Cela s'était joué à un rien! Il y a un peu plus d’un an, seuls 50,6% des votants ont approuvé le relèvement de l’âge de la retraite des femmes de 64 à 65 ans, en plusieurs paliers progressifs selon l’âge. Les citoyennes ont même voté contre à 62%. Cette mesure entrera en vigueur en 2024. Pour autant, toutes les femmes qui atteindront bientôt l’âge de la retraite ne devront pas travailler un an de plus. Pour que la réforme ait une chance d’aboutir, le Conseil fédéral avait prévu des délais transitoires. Ceux-ci s’appliquent à toutes les femmes nées entre 1961 et 1969. Au total, la Confédération a réservé trois milliards de francs pour des mesures de compensation. Qu’est-ce que cela signifie concrètement pour les femmes concernées?
Les Suissesses de la génération transitoire, c’est-à-dire celles nées entre 1961 et 1969, peuvent choisir de travailler jusqu’à 65 ans pour recevoir une rente AVS plus élevée, ou d’arrêter de travailler à 64 ans et accepter une réduction de leur rente. Quel est le meilleur choix? Réponse: cela dépend des cas. On vous les détaille.
Option A: Travailler plus longtemps
Les femmes qui travaillent au-delà de l’âge de la retraite auquel elles sont soumises reçoivent un supplément de rente AVS à vie. Le montant de ce supplément dépend du revenu moyen et de l’année de naissance. Plus le salaire est élevé, plus le supplément est bas. Et plus l’âge est élevé, plus le supplément est important.
Pour un revenu annuel moyen jusqu’à 58’801 francs, le supplément de rente est de 160 francs par mois, pour les salaires jusqu’à 73’500 francs, il s'élève à 100 francs. Pour les revenus qui dépassent ce seuil, le supplément est de 50 francs. Mais seules les femmes nées en 1964 et 1965 reçoivent ce supplément dans son entièreté. Entre 1966 et 1970, le pourcentage du montant de la compensation décroît, avant d’atteindre zéro.
Option B: Accepter une réduction de la rente
Les personnes qui décident de ne pas travailler au-delà de l’âge de la retraite et de partir à 64 ans ou avant – selon les règles actuellement en vigueur – doivent accepter de vivre avec une rente AVS réduite. La réduction est moins importante pour les bas revenus que pour les revenus plus élevés, comme le montre le tableau ci-dessous.
Comment décider?
Beaucoup de variables entrent en compte pour chaque situation individuelle. Pour trouver la meilleure solution, il faut donc faire les calculs. Et bien réfléchir à ce qu’une année de travail supplémentaire représente.
Dans de nombreux cas, les chiffres sont en faveur d’une retraite anticipée. Explication: le Conseil fédéral dépense des milliards pour compenser le report de l’âge de la retraite. Pour celles qui veulent toucher l’AVS au plus tôt, les réductions sont nettement moins importantes que ce qui serait justifié mathématiquement (d’à peine 4% par an). Ces réductions sont bien moins importantes que celles imposées aux hommes qui veulent prendre une retraite anticipée à 63 ou 64 ans.
Un exemple
Jacqueline (personnage fictif) est née en novembre 1961 et donc âgée de 62 ans. Elle fait partie de la génération transitoire. Si elle décidait de travailler trois mois supplémentaire, elle prendrait sa retraite le 1er mars 2026. Mais si elle percevait l’AVS dès le 1er mars 2024, sa rente ne serait réduite «que» de 2%, à condition que son salaire annuel moyen (calculé à partir de l’âge de 21 ans) ne dépasse pas les 58’800 francs. Même si Jacqueline gagnait mieux sa vie, sa rente ne baisserait «que» de 4,5% (pour un salaire moyen inférieur ou égal à 73’500 francs) ou de 6,5% (pour un salaire moyen supérieur à 73’500 francs). Un homme qui percevrait l’AVS à l’âge de 63 ans au lieu de 65 ans verrait, pour sa part, sa rente réduite de 13,6% à vie.
En d’autres termes: Jacqueline toucherait une rente AVS de 2058 francs si elle partait à la retraite à 65 ans avec un salaire annuel moyen de 58’800 francs. A ce montant s’ajouterait un bonus de 40 francs (25% de 160 francs) du fait qu’elle travaille jusqu’au nouvel âge de la retraite pour les femmes. Si elle perçoit l’AVS dès 62 ans, sa rente serait réduite de 2% et s’élèverait à 2017 francs, soit à peine moins.
Avec encore 23 ans à vivre – espérance de vie moyenne des femmes de 65 ans – Jacqueline toucherait presque 20’000 francs de plus avec un départ à la retraite anticipée, a calculé le spécialiste de la prévoyance Andreas Zeller pour la «NZZ». La perte de salaire n’a pas été prise en compte.
Conclusion: La révision de l’AVS récompense certes les femmes par un supplément de rente si elles travaillent au-delà 64 ans. Mais comme les réductions de rente en cas de retraite anticipée sont faibles, cela ne représente pas un avantage significatif de travailler une année supplémentaire. Il en va autrement pour les hommes: en général, partir en retraite anticipée n’est pas profitable. Exception: lorsqu’un individu n’a qu’une courte espérance de vie en raison de graves problèmes de santé.
Arrêter de travailler progressivement
Et si on craint de ne pas recevoir suffisamment de rente avec un départ à la retraite à 64 ans? Il y a une possibilité: la retraite partielle. De nombreuses caisses de pension connaissent ce modèle, jusqu’à présent facultatif. Désormais, elles seront obligées de proposer cette option, de par la loi. A partir de 2024, les hommes comme les femmes auront également l’option de percevoir partiellement l’AVS. Par exemple, en réduisant son temps de travail à 63 ans, en percevant une partie de la rente AVS et celle de la caisse de pension, puis en prenant sa retraite à 66 ans.
Mais une retraite partielle n’est envisageable que si l’employeur accepte. Parlez-en avec lui suffisamment tôt. Essayez de le convaincre qu’il pourra ainsi faire appel à votre savoir-faire plus longtemps que si vous preniez une retraite anticipée.
Demander de l’aide
Calculer les rentes partielles de l’AVS et de la caisse de pension est compliqué. Demandez à l’AVS et à votre caisse de pension de vous montrer exactement quelles seraient les conséquences financières d’une retraite partielle progressive. Faites calculer plusieurs variantes avec différents taux d’occupation et/ou différentes dates de début de réduction du temps de travail. Ne prenez votre décision que lorsque vous êtes sûr d’avoir compris les conséquences.