«Je ne suis pas Greta»
Peut-on être une élue verte et prendre l'avion?

La polémique enfle: sur Twitter, le PLR Philippe Nantermod tacle la Verte Magali Di Marco, qui s'est rendue aux Comores, archipel au nord-ouest de Madagascar, en avion cet été. La députée valaisanne répond au conseiller national dans Blick.
Publié: 28.09.2021 à 01:05 heures
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Dernière mise à jour: 29.09.2021 à 10:25 heures
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Amit JuillardJournaliste Blick

C’est l’heure de l’apéro ce vendredi 22 septembre peu avant midi. Sur Twitter, un compte anonyme mais très ancré à droite publie un sondage. Avec cette question: «À votre avis, où passe la députée vert.x.e (candidate au Conseil d’Etat VS et au CN) @MagaliDimarco ses vacances?» (sic). Au choix, trois réponses: «dans les Grisons», «dans les Pouilles» ou «dans les Comores (7500 km - > CH). Les internautes ne se sont pas trompés, il fallait choisir la réponse C. «Hypocrisie», «incohérence» ou «débat puéril»: on s’écharpe.

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Sur la plateforme rôde un politicien qui adore détester les écologistes: le conseiller national PLR Philippe Nantermod. Servie sur un plateau, l’occasion était donc trop belle. Ni une, ni deux: le Valaisan saisit la balle au bond, moins d’une heure plus tard.

«Faites ce que je dis, pas ce que je fais»

Il retweete, avec ce commentaire: «Dans la série 'faites ce que je dis, pas ce que je fais'». Et met Magali Di Marco, élue verte au Grand Conseil valaisan, face à ses apparentes contradictions. «J’en sais rien, mais tout PLR que je suis, je n’ai jamais été aussi loin de ma vie. Peut-être qu’on peut éviter d’avoir le bilan carbone d’une usine à gaz quand on est élu chez les Verts», assène-t-il. Des commentaires relèvent les critiques passées de Magali Di Marco à l’encontre du monde de l’aviation.

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Mais le message de Philippe Nantermod fait surtout chauffer les claviers de ses adversaires énervés. «Ah parce que pour être crédible en matière d’écologie, il faut être irréprochable 365j/an et afficher un bilan annuel carbone nul, genre barbe de 2m, birkenstocks aux pieds, bougie dans la main et fourneau à bois pour faire la cuisine? Quelle démagogie…», lui rétorque un utilisateur. «J’allais le dire, ce serait bien d’aller une fois un peu plus loin, ça ouvre l’esprit et remet parfois les idées en place en ce qui concerne nos certitudes…», surenchérit la principale intéressée.

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Sans toutefois répondre à la question polémique en toile de fond: peut-on être membre des Vert.e.s et continuer à prendre l’avion, sachant que le transport aérien est responsable de 27% de l'impact climatique de la Suisse (contre 5,9% au niveau mondial)? Blick a voulu qu’elle y réponde.

50 nuances de vert

«Si on me pose cette question, on devrait aussi me demander si je suis végétarienne ou si je mets du désherbant dans mon jardin! Dans notre parti, le vert se décline en plusieurs tons, explique l’ex-triathlète et médaillée olympique. Nous sommes libres et responsables dans nos paroles et nos actes. Moi, je ne suis pas une militante extrémiste et je ne veux pas vivre dans une grotte. Je suis née en Suisse dans une société qui a un impact trop élevé sur le climat et je veux agir pour le réduire sans pour autant être une marginale.» En d’autres termes, Magali Di Marco se présente comme une modérée, par opposition à d’autres membres de sa formation politique avec qui elle partage ses idéaux, et n’adhère pas forcément aux méthodes des activistes comme ceux d’Extinction Rebellion.

Elle n’est pas prête à se «priver» de tout, mais vise le zéro déchet. «Faire des achats aussi locaux que possible, investir dans de l’énergie solaire et thermique sont aussi des gestes qui comptent! Mais je sais que je ne suis pas irréprochable. Je ne suis pas Greta, je suis Magali. Je n’ai rien à cacher, c’est pour ça que je parle de mes vacances sur les réseaux sociaux.»

Pour la politicienne de Troistorrents, pas question de ne plus jamais voler. «Je n’ai jamais dit que je renonçais aux longs courriers, même si je prends beaucoup moins l’avion qu’avant. Faire un grand voyage tous les deux ans au lieu d’un par an diminue déjà grandement une empreinte écologique. Ce que je condamne, c’est le low-cost, qui devrait être taxé davantage pour que l’option d’un mode de transport moins polluant soit un vrai choix. C’est sûr, je ne prendrai plus l’avion pour faire un week-end à Barcelone. Et je me bats contre le développement des aéroports qui est malgré la crise climatique encore un objectif de notre gouvernement.»

Ecotourisme et écosystème

Et, pour elle, le tourisme écoresponsable a aussi un effet positif sur la protection de l’environnement et la biodiversité dans les pays du Sud. Son histoire avec les Comores, archipel de quatre îles au nord-ouest de Madagascar, est particulière. Son mari y a ouvert un centre de plongée en collaboration avec un hôtelier local. Pour la petite histoire, il a profité d’un coup de pouce d’Isabelle Chevalley, ancienne parlementaire fédérale vaudoise vert’libérale, qui y menait un projet écologique avec l’association Terre & Faune. En août 2021, le couple y est retourné.

«Quand les locaux voient des touristes venir pour admirer les tortues vertes, découvrir des chauves-souris endémiques en voie d’extinction à cause de l’activité humaine ou pour explorer les fonds marins et que ça leur permet de se faire un peu d’argent, ils comprennent qu’il faut préserver leur écosystème, ne pas braconner, ne pas jeter du plastique dans les rivières et l’océan», assure la Neuchâteloise d’origine.

«Ça ne sera pas suffisant»

Et s’ils forment la jeunesse, la cinquantenaire estime que les voyages ouvrent aussi les yeux sur d’autres réalités. «J’ai beaucoup voyagé au cours de ma carrière sportive. C’est aussi ça qui m’a ouvert les yeux sur les écosystèmes et les fonctionnements d’autres pays. Avoir une vision globale quand on parle de climat, c’est important.»

Magali Di Marco n’est donc pas une «décroissante extrémiste». Décroissance prônée par les milieux les plus radicaux face à l’urgence climatique. «Diminuer notre consommation par deux, par exemple, pourrait avoir un impact énorme. Mais au fond, si on suit ce qui est annoncé par le GIEC, je sais que ça ne sera pas suffisant. D’autant plus qu’il n’y a pas de prise de conscience générale dans le monde et que les processus politiques sont lents. Mais d’un autre côté, je suis optimiste: peut-être que nos enfants ou petits-enfants, eux, arriveront à mettre en place des solutions que nous n’aurons pas eu le temps de trouver.»

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