Les autoroutes suisses ne devraient pas être plus larges sur six tronçons. Contre l'avis du Conseil fédéral et du Parlement, le peuple aurait refusé à 52% dimanche les projets d'extensions autoroutières, dont un romand, selon une projection de l'institut gfs.bern. Le résultat est toutefois encore incertain. La marge d'erreur est de +/- 3%. En cas de refus, ce serait le premier échec dans les urnes du conseiller fédéral Albert Rösti.
Des résultats définitifs sont tombés. Fribourg dit «non» à 56,3%. Dans le reste de la Suisse romande, les résultats encore partiels vont dans la même direction. Le Jura rejette les extensions à 61,1%, Neuchâtel à 60,7%, Vaud à 58,7%, ainsi que Genève à 56,5%. Dans le canton du Valais, le refus se monte à 53,5%. Le Tessin dit également «non», à 56,3%. Dans les autres résultats définitifs, Schwyz accepte les projets à 59,2%. Même résultat positif en Argovie (54,3%), à Nidwald (51,7%) et à Soleure (51%). Au contraire, le canton des Grisons refuse les extensions à 57,3%, de même que Lucerne (53,4%), Glaris (53,2%) et Uri (51,9%).
Outre-Sarine, selon des résultats intermédiaires, Bâle-Ville rejette aussi les extensions (56%), de même qu'Obwald (50,3%). A Zurich, selon une projection, le rejet se monte à 51%. Les projets récoltent cependant un vote positif à Berne (51,4%). Même scénario à Saint-Gall (55,3%), à Bâle-Campagne (54,2%) et à Thurgovie (53%).
Les six projets sont devisés à quelque cinq milliards de francs. Près d'un milliard est prévu pour l'axe Le Vengeron-Coppet-Nyon (GE/VD), qui doit être élargi à deux fois trois voies sur une distance d'environ 19 km. Le référendum a été déposé par l'Association transports et environnement (ATE) et l'organisation actif-trafiC. Il est soutenu par les Vert-e-s, le PS et le PVL, ainsi que par une cinquantaine d'organisations de protection de la nature et du climat.
Une grande et bonne surprise pour les opposants
Le comité référendaire contre les projets d'élargissement des autoroutes, emmené par l'Association transports et environnement (ATE) et l'organisation actif-trafiC, se dit «positivement surpris» à l'issue du scrutin dimanche. Contact par Keystone-ATS, le député Vert vaudois David Raedler, co-président de l'ATE, est très satisfait du «non» qui se profile dimanche en milieu de journée. Il se dit positivement surpris de constater que le clivage ville-campagne et Suisse romande et Suisse alémanique n'est pas si marqué. Il y voit un «choix mature» de la population à laquelle «on ne peut pas promettre n'importe quoi». Les projets d'extension ne sont pas une solution, ils aggravent le problème, réitère M. Raedler. Les arguments de l'impact sur la nature et celui du prix ont aussi pesé.
Le parti écologise parle aussi de victoire historique. Il estime avoir réussi à rallier la population à sa vision d'avenir de la mobilité, qui ne passe pas par le bétonnage, mais par une mobilité respectueuse du climat. «Notre travail de fond a convaincu la population qui ne s'est pas laissé duper: elle s'est mobilisée contre une politique de mobilité du passé», commente dimanche Lisa Mazzone, présidente des Vert-e-s suisses, dans un communiqué. Les forces écologiques ont remporté un nouveau succès en votation après le succès de la loi climat et de la loi sur les énergies renouvelables. L'argent du fonds d'agglomération doit désormais être affecté au développement des transports publics, à la mobilité active et à l'assainissement des autoroutes existantes, en particulier pour la protection contre le bruit, ajoute la conseillère nationale Delphine Klopfenstein Broggini (Vert-e-s/GE). Pour le parti, l'argent du fonds routier ne doit plus être utilisé pour l'aménagement des routes, mais doit servir à la protection du climat.
Interrogée plus tôt par la télévision alémanique SRF, la coprésidente du PS Mattea Meyer avait salué une «grande et bonne surprise» La Zurichoise a interprété le résultat comme un vote en faveur d'une meilleure protection du climat. La population veut une autre mobilité, pas toujours plus de trafic et d'embouteillages, a-t-elle déclaré.
Un problème de mobilisation pour les perdants
Le conseiller aux Etats tessinois Fabio Regazzi (Le Centre/TI), co-président du comité en faveur de l'extension des autoroutes, est surpris par le rejet des projets. Selon lui, une telle votation aurait été facilement gagnée voici quelques années: il évoque un «certain changement» dans la société et un problème de mobilisation. Les nombreuses heures d'embouteillage sont un problème pour l'économie, a déclaré dimanche Fabio Regazzi à la radio alémanique SRF: «J'ai du mal à comprendre pourquoi cela n'a pas été compris,» a dit le Tessinois.
Celui qui préside aussi l'Union suisse des arts et métiers (USAM) estime qu'il est encore trop tôt pour une analyse définitive. Selon M. Regazzi, une raison possible de la défaite du camp du oui est que le camp rose-vert a mieux mobilisé: «Nous avons eu du mal. Seuls quelques cantons étaient concernés. Dans les autres cantons, il n'a pas été aussi facile de convaincre les gens.»
La conseillère nationale Susanne Vincenz-Stauffacher (PLR/SG) s'est également montrée déçue: «C'est difficile à digérer pour moi et difficile à expliquer», a-t-elle déclaré à la télévision SRF. Pour sa ville natale de Saint-Gall, un troisième tunnel à travers le Rosenberg aurait été «décisif» pour la qualité de vie.