L'affaire avait fait les gros titres outre-Sarine: une automobiliste zurichoise a sans doute croqué dans le bretzel le plus cher du pays en 2012 après avoir écopé de 250 francs d'amende pour inattention. Ce n'est pas un cas isolé — comme pour l'utilisation du smartphone ou du GPS en conduisant, les dénonciations pour avoir bu ou mangé au volant sont fréquentes.
Que dit la loi? Dans le canton de Saint-Gall, par exemple, une directive prévoit une amende «dès 300 francs» pour «attention altérée par l'exécution de tâches» au volant. Ceci sans compter les frais et surtout «à partir de» — manger des deux mains au point de conduire de manière imprudente peut coûter 1500 francs et impliquer un retrait de permis.
Pourtant, manger au volant n'est pas explicitement interdit. Le Conseil fédéral lui-même a pris position en en 2019 en estimant que, contrairement au téléphone portable à l'oreille, il ne voulait pas interdire de fumer, manger ou boire au volant. Mais ce n'est pas un blanc-seing pour autant: le gouvernement se base sur le fait que la personne au volant doit «maîtriser le véhicule de manière suffisante». Il n'est donc pas interdit de manger, mais une dénonciation est toujours possible.
«Moins grave» sur une autoroute vide
À quel point est-il dangereux de s'alimenter au volant? L'Université de Zurich a mené une étude sur 150 conducteurs pendant une semaine pour le savoir. Les scientifiques ont déterminé que manger ou boire en conduisant est la 2e plus grande source de danger derrière l'utilisation du smartphone. Les conducteurs étaient beaucoup plus distraits que lorsqu'ils manipulaient la radio ou fumaient une cigarette.
Il s'agit donc d'une zone grise, comme le fait de conduire à une main par exemple. Le procédé est toléré à condition que la maîtrise et l'attention ne soient pas altérées et que la main libre ne fasse que ce qui doit être fait en conduisant (donc pas écrire des WhatsApp) et puisse prendre le volant à tout moment.
Cette marge d'appréciation peut conduire à des incompréhensions: dans certains cas, il est toléré de manger un croissant, dans d'autres cela peut coûter cher. L'évaluation ne porte pas sur la qualité de la viennoiserie mais bien sur la situation dans le trafic, le danger potentiel, le degré de distraction ou encore le déficit d'attention. Un croissant sur une autoroute vide est plus «toléré» que dans le trafic urbain aux heures de pointe. Les boissons chaudes sont aussi plus problématiques — se renverser du café brûlant sur la main peut avoir de lourdes conséquences.
Faire recours? Presque toujours vain
Certains comportements mènent à l'amende: par exemple faire des écarts ou détourner le regard pendant plusieurs secondes. Cela peut aussi être le cas si les parents au volant ne regardent plus la route en raison d'enfants qui se disputent à l'arrière. Le fait de fumer en conduisant est rarement puni mais peut l'être si l'on ne fait pas preuve de prudence en allumant sa cigarette. Ou si l'utilisation d'un téléphone dépasse le «simple fait» de l'avoir à l'oreille (100 francs): écrire des messages en étant particulièrement distrait peut se révéler très onéreux.
Si vous êtes pris par la patrouille, les chances de se défendre sont généralement faibles — et les recours rendront l'addition bien plus salée encore. Même au Tribunal fédéral (la plus haute instance du pays, pour rappel), pas la peine d'invoquer votre expérience au volant ou le fait que vous suiviez la circulation du coin de l'oeil. Lorsque la main libre est occupée alors que vous avez détourné le regard du trafic, cela peut vous coûter très cher.
Notre conseil? Ne pas manger ou boire au volant, tout simplement. Et si vous ne pouvez pas résister ou attendre une pause, gardez en tête que la situation de la circulation doit être limpide et votre geste aussi court que possible — et puisse être interrompu à tout moment. Gardez l'oeil sur le trafic en continu. Mais si vous voulez éviter l'amende, le plus simple est de s'arrêter, de profiter d'une petite pause gourmande en toute sécurité avant de reprendre la route.