Evaluation de Lobbywatch
Certains parlementaires suisses collectionnent les mandats rémunérés

Le Palais fédéral abrite des lobbyistes officiels, mais aussi officieux. Ces derniers sont souvent... les parlementaires eux-mêmes. Une évaluation d'un organisme indépendant a recensé les mandats rémunérés perçus par les politiciens, dévoilant certains déséquilibres.
Publié: 25.10.2022 à 05:59 heures
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Dernière mise à jour: 27.10.2022 à 12:41 heures
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L'association a établi un classement des parlementaires selon leur nombre de postes rémunérés.
Photo: keystone-sda.ch
Lea Hartmann

Cet article a été modifié le 27 octobre après une mise à jour de Lobbywatch. Son premier classement était erroné, a admis l'association sur Twitter, présentant également ses excuses à la conseillère nationale Ruth Humbel.

Les parlementaires représentent le peuple… mais pas que. Ils portent souvent les intérêts de caisses maladies, de fournisseurs d’énergie, de banques ou encore d’associations caritatives, par exemple. Une évaluation de Lobbywatch, une plateforme d’information qui recense les liens d’intérêts des politiciens suisses, détaille les conseillers nationaux et aux Etats qui comptent le plus de mandats rémunérés en plus de leur engagement politique. L’évaluation précise également les secteurs dans lesquels les parlementaires s’engagent le plus en dehors des institutions.

Depuis 2019, les parlementaires fédéraux doivent indiquer s’ils reçoivent de l’argent ou non pour un mandat. En revanche, ils n’ont pas à préciser le montant qu’ils reçoivent pour ces engagements.

Peter Schilliger en tête du classement

En tête du classement de Lobbywatch, on retrouve le conseiller national PLR Peter Schilliger, 63 ans. Le Lucernois cumule 18 mandats rémunérés. En deuxième place, le conseiller aux États PLR Martin Schmid (Grisons), le conseiller national UDC Albert Rösti (Berne), le conseiller national PLR Beat Walti (Zurich) et le conseiller aux États du centre Erich Ettlin (Obwald): ils détiennent, eux, seize mandats rémunérés chacun.

Des différences entre la gauche et la droite, et entre genres

Au total, selon Lobbywatch, 37% des mandats des parlementaires sont rémunérés. Les politiciens de l’UDC et du Centre en détiennent le plus grand nombre (en comparaison avec les engagements bénévoles). Les membres de ces groupes parlementaires perçoivent respectivement 47% et 46% de toutes les rémunérations. Pour les parlementaires PLR, 38% des mandats sont payés tandis que pour les Vert’libéraux, le chiffre descend à 33%. Enfin, ce sont le PS et les Verts qui comptent le moins de mandats rémunérés avec respectivement 25% et 23%.

L’évaluation a en outre conclu que les députés masculins ont nettement plus de mandats rémunérés que les femmes. Les 39% de femmes au Parlement ne détiennent que 29% de tous les mandats rémunérés. Ce n’est que dans les domaines de la culture, de la politique étrangère/économie extérieure et de la sécurité sociale que les femmes auraient davantage de mandats rémunérés que leurs collègues masculins.

C’est dans les domaines de l’énergie, de l’économie et de l’agriculture que la part des postes rémunérés est la plus élevée. Dans ces secteurs, environ six mandats sur dix donnent lieu à une compensation financière. La part des emplois payés est faible en revanche dans les domaines de l’environnement (18%), de la culture (8%) et de la politique étrangère/économie extérieure (3%).

Lobbywatch demande plus de transparence

«Notre analyse montre pour la première fois de manière très claire que certains secteurs peuvent manifestement engager beaucoup plus d’argent que d’autres», détaille Otto Hostettler, coprésident de Lobbywatch. En outre, il s’avère que les politiciens bourgeois exercent beaucoup plus de mandats rémunérés que les parlementaires de gauche. Du point de vue de l’association, les règles de transparence existantes ne vont pas assez loin. Elle demande que le montant des indemnités soit également rendu public.

Dans la Berne fédérale aussi, la rémunération liée à ces mandats supplémentaires est un sujet extrêmement controversé. En 2019, c’est justement un politicien du Centre, le conseiller aux États Beat Rieder, qui a proposé des règles plus strictes. Les politiciens de la santé ne devraient par exemple plus accepter de mandats rémunérés d’entreprises et d’organisations dans le domaine de la santé, a-t-il exigé. Après avoir initialement approuvé la proposition, la commission compétente du Conseil des États l’a récemment rejetée à l’unanimité.

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