Mercredi matin, 6h56 à la gare de Buchs (SG). Une douzaine d'agents du Corps des gardes-frontières passent à l'action. Voiture par voiture, compartiment par compartiment, les forces d'intervention passent au peigne fin le train de nuit en provenance de Vienne. Ils découvrent 38 Afghans, tous des hommes, tous entrés illégalement. On les invite à quitter le train.
Environ la moitié d'entre eux sont probablement encore mineurs. Cet instantané à la gare montre de manière impressionnante à quel point la situation s'est aggravée. Depuis début juillet, 2500 hommes et adolescents afghans entrés illégalement en Suisse ont été arrêtés à Buchs, dont 1400 n'ont pas encore atteint la majorité. Parmi eux, 80% avaient déjà déposé une demande d'asile en Autriche, mais ont quitté le pays avant que la décision ne soit prise.
Le Corps des gardes-frontières et la police cantonale de Saint-Gall sont donc confrontés à une véritable vague migratoire. «Nous atteignons nos limites en terme de ressources. A cela s'ajoute le fait qu'il s'agit d'un travail de Sisyphe», avoue le conseiller d'Etat en charge de la justice Fredy Fässler.
Ils disparaissent du centre d'hébergement d'urgence
Alors que les autorités sont tenues de relever l'identité de tous les jeunes hommes et d'engager des procédures de rapatriement conformément à l'accord de Dublin, ceux-ci disparaissent à nouveau en très peu de temps. «Parfois, ils mangent encore quelque chose ou prennent une douche dans le centre d'hébergement d'urgence de Wil. Ensuite, ils repartent. Il est rare que l'un d'entre eux passe la nuit», explique Fredy Fässler.
Il faut savoir qu'une entrée illégale en Suisse ne constitue pas un motif de détention. Les Afghans profitent donc de la liberté qui leur est accordée pour poursuivre immédiatement leur voyage. Après avoir passé des mois dans des camps de réfugiés en Grèce, la plupart d'entre eux caressent le rêve de commencer une nouvelle vie en France ou en Grande-Bretagne. En revanche, presque personne ne dépose de demande d'asile en Suisse.
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250 migrants rien que la semaine dernière
Les personnes concernées font valoir qu'elles ont de la famille et des amis dans ces deux pays de destination très prisés. Mais l'énorme augmentation du nombre de migrants – 250 rien que la semaine dernière – est sans aucun doute due à la situation politique en Afghanistan. Après la victoire des talibans, les jeunes hommes ne voient plus de perspectives pour eux dans leur pays d'origine.
Alors que les Afghans poursuivent leur route, les autorités saint-galloises se retrouvent face à une montagne de procédures bureaucratiques. Pour accueillir tous les migrants, les fonctionnaires font des heures supplémentaires et doivent faire appel à des interprètes et à des personnes de confiance. Ils ont l'ambition de garantir l'Etat de droit malgré toutes les difficultés.
Saint-Gall veut maîtriser la vague sans l'armée
En décembre, un centre d'accueil spécialement aménagé sera mis en service à Buchs. Malgré l'afflux, il n'est pas question de faire appel à l'armée. «Nous ne mettrons pas de soldats armés à la frontière», annonce Fredy Fässler. Il s'agira de maîtriser l'afflux avec des policiers, si nécessaire venant d'autres cantons.