Relation avec l'Europe
Parmelin en mauvaise posture sur la question de la protection des salaires

Avec son offensive européenne, le Conseil fédéral a pris tout le monde de court. Quel rôle a joué la conseillère fédérale socialiste Élisabeth Baume-Schneider, et pourquoi le conseiller fédéral UDC Guy Parmelin est désormais confronté à une tâche difficile?
Publié: 03.04.2023 à 06:03 heures
|
Dernière mise à jour: 03.04.2023 à 07:54 heures
1/4
Le Conseil fédéral veut débloquer la situation: les relations avec l'UE doivent aller de l'avant. Ici, le ministre des Affaires étrangères Ignazio Cassis, à droite, avec le commissaire européen Maros Sefcovic.
Photo: keystone-sda.ch
Blick_Portrait_1253.JPG
Camilla Alabor

Il est assez rare que le Conseil fédéral surprenne l'ensemble de la Berne fédérale. Cela a pourtant été le cas sur la question européenne dont un dossier et ses contenus confidentiels se retrouvent dans les médias. Mais cette fois-ci, même les présidents de parti n'étaient pas informés au préalable. La décision de mercredi d'aller de l'avant dans le dossier européen a donc fait l'effet d'un coup de tonnerre.

Concrètement, le gouvernement a décidé de définir d'ici à fin juin les «valeurs de référence» d'un mandat de négociation. En outre, le Département de l'économie doit faire des propositions sur la manière de garantir la protection des salaires en Suisse.

Personne ne s'attendait à cette décision, notamment parce que les élections auront lieu dans six mois et que tous les partis craignent de faire un cadeau électoral à l'UDC en lançant un nouveau débat sur la souveraineté. Pourquoi le Conseil fédéral a-t-il ainsi agi maintenant?

Bonne entente

Dans son communiqué, le Conseil fédéral parle à deux reprises d'une «dynamique positive» qui existe actuellement. En effet, les entretiens exploratoires entre Berne et Bruxelles ont, selon les dires, favorisé la compréhension mutuelle. La visite du commissaire européen Maros Sefcovic à Fribourg il y a trois semaines a également donné un nouvel élan aux relations avec l'Union européenne (UE). Contrairement à la première rencontre, marquée par des malentendus, la deuxième série d'entretiens entre le commissaire européen et le ministre des Affaires étrangères Ignazio Cassis s'est apparemment déroulée dans une atmosphère amicale.

La prise de position des cantons, acteur clé du dossier européen, a pareillement aidé le Conseil fédéral. La communication selon laquelle les 26 cantons soutiennent de nouvelles négociations avec l'UE et acceptent la Cour de justice européenne (CJE) en tant qu'instance a été une passe en douceur pour le ministre des Affaires étrangères.

Et puis il y a encore Élisabeth Baume-Schneider. La conseillère fédérale socialiste est plus ouverte aux négociations avec l'UE que sa prédécesseure Simonetta Sommaruga, affirment les initiés politiques. Grâce à ses origines jurassiennes, elle connaît l'importance des bonnes relations avec les pays voisins. Elle s'entend également bien avec Ignazio Cassis, qui était souvent isolé dans la constellation précédente.

La pression augmente

Mais il est clair que le Conseil fédéral ne pouvait plus ignorer les attentes de l'UE. À une époque où la Suisse est sous pression au niveau international (exportations d'armes, neutralité, crise bancaire), on est manifestement arrivé à la conclusion qu'un signe de concession à l'UE était opportun. En politique intérieure aussi, l'économie et la recherche sont de plus en plus mécontentes de l'immobilisme persistant.

Guy Parmelin le ressent directement. En tant que ministre de l'Économie et de la formation, le conseiller fédéral UDC est responsable des dossiers dans lesquels le blocage se fait le plus sentir. Conséquence: des appels quasi hebdomadaires.

Comme si cela ne suffisait pas, une nouvelle tâche, presque insoluble, atterrit sur son bureau. Le Département de l'économie doit élaborer, en collaboration avec les partenaires sociaux et les cantons, des propositions visant à garantir la protection des salaires. La secrétaire d'État du Seco Helene Budliger Artieda doit trouver une voie acceptable aussi bien pour les syndicats que pour les employeurs. Tel est le mandat du Conseil fédéral.

Un combat perdu d'avance

Pour Guy Parmelin, la situation devient donc encore un peu plus inconfortable. «Il ne peut que perdre», résume un observateur politique. L'UDC n'appréciera guère que son propre conseiller fédéral soit l'accoucheur du dossier européen. D'un autre côté, l'économie, la science, les cantons et les proeuropéens au Parlement et au Conseil fédéral font pression pour une solution.

Mais est-il possible de trancher le nœud gordien? Une chose est sûre: la protection des salaires constitue actuellement la plus grande pierre d'achoppement de la politique européenne. En ce qui concerne les aides d'État, un accord semble possible; pour la directive sur les citoyens de l'Union, des clauses de sauvegarde pourraient permettre un compromis. Même la CJCE a perdu une partie de son caractère effrayant, comme le montre la déclaration des cantons.

Le Conseil fédéral veut apparemment croire qu'une solution est possible en matière de protection des salaires. Les syndicats font pour le moment preuve d'une retenue frappante. Certes, ils maintiennent leur déclaration selon laquelle un démantèlement de la protection salariale n'est pas envisageable. En outre, l'Union syndicale suisse ne s'exprime pas davantage sur le sujet pour le moment. Cela représente déjà un succès pour le ministre des Affaires étrangères, Ignazio Cassis.

Un nouvel organe

En créant ce qu'il appelle un Sounding Board, il a réussi à intégrer les principaux acteurs – syndicats, employeurs, cantons, économie – dans le débat sur la politique européenne. Les participants sont informés de l'état des discussions exploratoires – et peuvent intervenir directement. Le fait que presque rien n'ait filtré de ces discussions via les médias est également lié à une nouvelle règle: Les participants à la table ronde exclusive ne peuvent pas se faire représenter. Cela a permis d'instaurer la confiance, explique l'un des participants.

Les prochains mois montreront si cela suffira à trouver une solution. Sachant que le Conseil fédéral a réussi le tour de force, par sa communication, de donner l'impression d'avancer tout en laissant la porte la plus ouverte possible.

Ainsi, il veut fixer les valeurs de référence d'un mandat d'ici fin juin. En d'autres termes, la date à laquelle le mandat de négociation sera effectivement fixé n'est pas connue. Il est à peu près certain que le Conseil fédéral attendra jusqu'après les élections d'octobre 2023. Car le Conseil fédéral n'a pas non plus intérêt à faire un cadeau électoral à l'UDC – du moins cinq de ses sept membres.

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la