Actif tangible, rare, qui peut être conservé sans s’altérer pour l’éternité: les vertus de l’or semblent être redécouvertes. L’épopée du métal jaune est impressionnante: en 20 ans, il a vu son prix en dollars quadrupler. Si vous aviez mis 500 dollars pour acheter de l’or à l’époque, vous le vendriez pour 2000 dollars aujourd’hui.
Depuis octobre dernier, l’or a gagné 12%, s’établissant fermement au-dessus du seuil de 2000 dollars, jamais atteint auparavant dans l’histoire. L’objectif des 2500 dollars n’est plus hors d’atteinte.
Et ce n’est pas seulement en dollars que l’or a battu des records en 2023: c’est dans pratiquement toutes les monnaies du monde, d’après le site spécialisé Kitco.com. Si vous aviez acheté pour 500 francs suisses d’or il y a 20 ans, vous le vendriez pour 1800 francs aujourd’hui.
Un actif géopolitique
L’or est désormais pris au sérieux par les grandes firmes d’investissement. «Son cours devrait s'apprécier ces prochains temps», nous indique Steven Bell, chef économiste pour la zone Europe, Moyen-Orient et Afrique chez Columbia Threadneedle Investments. L’une des raisons de cette demande est d’ordre géopolitique.
«Le gel des avoirs de ressortissants russes a contribué à l'appétit du reste du monde pour le métal jaune en tant que valeur refuge, constate Steven Bell. 2000 personnes ont vu leurs actifs immobilisés à la suite de la guerre en Ukraine, et 20'000 se disent qu'ils seront peut-être les suivants ; cela fait déjà un certain nombre d'acheteurs d'or».
Cette tendance, cumulée aux achats massifs d'or par les banques centrales des pays émergents, promet une hausse «significative» du métal précieux. «L'or est un actif que l'on ne peut pas tracer sur Euroclear, ni geler.»
Gros acheteurs d’Asie
Peu d’investisseurs des pays développés achètent de l’or. L’essentiel des acteurs se trouve donc dans les pays émergents. Là-bas, en particulier en Chine et en Inde, ce sont à la fois les banques centrales, les simples particuliers, les bijoutiers et les investisseurs aisés qui achètent l’or à chaque fois que son prix baisse.
Ces pays y trouvent une alternative aux réserves en dollars, un refuge contre la dévaluation de leurs monnaies et contre l’inflation, mais aussi contre les crises financières et toutes formes d’instabilité. Les pays émergents seront les plus gros acheteurs d’or ces 50 prochaines années, anticipent les experts, car ils reconnaissent le mieux ses qualités sur le plan de la préservation de la richesse.
Sous forme physique
Pour Steven Bell, détenir l'or sous forme physique (lingots ou pièces) garantit une meilleure sécurité que les ETF sur l'or, même si ces certificats basés sur l’or bénéficieront aussi de la hausse du prix.
Détenu sous forme physique, l'or est l'actif le plus inaliénable qui soit, c'est-à-dire qu'il offre le plus sûr niveau de propriété, selon l’économiste de Threadneedle. «Sur ce plan, il serait même supérieur aux cryptomonnaies.»
«L’or doit être uniquement détenu sous forme physique et conservé dans un coffre qui est protégé d’une éventuelle crise bancaire [c’est-à-dire qu’il n’entrerait pas dans la masse en faillite]», préconise aussi Jean-Pierre Diserens, gérant de fortune et secrétaire général de la Convention pour les conseillers financiers indépendants (CIFA). En période de guerres et d’instabilité des monnaies, l’or physique s’avère moins volatil que l’or papier, à savoir les dérivés (futures) sur l’or ou les ETF, qui eux continueront à fluctuer davantage.