Depuis qu’a commencé l’engouement pour le bitcoin en 2017, la communauté des fans de cette cryptomonnaie avait l’habitude de la comparer à l’or. Aujourd’hui, on se rend compte, à l’épreuve de la réalité, que cette comparaison n’était pas justifiée et que l’or est la meilleure valeur-refuge.
Ainsi, on avait prétendu que :
- L’or et le bitcoin étaient tous les deux une solide alternative aux monnaies papier, qui se déprécient au fil du temps.
- Ils protégeaient contre l’inflation, car ils sont produits en quantités limitées.
- Tous les deux étaient décentralisés, c’est-à-dire indépendants de toute banque centrale.
- Ils étaient indépendants des marchés financiers, qui ne pouvaient pas les entraîner dans leur chute.
- L'or et le bitcoin seraient un moyen d’échapper à l’autoritarisme des gouvernements.
Peu à peu, ce narratif a pris l’eau. Et cela, déjà bien avant la méga-faillite de la crypto-bourse FTX. En cinq ans, le bitcoin n’a pas prouvé qu’il était «l’or digital» que l’on imaginait. Tout d’abord, le bitcoin est beaucoup plus volatil que l’or, entre 5 et 15 fois, selon les périodes. Sa volatilité extrême signifie qu’il ne peut pas être un refuge de valeur sur le long terme comme l’or, car sa valeur fluctue énormément. En 7 ans, elle a été multipliée par 60, puis divisée par 3, avant d’être multipliée par 20, puis divisée par 3. Impossible de prévoir où elle sera dans 10 ans. Sur la même période de 7 ans, l’or a fluctué, au maximum, du simple au double.
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L’or reste l’actif de guerre
Signe que les investisseurs perçoivent l’or et non le bitcoin comme une valeur refuge: quand la guerre en Ukraine a éclaté, l’or a gagné 14% entre février et début mars, tandis que le bitcoin a oscillé fortement sans direction précise. Autre indicateur qui mérite d’être suivi, les banques centrales étrangères ont acheté 674 tonnes d’or sur 9 mois cette année, un record depuis 1967. De gros acheteurs ne sont pas divulgués, mais on sait que la Turquie, l’Ouzbékistan, l’Inde et le Qatar figurent parmi les principaux.
Pas techno-dépendant
L’or, actif millénaire, ne dépend pas d’une connexion internet, de l’électricité, d’un mot de passe ou d’une technologie, contrairement au bitcoin. La fragilité de cette dimension technologique a été sous-estimée par les fans de cryptos. Des situations de guerre peuvent couper l’accès à internet et rendre les échanges des cryptomonnaies difficiles. Divers gouvernements, comme l’Iran ou le Kazakhstan, ont instauré un «internet national», qu’ils «ferment» lorsqu’ils le désirent, privant les usagers de connexion. Seules des personnes calées en informatique parviennent à contourner le blocage et à transférer des cryptomonnaies dans ces conditions.
À l’inverse, l’or ne dépend nullement d’une connexion. En cas de crise, avoir des pièces d’or sur soi permettrait de se procurer des biens de manière simple et tangible. C’est en période de crise que l’on attend d’un actif une sécurité supplémentaire et non quand tout va bien.
En outre, l’or est plus indépendant des marchés financiers que le bitcoin. Quand les marchés chutent, le bitcoin chute en même temps, de manière amplifiée, tandis que l’or évolue de manière plus indépendante. Le constat a été confirmé maintes fois.
Comparons l’indice des actions européennes (Euro Stoxx 600), avec l’or et le bitcoin exprimés en euros: on constate que le bitcoin sur 1 an a chuté comme les actions et de manière amplifiée, tandis que l’or s’est apprécié en euros, confirmant son indépendance des marchés.
Sur 20 ans, la hausse de l’or face à l’euro est encore plus nette. Aujourd’hui, il faut 6 fois plus d’euros pour acheter la même once d’or qu’il y a 20 ans. Celui qui aurait investi en or plutôt qu’en euros en l’an 2000 aurait gagné au change.
Face au franc suisse également, l’or s’est apprécié sur la durée. Le franc, qu’on estime fort, s’est dévalué contre l’or, qui s’avère donc un meilleur refuge de valeur que le franc. Si vous aviez gardé 200 francs suisses sous votre matelas depuis 50 ans, vous auriez 8 fois moins aujourd’hui que si vous aviez converti ces 200 francs en or à l’époque. Dans ce cas, votre once vaudrait 1600 francs aujourd’hui. En d’autres termes, il faut 8 fois plus de francs suisses pour acheter la même once d’or qu’il y a 50 ans, comme illustré par le graphique ci-dessous.
Beaucoup moins volatil que les cryptomonnaies, l’or s’avère être le meilleur réservoir de valeur, sur la longue durée, que n’importe quelle monnaie. On a d’ailleurs prêté à tort au bitcoin les caractéristiques d’une monnaie. S’il est vrai qu’il a initialement été conçu comme une monnaie, il s’est d’abord imposé comme un placement spéculatif, qu’on peut prêter contre rendement, emprunter, jouer à découvert, ou avec beaucoup de levier. L’or, lui, se prête moins à ce type de spéculations, car c’est un actif physique, tangible. Dommage que la Banque nationale suisse (BNS) ne conserve que 6% de ses actifs en or, alors que c’est de loin la valeur-refuge la plus solide.
Cours de l’once d’or en CHF: il faut 8 fois plus de francs aujourd’hui pour acheter la même once qu’il y a 50 ans.