Dans un passé récent, l’Église catholique romaine a régulièrement fait la une des journaux en raison des abus commis par ses représentants sur des enfants et des adolescents. Le traitement de ces cas par une Église plus encline à les ranger sous le tapis qu’à régler le problème a généré de nombreux scandales. Les victimes s'indignent. Et les bancs des églises se vident. Inexorablement. Voilà pour le cadre.
Face au problème évoqué ci-dessus, l’évêché de Coire a élaboré le premier code de conduite de son histoire. Blick se l’est procuré en exclusivité. La charte, qui devrait être signée en avril par l’évêque Joseph Bonnemain, 73 ans, est un document qui s’adresse à tous ceux qui travaillent dans l’Église. Son contenu a une certaine allure. Et il devrait faire du bruit, du moins au sein de l’Église. Parce qu'il précise ce qui devrait être dicté par le bon sens. Et parce que derrière ce document se cache une potentielle révolution.
«Pas de sauna, pas de massage»
Le code doit réduire autant que possible les risques d’abus. Il fixe ainsi des règles précises en matière de proximité et de distance. On y lit par exemple qu’il n’est pas acceptable que des adultes et des enfants dorment dans la même tente lors d’un camp. Ou encore: «Les rencontres intimes (p. ex. saunas, wellness, massages) dans des conditions de dépendance ne sont pas autorisées.» Les invitations de mineurs au domicile des collaborateurs de l'Église sont également à proscrire.
Le diocèse de Coire entend ainsi adopter une ligne de tolérance zéro vis-à-vis de tout acte susceptible de mettre en danger l’intégrité sexuelle d’une personne. Et il place les aumôniers face à leurs responsabilités. Concrètement, la charte précise: «Dans tous les cas, je m’abstiens de poser des questions offensives sur la vie intime et l’état de la relation. Cela vaut également pour les entretiens que je mène en tant que supérieur(e) hiérarchique.»
Raphael Rauch, expert religieux catholique romain et directeur de la rédaction du site kath.ch, voit dans ce code de conduite une petite révolution. «Il a le potentiel d’un changement d’époque au sein de l’Église catholique romaine, souligne notre interlocuteur. Avec ce code, l’évêque de Coire interdit désormais explicitement de poser des questions sur la sexualité de ses collaborateurs.»
«L’évêque se penche ainsi bien au-delà de la fenêtre»
«Si l’évêque prend ce code au sérieux, il n’y a donc plus aucune raison de ne pas engager des aumôniers qui sont lesbiennes, gays, bisexuels ou transgenres, ajoute Raphael Rauch. Ou ceux qui sont divorcés ou qui veulent se remarier.»
Contacté par Blick, l’évêché de Coire n’a pas encore souhaité s’exprimer sur son futur code de conduite. L’évêque Bonnemain avait toutefois déclaré l’été dernier que l’Église catholique devait «purifier le passé pour pouvoir maîtriser l’avenir».
«L’évêque se penche ainsi largement à la fenêtre, et il doit maintenant livrer la marchandise», décrypte Raphael Rauch dans un langage imagé. Une tâche colossale pour l’Église, car «avec le code de conduite, elle place la barre encore plus haut, et c’est à cette aune qu’elle sera jugée à l’avenir».
(Adaptation par Michel Jeanneret)