La procédure de conciliation qui avait été initiée par le département de l'économie et de l'emploi (DEE) auprès de la Chambre des relations collectives de travail (CRCT) a échoué, ont par ailleurs indiqué les deux syndicats devant les médias. L'heure est dorénavant à la mobilisation.
Unia et le SIT réclament maintenant de l'Etat qu'il fasse respecter la loi. Uber dit rester ouvert au dialogue pour «trouver des moyens d'avancer ensemble à Genève». Le DEE de la conseillère d'Etat Fabienne Fischer, de son côté, assure que «les contrôles sont en cours» et a demandé à toutes les parties «de la patience».
«L'autorité étatique doit reprendre le contrôle», a souligné Umberto Bandiera. Le secrétaire syndical du SIT a rappelé l'existence d'un jugement fédéral «qu'il faut maintenant faire appliquer». Car aujourd'hui, malgré l'arrêt du TF, Uber n'a pas modifié son modèle. Les risques économiques sont toujours supportés par les chauffeurs.
Le DEE avait passé le mois dernier un accord avec Uber afin que l'entreprise puisse reprendre ses activités à Genève conformément à l'arrêt du TF. Dans la foulée de cet accord, la multinationale a annoncé le transfert des chauffeurs qui obtenaient des courses grâce à son application à une société tierce partenaire (MITC Mobility SA).
Logique salariée bafouée
Seuls 250 chauffeurs ont accepté leur transfert, alors que 700 autres l'ont refusé, a précisé M. Bandiera. MITC emploie et rémunère les chauffeurs qui utilisent l'application Uber. Elle les assure aussi aux assurances sociales. Mais selon les syndicats, les conditions de travail ne correspondent pas à du salariat.
Il n'existe ainsi aucun temps de travail garanti. Seul le temps des courses est payé par MITC. Le temps d'attente des chauffeurs n'est pas pris en compte. Les frais professionnels ne sont pas non plus pris en charge. L'entretien des véhicules et l'essence sont par exemple à la charge des chauffeurs.
«Nous sommes dans la pauvreté absolue», a témoigné un chauffeur au chômage, qui a refusé d'aller chez MITC. Selon lui, lors de la brève suspension des activités d'Uber, la société lui a versé 780 francs pour douze jours de travail. «On nous oblige au final à travailler un maximum pour un salaire minimum», a déploré un de ses collègues.
Responsabilité de tous
Uber est le bienvenu à Genève, à condition que les règles soient appliquées, a souligné M. Bandiera. De son côté, l'Etat doit obliger la multinationale californienne «à rentrer dans les clous», a ajouté Davide De Filippo, secrétaire général au SIT Genève. D'ici là, les activités d'Uber et de MITC «doivent être suspendues».
La porte-parole du DEE Esther Mamarbachi a précisé que le département allait «proposer une rencontre tripartite afin que les discussions se poursuivent dans un autre cadre que la CRCT». Elle a rappelé que l'échec de la conciliation ne remettait pas en cause l'accord signé entre le DEE et Uber.
A ce jour, selon le DEE, des centaines de chauffeurs Uber sont désormais salariés de MITC. Toutefois, «il va falloir du temps pour se déterminer sur les modèles proposés, dans le respect des procédures». Mme Mamarbachi a souligné qu'aucune validation n'avait eu lieu à ce stade.
Chauffeurs en majorité satisfaits
Dans un communiqué, le directeur d'Uber Suisse et porte-parole Jean-Pascal Aribot a indiqué que «la majorité des chauffeurs étaient satisfaits des efforts» qui ont été consentis par l'entreprise lors des réunions de la CRCT, «contrairement à ce que prétendent les syndicats et une minorité de chauffeurs».
Uber a par ailleurs précisé que plus de 1000 chauffeurs sont passés chez la société sous-traitante partenaire et sont «capables d'utiliser l'application et de générer des revenus avec celle-ci désormais en tant qu'employés de MITC Mobility SA, incluant un salaire minimum, des congés payés et des congés maladie».
Concernant les compensations rétroactives des chauffeurs, Uber a relevé que le travail est ardu. «Il s'agit d'un processus très complexe qui nécessite beaucoup d'analyses pour chaque cas individuel». Les syndicats, de leur côté, ont évoqué des arriérés de salaire et d'assurances sociales se chiffrant en millions de francs.
(ATS)