Blanchiment d'argent
Cette banque genevoise sous enquête pour de multiples «faiblesses»

La banque genevoise Reyl Intesa Sanpaolo fait l'objet d'une enquête de la Finma pour des faiblesses dans la lutte contre le blanchiment d'argent. L'établissement, qui coopère avec les autorités, a déposé une plainte pour violation du secret bancaire.
Publié: 09.04.2025 à 14:55 heures
La banque genevoise Reyl Intesa Sanpaolo fait l'objet d'une enquête de la Finma. (image d'illustration)
Photo: Shutterstock
sda-logo.jpeg
ATS Agence télégraphique suisse

La banque genevoise Reyl Intesa Sanpaolo est visée par une enquête de l'autorité de surveillance des marchés financiers (Finma) pour de multiples «faiblesses» en matière de lutte contre le blanchiment d'argent et de contrôle de clients dits à risque.

La direction a confirmé coopérer avec les autorités de surveillance et dit s'efforcer d'améliorer ses processus et contrôles internes. Les articles publiés notamment par les journaux du groupe Tamedia «contiennent des informations confidentielles», a indiqué mercredi un porte-parole à l'agence AWP.

Se considérant lésée par la violation du secret bancaire, l'établissement a ainsi déposé «une plainte contre inconnu auprès des autorités suisses afin de protéger la Banque et ses clients».

Ruth Metzler citée

Des centaines de millions liés à des autocrates d'Asie centrale ou à des personnalités politiquement exposées (PEP) en Russie auraient transité par des comptes gérés par Banque Reyl, selon un document consulté par un consortium de médias OCCRP, dont le groupe Tamedia, le quotidien français Le Monde et l'homologue italien IrpiMedia.

L'ex-conseillère fédérale Ruth Metzler a été directement citée. Elle a siégé huit ans au conseil d'administration de la banque et était notamment en charge d'écarter les clients problématiques.

Ruth Metzler faisait également partie d'un comité responsable de la bonne gouvernance de la maison genevoise, après son rachat par l'italien Intesa Sanpaolo en 2021, qui assurait renforcer sa vigilance en matière de clients potentiellement à risques. L'ancienne ministre de la Justice ne s'est pas exprimée auprès des médias. Elle ne travaille plus pour la banque depuis l'été dernier. Elle préside désormais Swiss Olympic.

Mesures prises

«A la suite du changement d'actionnariat, la Banque a encore renforcé son cadre de conformité et de lutte contre le blanchiment d'argent. Les relations avec les catégories de clients à haut risque ont été soigneusement examinées et, lorsque cela a été jugé approprié, clôturées», précise l'établissement.

En juin dernier, l'établissement avait reçu le feu vert de la Finma pour sa nouvelle structure de direction. Au 1er juillet, le patron et associé François Reyl est devenu administrateur à la place de Ruth Metzler et l'associé Pasha Bakhtiar a repris les rênes de l'établissement en qualité de directeur général.

Failles de contrôle

Contactée par AWP, la Finma dit ne pas être en mesure de donner de précisions car elle est tenue au secret de fonction. Cependant, depuis quelques années, le gendarme des marchés financiers a multiplié les annonces envers Reyl.

Ainsi, la banque aurait omis de contrôler, durant cinq ans, les comptes de quelque 1400 clients, et aurait laissé s'accumuler 5000 alertes de transactions à risque, qui n'avaient pas été traitées depuis deux mois ou plus, rapportent les consortiums de journalistes.

Plusieurs ombres au tableau

Parmi les précédentes ombres phares au tableau de Reyl: l'affaire Cahuzac. En avril 2023, la banque a reconnu avoir facilité la fraude fiscale de clients français, dans un dossier lié à l'affaire de l'ancien ministre français du Budget Jérôme Cahuzac. A l'époque directeur général, François Reyl a été condamné à un an d'emprisonnement avec sursis et 375'000 euros d'amende.

En 2022, au début du conflit entre la Russie et l'Ukraine, la fille et la compagne d'un proche du gouvernement russe, Alexander Ponomarenko, ont pu ouvrir des comptes auprès de Banque Reyl, sur lesquels ont transité des dizaines de millions d'euros.

Un gendre de l'ancien dictateur de l'Ouzbékistan a par ailleurs déposé plus de 80 millions de francs chez Banque Reyl et une fille de l'ex-président du Kazakhstan aurait fait de même avec environ 150 millions, selon des informations du quotidien Le Temps. Banque Reyl Intesa Sanpaolo affichait plus de 15 milliards de francs sous gestion au premier semestre 2024.

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la