Infernale chaleur urbaine
Il fait jusqu'à 10 degrés de plus en ville! Voici pourquoi

Et si la canicule était avant tout un problème urbain? En été, les villes deviennent des fours, en particulier la nuit. Et le problème s'aggrave, selon les spécialistes.
Publié: 18.07.2022 à 17:20 heures
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Dernière mise à jour: 18.07.2022 à 17:37 heures
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Beaucoup de gris et peu de vert: dans le centre-ville de Berne, il fait en moyenne six à dix degrés de plus que dans les quartiers limitrophes de la campagne.
Photo: Caro / Ruffer
Lea Hartmann

Pour Moritz Burger, le vert est la couleur de l'espoir. Le jeune homme de 29 ans est doctorant au Centre de recherche climatique de l'Université de Berne, et il se réjouit de chaque coin de verdure qu'il trouve dans la capitale. Même s'il ne s'agit que de quelques mètres carrés.

Des arbustes, une bande de verdure entre des rails de tram, une façade recouverte de végétation: les jours de canicule, les plantes sont bien plus qu'une touche de couleur dans la grisaille urbaine — elles sont un climatiseur naturel.

Le climat urbain est la spécialité de Moritz Burger. Avec ses collègues, il a installé 90 stations de mesures en ville de Berne. Toutes les dix minutes, elles enregistrent la température, avec des différences parfois énormes. «Pendant la vague de chaleur actuelle, les températures sont supérieures de 6 à 10 degrés en ville par rapport à d'autres endroits moins construits du territoire urbain», explique le géographe.

Moritz Burger, doctorant à l'Université de Berne.
Photo: Lea Hartmann

Nuits tropicales en explosion

Des températures particulièrement élevées ont été mesurées dans la vieille-ville de Berne. Les scientifiques parlent d'«îlots de chaleur». Un terme technique pour un cocktail explosif: des constructions denses et un sol bétonné. Selon la configuration des lieux, aucun souffle de vent ne peut s'engouffrer pour rafraîchir les esprits. «On le sent déjà pendant la journée, mais c'est encore plus frappant la nuit: la chaleur accumulée fait que l'air ne peut pas se refroidir correctement», explique Moritz Burger.

Et cela se voit sans peine dans les relevés de température: au centre-ville de Zurich, par exemple, plus d'une douzaine de nuits tropicales (lorsque le thermomètre ne descend pas sous 20 degrés) ont été enregistrées à l'été 2018. Contre zéro à la station de Zurich-Affoltern, à 2 kilomètres de là mais dans un environnement de sortie de la ville et de début de la campagne. Le bientôt trentenaire joint les actes à la parole: en plein centre de la capitale, il mesure jusqu'à 57 degrés au sol!

Les îlots de chaleur sont un problème reconnu, en particulier pour les personnes âgées. Lors de l'été caniculaire de 2015, plus de 5% de décès supplémentaires ont été enregistrés par rapport aux étés plus frais. Mais la chaleur pèse également sur les jeunes citadins. «Le corps a besoin de se rafraîchir pour récupérer, explique Moritz Burger. Si les températures restent supérieures à 20 degrés, même la nuit, cela devient difficile.»

Villes conscientes du problème

Le climatologue estime qu'il existe désormais en Suisse une prise de conscience du problème. De nombreuses villes ont établi des cartes de chaleur, adopté des stratégies climatiques et élaboré des plans de mesures pour rafraîchir les villes.

On fait attention à planter davantage d'arbres: en plus de donner de l'ombre, ils refroidissent l'environnement par l'évaporation de l'eau. On fait également attention à utiliser des matériaux de construction plus clairs, qui reflètent mieux les rayons du soleil.

Dans la Rathausgasse de Berne, au cœur de la vieille-ville, la municipalité a par exemple remplacé il y a quelques années l'asphalte par des pavés plus clairs, entre autres pour des raisons liées à la température.

En raison des longs délais de planification des projets de construction, il faudra toutefois attendre avant que de grands changements soient visibles. De plus, la protection des monuments historiques peut faire obstacle à certaines mesures, fait remarquer le jeune chercheur. Et le porte-monnaie peut également entrer en ligne de compte.

Pression politique

Mais la pression politique sur les villes augmente. A Berne, l'organisation environnementale «Umverkehr» collecte actuellement des signatures pour demander que la ville soit rendue «supportable à la chaleur». L'organisation a déjà déposé des textes similaires à Genève, Saint-Gall, Bâle, Zurich et Winterthour.

À Genève, des

Comment les villes comptent-elles lutter contre la chaleur? Voici un tour d'horizon des principaux stratagèmes en vigueur ou en projet.

