Les partenaires sociaux et les cantons se sont mis d'accord sur des mesures de politique intérieure en matière de protection des salaires. Le Conseil fédéral a pris connaissance mercredi de l'accord trouvé sous la direction du ministre de l'Economie, Guy Parmelin.
Dans une interview accordée à Blick, le président de l'Union syndicale suisse explique pourquoi les syndicats ne peuvent malgré tout pas encore dire un grand «oui» à cet accord.
Pierre-Yves Maillard, à la fin de l'année, vous avez fulminé contre l'accord avec l'UE et reproché au Conseil fédéral de sacrifier la protection des salaires. Vous maintenez votre position?
Absolument. Avec son paquet de mesures, le Conseil fédéral confirme ce que nous avons toujours dit: l'accord affaiblit la protection des salaires. C'est pourquoi il faut des corrections importantes, ou des mesures compensatoires. Il reconnaît enfin les problèmes que nous soulevons depuis des années et la nécessité d'agir qui en découle.
Les syndicats vous suivent désormais dans ce combat?
Pas complètement, mais le Conseil fédéral a fait un premier pas dans la bonne direction, ce qui ouvre certaines possibilités. Sans cela, notre non serait déjà définitif. Mais ce n'est que lorsque les mesures concrètes seront disponibles que nous pourrons décider si nous soutenons cet accord. Si la protection des salaires et le service public dans les transports publics et l'électricité ne sont pas garantis, nous refuserons ce deal.
Plus d'une douzaine de propositions sont sur la table. Qu'est-ce qui est le plus important pour vous?
Toutes les mesures sont importantes, mais je voudrais mettre l'accent sur trois domaines en particulier. Premièrement, les conventions collectives de travail doivent être protégées et renforcées. Toute l'architecture des contrôles du travail et des salaires repose sur celles-ci. Il est encore trop tôt pour dire si nous obtiendrons vraiment des améliorations tangibles dans ce domaine. Deuxièmement, il faut trouver une solution à la réglementation européenne sur les frais.
C'est la véritable pièce de résistance. Une réglementation dans la loi suisse, comme le prévoit le Conseil fédéral, vous semble-t-elle suffisante?
Une modification de la loi est le minimum absolu. Nous sommes tout à fait d'accord avec les employeurs pour dire qu'il faut une protection juridique. En outre, le Parlement pourrait utiliser sa marge de manœuvre et apporter des améliorations. Nous nous engagerons dans ce sens.
Quel est le troisième point qui vous préoccupe?
Il faut une meilleure protection contre le licenciement pour les travailleurs qui défendent les intérêts du personnel dans les entreprises, par exemple pour les représentants dans les commissions du personnel. La liberté syndicale doit être respectée!
Dans les milieux bourgeois, on entend dire que les syndicats finissent toujours par se contenter de quelques concessions.
En aucun cas. Nous sommes encore au début du processus et nous ne tirerons un bilan définitif qu'à la fin des débats parlementaires. Nous sommes prêts à dire non. Nous l'avons déjà prouvé en disant non à l'accord-cadre de 2021.
C'est justement de l'UDC, mais aussi du PLR, que devrait venir la résistance au Parlement contre le renforcement des revendications syndicales.
Même si nous nous retrouvons avec les employeurs, il y aura forcément des manœuvres politiques pour affaiblir nos revendications. Nous l'avons vu lors de la réforme de la prévoyance professionnelle, où les partis bourgeois ont balayé le compromis des partenaires sociaux. Cela pourrait se reproduire aujourd'hui. L'histoire est loin d'être terminée. C'est pourquoi nous ne prendrons notre position définitive sur l'ensemble du paquet qu'à la toute fin.