Pendant longtemps, l'accord de libre-échange entre Berne et Pékin était vu comme un privilège. Les concurrents européens ne pouvaient que contempler - d'un oeil envieux - l'accès avantageux de la Suisse à l'énorme marché chinois. Mais à présent, place à la désillusion.
Les représentants de la gauche ne sont pas les seuls à admettre que l'économie et la politique ne sont pas si faciles à séparer - surtout lorsqu'il s'agit d'une puissance mondiale émergente, qui a pris une direction différente de celle que l'Occident espérait. La conception concrète du libre-échange fait également l'objet de critiques. La stratégie chinoise présentée par le conseiller fédéral PLR Ignazio Cassis en début d'année ne va pas assez loin pour beaucoup.
Le Conseil fédéral doit mener le dialogue
Le Parlement a déjà décidé que les entreprises suisses devaient être mieux protégées contre les rachats étrangers. Avec le début de la session d'automne lundi, toute une série de propositions qui affectent directement les relations de la Suisse avec la Chine seront débattues. À noter que la plupart de ces dernières ont été rédigées par des politicien du pôle conservateur. Plus encore: elle amasseront certainement la majorité.
De l'autre côté, les Vert'libéraux font pression pour que le Conseil fédéral ajoute - dans l'accord de libre-échange - une clause de respect des normes internationales dans le domaine des droits de l'homme et du travail. Une exigence quelque peu optimiste, que Pékin risque de balayer d'un revers de main. Néanmoins, une majorité de la commission des affaires étrangères soutient la proposition. Reste que c'est avant tout au Conseil fédéral de mener ce dialogue avec la Chine, comme le souligne le conseiller national PLR Roland Fischer: «Le fait que les droits de l'homme soient violés [en Chine, ndlr] est un fait dont personne ne peut douter», affirme le Lucernois.
«Mal à l'aise avec la domination chinoise»
Une majorité d'experts en politique étrangère du Conseil des États a voté en faveur de trois motions relativement critiques à l'égard de la Chine, qui sont désormais inscrites à l'ordre du jour du Conseil. Matthias Michel (ZG), membre libéral-radical du Conseil des Etats, plaide pour une meilleure coordination entre les acteurs économiques et politiques actifs en Chine. C'est un donnant-donnant avec la Chine, note-t-il. «La Suisse en profite, mais elle n'a pas non plus à se vendre.»
Les propositions de Thomas Minder, membre du groupe parlementaire de l'UDC et membre sans parti du Conseil des Etats de Schaffhouse, sont en revanche plus tranchantes. Dans la lutte contre les «produits pirates chinois», il demande une meilleure protection des marques suisses et insiste sur l'égalité des parts de participations dans les entreprises: alors que les investisseurs chinois peuvent acheter des entreprises en Suisse, les investissements dans l'Empire du Milieu sont sévèrement limités. De manière générale, l'élu note «un malaise face à la domination chinoise» au sein de la population et du parlement.
Les droits de l'homme sur la sellette
Le conseiller national PS Fabian Molina salue la «lente remise en question de la bourgeoisie», mais met en garde contre le blocage de l'accord de libre-échange.
Mais il est assez clair pour tous que si le Parlement venait à renforcer notablement les points de l'accord concernant les droits de l'homme, les Chinois ne l'accepteraient certainement pas. Dans le même temps, le parti socialiste a déclaré s'opposer à tout renouvellement du traité qui exclurait ces derniers.