Plus clair, plus frais?
La ville de Lucerne teste cet été et l'an prochain un asphalte plus clair afin de lutter contre la chaleur. Une expérience similaire a été menée à Zurich, hélas avec de piètres résultats — seulement 2° de différence par rapport à l'asphalte normal. «Les arbres sont des outils bien plus efficaces contre les îlots de chaleur», écrit elle-même la municipalité.

Des murs de verdure
La tour de Risch (photo), dans le canton de Zoug, est visible loin à la ronde. Et pour cause: sa façade de 70 mètres de haut est recouverte de végétation. Un oasis de verdure qui permet non seulement de faire baisser la température ressentie de plusieurs degrés, mais sert aussi de protection contre le bruit.

Réduire la taille des arbres
Plus la végétation est envahissante, mieux c'est: la maxime de Moritz Burger est simple à comprendre. Elle est appliquée par la Ville de Genève, qui a réduit la taille des arbres depuis cette année pour lutter contre la chaleur. Ce n'est pas le Il y a quelques années, Sion a planté 700 érables dans une zone piétonne du centre-ville.

Un nuage rafraîchissant
D'autres idées sont encore plus originales. Comme à Zurich, où au-dessus de la Turbinenplatz, un anneau d'un nouveau genre diffuse un brouillard rafraîchissant pour aider les habitants à lutter contre la chaleur. Difficile de penser que cela va changer la donne pour de bon: l'eau s'évapore vite et ce n'est pas forcément bien vu à une ère où la consommation d'eau doit être limitée.

Aérer la rue
Pour un climat tempéré, la circulation de l'air est essentielle. Et la configuration des bâtiments a un rôle à jouer. La Ville de Bâle a été pionnière en la matière: une analyse climatique a été réalisée dès 2019 pour étudier les flux d'air et intégrer cette donnée dans la construction des bâtiments.

La tour de Risch, dans le canton de Zoug, se voit loin à la ronde.
DR

Comment les villes comptent-elles lutter contre la chaleur? Voici un tour d'horizon des principaux stratagèmes en vigueur ou en projet.

Plus clair, plus frais?
La ville de Lucerne teste cet été et l'an prochain un asphalte plus clair afin de lutter contre la chaleur. Une expérience similaire a été menée à Zurich, hélas avec de piètres résultats — seulement 2° de différence par rapport à l'asphalte normal. «Les arbres sont des outils bien plus efficaces contre les îlots de chaleur», écrit elle-même la municipalité.

Des murs de verdure
La tour de Risch (photo), dans le canton de Zoug, est visible loin à la ronde. Et pour cause: sa façade de 70 mètres de haut est recouverte de végétation. Un oasis de verdure qui permet non seulement de faire baisser la température ressentie de plusieurs degrés, mais sert aussi de protection contre le bruit.

Réduire la taille des arbres
Plus la végétation est envahissante, mieux c'est: la maxime de Moritz Burger est simple à comprendre. Elle est appliquée par la Ville de Genève, qui a réduit la taille des arbres depuis cette année pour lutter contre la chaleur. Ce n'est pas le Il y a quelques années, Sion a planté 700 érables dans une zone piétonne du centre-ville.

Un nuage rafraîchissant
D'autres idées sont encore plus originales. Comme à Zurich, où au-dessus de la Turbinenplatz, un anneau d'un nouveau genre diffuse un brouillard rafraîchissant pour aider les habitants à lutter contre la chaleur. Difficile de penser que cela va changer la donne pour de bon: l'eau s'évapore vite et ce n'est pas forcément bien vu à une ère où la consommation d'eau doit être limitée.

Aérer la rue
Pour un climat tempéré, la circulation de l'air est essentielle. Et la configuration des bâtiments a un rôle à jouer. La Ville de Bâle a été pionnière en la matière: une analyse climatique a été réalisée dès 2019 pour étudier les flux d'air et intégrer cette donnée dans la construction des bâtiments.

Et les choses bougent aussi au niveau fédéral. La conseillère nationale des Verts Florence Brenzikofer demande la création d'un «fonds immédiat pour l'adaptation climatique dans les villes et les agglomérations», tandis que sa collègue écologiste Franziska Ryser un centre de compétence national sur le climat urbain.

Car le problème s'aggrave. En raison du changement climatique, il fait de plus en plus chaud dans les villes. Dans la ville de Lucerne, le nombre de jours de canicule par an a augmenté en moyenne de deux jours par décennie depuis les années 1960. La ville s'attend à ce que ce nombre passe de six jours par an aujourd'hui à 22 jours par an d'ici 2060.

Mais des mesures d'urgence comme planter des arbres ou rendre l'asphalte plus clair ne suffira pas, prévient le géo-écologiste Jonas Schwaab, de l'EFPZ. «Il faut plutôt s'attaquer à la cause du problème et réduire les émissions de CO2...»

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