Le quotidien et les conditions de vie des enfants dont les parents se séparent ou divorcent sont encore méconnus. Et ce, malgré le fait que près d'un quart de million d'enfants en Suisse ne vivent pas avec leurs deux parents biologiques - une situation familiale d'importance croissante.
Cette lacune dans la recherche a été récemment comblée grâce à une étude représentative menée sur la population suisse. Selon un rapport de la Commission fédérale pour les questions familiales (COFF), le standard éculé «l'enfant vit avec sa mère et voit son père un week-end sur deux» n'est plus aussi répandu - d'autres modèles s'étant démocratisés.
Une répartition parfaitement égale est rare
Cette diversification des modèles de garde reste toutefois limitée. Par exemple, rares sont encore les parents qui se répartissent la garde de manière absolument équilibrée - seuls 7% des enfants passent la moitié de leur temps chez leur mère et l’autre chez leur père.
Dans 20% des cas de divorce, la garde est répartie de manière à ce que chacun des deux parents héberge son enfant au moins un tiers du temps. Seuls 6% des enfants interrogés affirment voir leur autre parent (c'est-à-dire celui chez qui ils n'habitent pas) moins d'une fois tous les trois mois, voire jamais.
La relation entre les parents, facteur déterminant pour le bien-être de l'enfant
Les conclusions de l'étude démontrent que qui s'occupe de quoi et quand n'est pas déterminant pour le bien-être des enfants. L'âge et le genre des enfants, tout comme la situation financière des parents, ne sont pas non plus des facteurs déterminants. Seule la qualité de la relation entre les parents influence de manière statistiquement significative le bien-être des petits.
Du point de vue du bien-être de l’enfant, il est donc extrêmement important que les parents entretiennent un échange constructif. «Il faut éviter autant que possible des divorces hautement conflictuels», affirme Jonas Schweighauser, vice-président de la Commission fédérale pour les questions familiales (COFF).
La Commission recommande ainsi une adaptation de la loi afin qu’une consultation ou une médiation puisse être ordonnée. Des essais pilotes sont en cours à ce sujet dans certains cantons. Le canton de Bâle-Ville envoie depuis 2016 les parents en désaccord en consultation, et 75% d’entre eux trouvent finalement des solutions à l’amiable.
«Le droit de la famille n’est pas adapté à notre époque»
La COFF identifie d’autres champs d’action. Par exemple, plus d’un tiers des parents sondés affirment être dérangés par le fait qu’ils ne peuvent déclarer qu'un seul domicile pour leur enfant. Conséquences: des désavantages au niveau des déductions fiscales, des frais de garde ou des réductions de primes.
Pour l'avocat Jonas Schweighauser, «notre droit de la famille n'est pas adapté à notre époque», car il est toujours orienté vers le statut, alors qu'aujourd'hui tout est beaucoup plus fluide: les parents séparés ne se laissent plus enfermer dans des schémas «traditionnels». Par exemple, «les pères se heurtent à l’incompréhension lorsqu’ils n’ont pas la garde de leur enfant, alors qu’ils s’en occupent tout autant», poursuit-il. La commission recommande de supprimer le terme «garde» de la loi et de le remplacer par une dénomination plus moderne, à savoir: «responsabilité commune de la prise en charge».
Mieux répondre aux changements sociétaux
Le fait qu'un article aussi récent du Code civil, car formulé en 2014, doive déjà être révisé n'est pas considéré comme quelque chose de problématique par le vice-président de la COFF. En effet, les adaptations du droit civil sont de plus en plus fréquentes, explique Jonas Schweighauser.
Il suffit de regarder l'évolution du droit civil au cours du siècle passé. Alors qu'entre 1907 et 1973, il n'y a presque eu aucune modification dans le code civil, entre 1974 et 1989 il y a eu quatre grandes révisions. Et entre 1989 et 2022, le code civil a été révisé à 20 reprises.