l'autre côté de la frontière: le Mont d'Or AOP, spécialité du Doubs. Qu'on appelle aussi parfois vacherin du Haut-Doubs. Forcément, on a très envie de comparer les deux.

Où sont fabriqués les Mont d'Or et le vacherin Mont-d'Or?

Les zones géographiques sont restreintes des deux côtés de la frontière. En Suisse, elle correspond à la vallée de Joux. Neuf fromagers et 3 affineurs sont responsables de la fabrication, pour quelque 150 producteurs de lait. De 550 à 600 tonnes sont produites chaque année.

La zone suisse
Photo: DR

En France, la région de production s'étend dans le Haut-Doubs, une zone frontalière de 95 communes à une altitude de 700 mètres minimum, centrée autour de Pontarlier. Elle est répartie sur dix fabricants, dont un fermier qui transforme son propre lait (la ferme Mamet, aux Fins, près de Morteau) pour 400 producteurs de lait. La production est dix fois plus importante: environ 5500 tonnes ont été fabriquées en 2022.

Et la zone française
Photo: DR

Quelles vaches pour produire Mont d'or et vacherin Mont-d'Or?

Le cahier des charges suisse n'impose pas de race particulière. En France, seul le lait des races Montbéliardes et Simmental est autorisé. Dans les deux cas, les bêtes ne peuvent pas être nourries avec du fourrage fermenté par ensilage. En Suisse, 70% de l'enfourragement doit provenir de l'exploitation où vivent les vaches. En France, elles prennent chaque jour «au moins un repas en pâture l'été», explique Eric Février, éleveur à Arc-Sous-Cicon (Doubs) et président de l'AOP Mont d'Or.

Mont d'Or et vacherin Mont-d'Or n'utilisent pas le même lait, et n'ont pas la même durée minimale d'affinage

Au niveau du lait, l'AOP français impose d'utiliser du lait cru, ce qui fait la fierté des fabricants. «C'est plus compliqué de travailler avec du lait cru, car cela nécessite d'effectuer des analyses bactériologiques quotidiennes, voire plusieurs fois par jour pour les plus gros ateliers de fabrication. L'avantage, c'est que les saveurs sont plus riches avec du lait cru: il y a des arômes et des textures qu'on ne retrouve pas avec du lait pasteurisé ou thermisé», assure Eric Février.

La thermisation, c'est justement le procédé obligatoire pour le vacherin Mont-d'Or suisse. Le lait est chauffé à une soixantaine de degrés. Le procédé tue «environ 60% de la flore microbienne» selon Pascal Monneron, ce qui lui fait perdre une partie de sa palette de saveurs. Pour compenser, la durée d'affinage est prolongée à au moins 17 jours, et rarement en dessous de 25 jours. En France, l'affinage minimal est de 12 jours minimum, mais il se poursuit ensuite dans la boîte, fait valoir Eric Février.

Les fromages n'ont pas la même couleur

Visuellement, les fromages sont différents: la croûte du Mont d'Or est plus claire, plus blanche que celle de son cousin suisse, qui tire sur l'orangé. Ceci s'explique par le lavage des croûtes côté vaudois. «Le fait de laver et frotter la croûte renforce aussi les saveurs», ajoute Pascal Monneron.

Les boîtes en épicéa: les mêmes des deux côtés de la frontière…ou presque

Les Mont d'Or ne seraient pas les Mont d'Or sans leurs fameuses boîtes et sangles en épicéa. Ici, on les cercle d'une sangle en épicéa rouge de la vallée de Joux. «La sangle faite partie des ingrédients, elle transmet ses tannins au fromage», affirme Pascal Monneron. Si on en fabrique encore en France, bon nombre de sangles en épicéa viennent aujourd'hui de Pologne. Et saviez-vous comment on appelle les artisans qui fabriquent ces sangles? Les sangliers, et ça, c'est rigolo.

Et encore une différence

Elle est subtile, celle-là: le vacherin Mont-d'Or prend un tiret, quand le Mont d'Or n'en prend pas. La différence est historique et remonterait aux années 1950, lorsqu'à l'époque de l'Europe naissante, il a fallu déterminer précisément les produits agricoles fabriqués.

Comment choisir et déguster un bon Mont d'Or?

Si vous optez pour un vacherin Mont-d'Or, cherchez-en un «avec une couleur brun clair, et de légères vagues sur la croûte, conseille Pascal Monneron. C'est le signe qu'il sera moelleux, légèrement coulant.» Et puis, ajoute-t-il, on peut regarder le nom du producteur inscrit sur la boîte pour varier les plaisirs, car chaque fabricant propose des vacherins différents. Il faudra compter un peu moins de vingt francs pour un fromage de 700 grammes, ce qui en fait un fromage de luxe.

Si vous voulez essayer un Mont d'Or français au lait cru, privilégiez «les fromages dont la boîte a l'air bien remplie, avec une croûte uniforme, bien plissée et bien souple. Elle ne doit pas donner l'impression d'être épaisse», recommande Eric Février. Comptez un peu moins d'une quinzaine d'euros pour un Mont d'Or de 700 grammes.

Quant à la dégustation, nos deux experts sont unanimes: ils préfèrent manger ce fromage «froid», autrement dit à température ambiante, plutôt que rôti au four. «Si on veut sentir tous les arômes, c'est mieux, assure Eric Février. Avec une pomme de terre et un peu de charcuterie, c'est le plus simple et le plus convivial.» Et vu qu'il fait encore chaud, autant ne pas allumer le four.

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