Lorsque l’hiver touche à sa fin, c’est normalement l’effervescence chez les fournisseurs de mazout: les entreprises font des recommandations d’achat et prennent des commandes groupées. Mais ce printemps, tout est différent.
Depuis des semaines, les prix fluctuent énormément. Roger Wirth, chef de Oel-Hauser, ne se risque pas pour l’instant à faire des prévisions de prix. «Je suis dans le métier depuis 31 ans, et je n’ai encore jamais connu des variations de prix comme celles que nous avons connues récemment», assure-t-il. Certains jours, le prix des 100 litres s’est envolé et augmente de 20 francs. Il a atteint son niveau le plus élevé le 10 mars. À l’époque, 100 litres de mazout coûtaient 170 francs.
Des clients qui n’arrivent plus à payer
Les prix élevés du mazout de ces dernières semaines mettent à mal la clientèle de Roger Wirth. Ils seraient de plus en plus nombreux à être en retard dans le paiement de leurs factures. «Mes débiteurs sont presque deux fois plus nombreux par rapport à une année normale», compare le chef d’entreprise.
Les difficultés de paiement concerneraient des clients de toute la Suisse, aussi bien des entreprises du secteur immobilier, que des propriétaires de maisons individuelles. Les entreprises de construction et les transporteurs, que Roger Wirth et son équipe approvisionnent en diesel, seraient particulièrement représentés.
«Pour les nouveaux clients, nous examinons le registre des poursuites. Si leur solvabilité a récemment été mise en cause, nous ne livrons que contre paiement comptant ou anticipé», explique le chef de Oel-Hauser.
Offre plus valable en quelques minutes
Si certains clients n’arrivent plus à payer, cela retomberait également sur Oel-Hauser. «Avec un prix du pétrole de 145 francs pour 3000 litres, nous gagnons 150 francs. Pour que nous puissions compenser un défaut de paiement, nous devrions donc remplir un certain nombre de réservoirs», constate Roger Wirth.
Au lieu du traditionnel boom des ventes au printemps, les employés de Oel-Hauser sont occupés par l’envoi de rappels. Mais ce qui leur donne le plus de travail, ce sont les hausses de prix qu’ils n’arrivent plus à suivre. «Ces dernières semaines, il nous est souvent arrivé de proposer un prix au téléphone qui n’était déjà plus valable quelques minutes plus tard», raconte le patron de l’entreprise. Résultat: des collaborateurs stressés et des clients mécontents.
Agrola conseille d’acheter maintenant
Les fluctuations de prix se poursuivent, mais la tendance actuelle est à la baisse: du 4 au 6 avril, le prix du mazout pour une commande de 3000 litres est passé de 149,40 francs les 100 litres à 141,80 francs. «En raison de la grande incertitude, les clients ne commandent que des quantités partielles», détaille Roger Wirth.
La baisse des prix pourrait toutefois bientôt prendre fin. «Une nouvelle hausse des prix du mazout semble plus probable que l’inverse», prédit Martina Wagner, porte-parole d’Agrola. C’est pourquoi la société de services énergétiques conseille actuellement d’en acheter maintenant pour faire des économies.
Des citernes vides
Agrola examine également la possibilité de mener une action publicitaire auprès de ses clients pour les inciter à remplir leurs citernes. L’entreprise Fenaco ne peut pas encore prédire si les prix élevés du mazout entraîneront des impayés chez Agrola. «Cela reste à voir», tempère Martina Wagner.
De nombreux clients ont attendu trop longtemps avant de passer commande: lors de la récente vague de froid, les services de piquet d’Oel-Hauser et d’Agrola ont dû intervenir régulièrement en raison de citernes à mazout vides.
(Adaptation par Lliana Doudot)