Le voile se lève peu à peu
La famille de Montreux a-t-elle dérivé dans le survivalisme?

Les recherches de la presse française affinent le profil de la famille tombée d'un balcon du centre-ville de Montreux, jeudi. La piste du survivalisme semble tenir la corde, tant ce clan de cinq personnes vivait en vase clos.
Publié: 27.03.2022 à 11:56 heures
|
Dernière mise à jour: 28.03.2022 à 09:24 heures
1/6
La famille est tombée d'une hauteur de vingt-deux mètres.
Photo: AFP
8 - Adrien Schnarrenberger - Journaliste Blick.jpeg
Adrien SchnarrenbergerJournaliste Blick

Comment une famille a-t-elle pu sombrer dans la détresse au point de se jeter d'un balcon du centre-ville de Montreux à l'aube d'un jeudi d'apparence ordinaire? L'enquête de police continue, notamment via l'analyse des téléphones portables. Le survivant du drame, le fils de 15 ans qui a perdu sa soeur, ses parents et sa tante, est le meilleur espoir pour dénouer le mystère. Son état «très grave» s'est «stabilisé», selon la police cantonale vaudoise

Dans l'intervalle, la presse française a livré ce week-end de nombreux enseignements sur le déroulé des faits. La piste du suicide collectif ne fait «guère de doute», selon le «Journal du Dimanche», qui évoque une dérive sectaire ou survivaliste. Une thèse accréditée par les éléments recueillis par «Le Parisien»: l'appartement aurait eu les fenêtres calfeutrées, tandis que la famille était recluse dans deux pièces d'un logement qui en compte 5,5. Le reste aurait été jonché de boîtes de conserve et de médicaments, ce qui explique la valse de paquets dénoncée à la régie par des voisins que Blick a rencontrés.

Des comportements d'autant plus étranges que les trois occupants adultes de l'appartement étaient tout sauf des marginaux... du moins sur le papier. Le père de famille de 40 ans était un ingénieur brillant: il est sorti parmi les cinq «majors de promo» de la prestigieuse École polytechnique de Paris. Dans la capitale française, il a travaillé durant quatre ans à la direction informatique de plusieurs ministères, dont celui des Affaires étrangères, de 2009 à 2013, précise le «JDD». Des éléments qui coïncident avec ceux précisés sur le profil LinkedIn identifié par Blick du Français.

Un grand-père célèbre écrivain

C'est d'ailleurs en cette même année 2013 que le chemin de Marc F.* croise la Suisse. Il s'engage à Lausanne auprès d'une société spécialisée dans la vente de tickets en ligne, notamment dans le sport. Sur sa photo de profil sur le réseau social professionnel, il pose dans un stade, tandis que sa société d'alors est en charge de la grande loterie de billets en vue de l'Euro 2016 en France. Dans la foulée de l'événement, l'homme originaire de Marseille se met à son compte.

Les deux femmes dont il partageait le logement, à savoir son épouse et la soeur jumelle de celle-ci, n'ont pas non plus à rougir de leurs carrières respectives. Bardées de diplômes, elles se sont spécialisées pour l'une dans l'ophtalmologie, pour l'autre dans le secteur dentaire. Selon le «JDD», les jumelles sont les petites-filles d'un prestigieux écrivain algérien, décédé il y a 60 ans cette année et honoré le 15 mars «à la demande d'Emmanuel Macron». L'homme a été assassiné par l'Organisation de l'armée secrète (OAS), un mouvement d'extrême-droite opposé à l'indépendance de l'Algérie.

La belle-soeur de Marc F.* continuait de travailler ces derniers mois dans une clinique valaisanne, après avoir notamment travaillé aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Un ancien collègue contacté par Blick dépeint le portrait d'une ophtalmologue consciencieuse et très compétente. Cheffe de clinique durant son temps à Genève, elle tenait des conférences et est apparue notamment sur la RTS pour son expertise. La presse française précise qu'elle avait épousé un Français spécialiste des systèmes de sécurité informatique «lui aussi surdiplômé et basé à Lausanne», mais le couple s'était séparé il y a sept ans.

«Plus de nouvelles depuis quinze ans»

Le parcours professionnel de la soeur jumelle, mère des deux enfants du couple F., a connu davantage d'embûches. Le Service de la santé publique (SSP) du canton de Fribourg lui a retiré son autorisation d'exercer en 2014 pour «raisons administratives», alors qu'elle travaillait dans un cabinet d'orthodontie à Bulle. Quelques années plus tôt, elle s'était mise à son compte dans le département de l'Eure (nord-ouest de la France), mais avait interrompu son activité avant de se déplacer en Suisse comme son mari et sa soeur.

Le «Journal du Dimanche» est le premier média à avoir récolté le témoignage d'un proche de la famille décimée à Montreux. Le beau-frère du couple explique n'avoir plus eu aucune nouvelle de Marc F. et de son épouse depuis quinze ans. «Six mois après leur mariage, ils ont brutalement coupé les ponts», explique-t-il. La fille de huit ans n'apparaissait pas au contrôle des habitants, selon plusieurs sources. Comme ses parents, elle n'a pas survécu à la chute de vingt-deux mètres jeudi matin, peu après que des policiers ont frappé au domicile pour s'enquérir de la scolarisation des enfants. Son frère aîné, miraculé, pourra-t-il lever le mystère de ce faits divers au retentissement mondial?

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la