Des shots, de la musique et de la bière qui coule à flots: la fête bat son plein sous le chapiteau de la cabane Lutz, à Sattel, dans le canton de Schwytz. Des soirées à cinq francs l’entrée y ont lieu tous les jeudis. Et elles sont particulièrement appréciées… notamment parce qu’aucun certificat Covid n’y est nécessaire. Enfin, n’était pas nécessaire, jusqu’à ce que les exploitants décident d’eux-mêmes de mettre fin à la fête.
Ces fêtes étaient-elles tenues illégalement? Même pas. C’est là toute la subtilité de la chose. Elles reposaient sur une astuce a priori toute simple: la législation de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) prévoit que la présentation d’un certificat Covid n’est pas nécessaire pour les événements de moins de 300 personnes à l’extérieur. Les tenanciers du chapiteau ont donc décidé de retirer deux des parois latérales de la tente, la «transformant» ainsi en manifestation tenue à l'extérieur.
Le syndic les couvre
Cela ne semblait pas déranger le syndic de la commune, qui autorisait ces évènements sur la base de l’astuce, malgré une volonté évidente de vouloir contourner les mesures sanitaires. Il faut dire que le canton de Schwytz et la Suisse centrale en général ne sont pas de grands fans des mesures anti-Covid, qu’elles viennent de Berne ou de leur propre canton.
Le syndic nous explique qu’il signait toutes les semaines une autorisation, après que le couple de tenanciers a accepté de se conformer à certaines mesures de sécurité... qui tenaient sur une page A4. L’une des conditions, par exemple, est «le respect des distances», nous explique le président de commune. «La police et le service de la santé publique sont responsables du contrôle des consignes», poursuit-il.
Difficile de respecter réellement les mesures sanitaires
Or, ce respect des distances a été difficile à mettre en œuvre dans la pratique, comme le montrent des photos prises sous le chapiteau: on y voit des gens agglutinés, dansant sur des tables, très proches les uns des autres. Sur une vidéo TikTok, des images de fêtards débridés est surmontée de la mention: «a little party never killed nobody». L'ironie terrible aura échappé à l'autrice ou l'auteur de cette publication.
Les exploitants ont fini par reconnaître eux-mêmes que la démarche n’était guère raisonnable. Le chapiteau a été démonté en début de semaine, ont-ils annoncé à Blick. Leur prise de conscience se relativise quelque peu, puisqu’il était de toute façon prévu de démonter la tente ce lundi. Ils n’ont pas encore tranché sur la tenue d’une fête similaire pour le Nouvel-An, qui devait avoir lieu sans certificat.
Six lits de soins intensifs sur dix pour des patients Covid
Selon la gérante Andrea B.*, elle et son équipe ne font pas partie des coronasceptiques. S’ils ont décidé de se conformer au minimum juridique requis, c’est pour des raisons économiques: «nous nous sommes simplement posé la question de savoir ce qui était juridiquement possible. Nous avons constaté que les jeunes ont besoin d’avoir au moins un endroit où ils peuvent entretenir des contacts sociaux sans contraintes», nous déclare-t-elle.
Sa fête débridée à un jet de pierre des pistes de ski de la station Sattel-Hochstuckli, appréciée des citoyens locaux, avait échauffé les esprits dans la région la semaine dernière. Bien que les exploitants n’aient pas agi illégalement, le concept a été âprement critiqué. Dans le canton de Schwytz, six lits de soins intensifs sur dix sont actuellement occupés par des patients Covid. Sept sont occupés et certains patients ont dû être transférés dans des hôpitaux d’autres cantons.
*Nom connu de la rédaction
(Adaptation par Jocelyn Daloz)