Le conseiller national UDC Thomas Aeschi a posté jeudi une capture d'écran d'une publication mettant en garde contre les vaccins à ARNm.
Le document parle de manipulation génétique, de protéines «non-absorbées» et de dommages effrayants à long terme. Les auteurs de cette étude: Greg Nigh, un guérisseur naturel, et Stephanie Seneff, une informaticienne.
«Où se trouvent les informations qu'Alain Berset et l'OFSP doivent donner à la population sur les risques des vaccins à ARNm?», a écrit Aeschi sur Twitter. Les réactions des utilisateurs de Twitter au post de l'étude complotiste ont rapidement suivi.
«Vase des théories du complot»
«Vraiment? On ne peut pas sombrer plus profondément dans la vase des théories du complot. Et ce message vient du président du groupe parlementaire du plus grand parti suisse. Difficile à croire», écrit un homme. «Pour résumer: Seneff est un informaticien dont les publications médicales sont à déchirer et qui a affirmé que d'ici 2025, 50% des nouveau-nés souffriraient d'autisme. Et Nigh est un naturopathe qui écrit des livres sur l'ail», a tweeté un autre.
«Mon non-aimé Monsieur Aeschi, vous êtes acerbe et peu versé dans la recherche scientifique. Faites vos devoirs avant votre prochain tweet afin d'avoir moins de souffrances et de morts sur votre conscience, si vous en avez une», peut-on lire dans un autre commentaire.
Les affirmations abruptes selon lesquelles les personnes vaccinées secréteraient des protéines et les «répandraient» sur d'autres personnes, les rendant ainsi infertiles, ont été démenties à de nombreuses reprises.
Le mythe commun des conspirationnistes concernant les modifications du matériel génétique après la vaccination est également faux. «L'ARNm administré avec la vaccination ne peut pas pénétrer dans le noyau cellulaire et s'intégrer au génome humain (ADN/gènes)», explique l'OFSP.
Youtubeur sollicité pour des campagnes de désinformation
Néanmoins, les fake news en rapport avec les vaccins contre le coronavirus sont en plein essor sur le Net. Comme le rapporte le «Tagesanzeiger», plusieurs structures tirent les ficelles de campagnes de désinformation.
D'une part, des commanditaires en Russie poursuivraient des objectifs géopolitiques et tenteraient de recruter des youtubeurs populaires via des agences à Londres, explique l'expert en cybercriminalité Danny Rogers de l'Université de New York. Ce faisant, les vaccins occidentaux seraient dénigrés dans le cadre d'une «campagne d'information».
En plus des influenceurs de France, le youtubeur allemand Mirko Drotschmann a été contacté par email. L'expéditeur lui a écrit à la mi-mai qu'une fuite de données liant de nombreux décès à la vaccination par Pfizer/Biontech existait. M. Drotschmann, 35 ans, était censé en parler sur sa chaîne contre rémunération, et mettre en garde contre la vaccination. Mais après une brève enquête, il lui est apparu très clairement qu'une telle fuite de données n'existait pas et que l'intention du client était en réalité de lancer une campagne de désinformation.
36 millions de dollars de chiffre d'affaires
Selon M. Rogers, certains tentent de faire de l'argent avec la désinformation. Les anti-vaccinationnistes, par exemple, vendent des compléments vitaminés ou se font engager comme orateurs pour des événements. Selon l'ONG Center for Countering Digital Hate (CCDH), le chiffre d'affaires annuel de cette industrie est de 36 millions de dollars.
Troisièmement, des acteurs des milieux de droite, tels que les partisans de Q aux États-Unis, diffusent des fake news. Ces théories erronées traversent de plus en plus l'Atlantique. Selon les calculs de la CCDH, plus de 30 millions d'utilisateurs de Facebook ont suivi des pages contenant de fausses informations sur la vaccination l'année dernière. Un chiffre hallucinant.
En Suisse, de faux contenus sont également partagés à vive allure sur les médias sociaux comme Facebook, Instagram, YouTube ou le réseau Telegram, particulièrement populaire parmi les sceptiques et les négationnistes. «Dans ce cas, il s'agit principalement de groupes agissant pour des raisons idéologiques ou politiques», a déclaré au «Tagesanzeiger» Edda Humprecht, spécialiste en communication de l'Université de Zurich.
Les gens mélangent différents sujets dans le processus, explique le codirecteur d'un projet de recherche sur la désinformation de la National Science Foundation. «Il s'agit de théories du complot, d'antisémitisme, de scepticisme vis-à-vis de la vaccination et d'une aversion générale pour les soi-disant élites.»