Nouvel épisode dans l'affaire Fischer: Léman Bleu a pu consulter 113 pages de documents contenant des courriels et des plannings d'une proche collaboratrice de l'ex-conseillère d'Etat. Pour rappel, la chaîne de télévision genevoise avait déjà rendu publics les agendas et emails de deux porte-paroles du département de Fabienne Fischer (DEE), mais une troisième employée avait bloqué la divulgation de documents la concernant.
Cette chargée de mission aujourd'hui à la retraite a donc finalement consenti à dévoiler le contenu de sa boîte mail et de son planning institutionnels. Comme les documents déjà révélés par Léman Bleu le suggèrent, il semblerait que la chargée de mission et d'autres fonctionnaires aient contribué à la campagne de leur ministre sortante.
Fabienne Fischer en voulait à Thierry Apothéloz
Au sein de l’administration, un fonctionnaire ne peut pas être chargé de missions d’ordre privé, en particulier de tâches en lien avec la campagne personnelle de son supérieur. Pourtant, les courriels de la collaboratrice indiquent qu'elle a suivi le planning de campagne, échangé autour du choix des photographies électorales et rédigé de nombreux contenus. Parmi ceux-ci des programmes, des textes pour le site internet de Fabienne Fischer et le script d'un clip promotionnel. L'agenda de la collaboratrice nous apprend en outre qu'elle a pris part à cinq séances de «préparation débat».
Les nouveaux documents mettent également en lumière l'existence de tensions au sein de l'alliance de la gauche genevoise. La chargée de mission est mise en copie d'un courriel que Fabienne Fischer adresse à sa présidente de parti Delphine Klopfenstein-Broggini. La candidate d'alors s'y plaint que l'un de ses colistiers, vraisemblablement Thierry Apothéloz (PS), «se met très en avant» et que sa position n'est pas «équilibrée».
Limite brouillée entre institutionnel et personnel
Fabienne Fischer et son équipe avaient-elles conscience qu'elles enfreignaient peut-être les règles en mêlant institutionnel et personnel? Un échange de courriels le suggère. En réponse à une demande de Fabienne Fischer, un collaborateur répond: «Qui s’en occupe, c’est très campagne, non?» Jean Rossiaud, le compagnon de l'ex-ministre ajoute: «Oui, je pense que c’est plus campagne personnelle que campagne institutionnelle, indéniablement.»
Au sujet de Jean Rossiaud, Léman Bleu révèle également qu'il a été mis au courant de «sujets à risque» internes à l'Etat. Il est par exemple en copie d'un courriel reçu par la chargée de mission qui mentionne le secrétaire général du département, alors sur le départ. Cette information n'est pas encore connue du grand public à ce moment.
«Ma cliente est sereine»
La justice a été saisie pour faire la lumière sur cette affaire. Tous les protagonistes bénéficient de la présomption d'innocence. Interrogé par Léman Bleu, l'avocat de la chargée de mission, Me Robert Assaël, se montre confiant: «Ma cliente est sereine, n’ayant rien à se reprocher, tant sur le plan administratif que pénal. En effet, les mails ne sont pas critiquables, ce d’autant moins qu’elle ne travaillait qu'à 50% pour l’État.»
Fabienne Fischer s'était, elle, exprimée dans la «Tribune de Genève» en dénonçant «une succession de séquences de communication savamment orchestrées» qui viseraient à la discréditer. Quant à son compagnon Jean Rossiaud, ses avocats ont déclaré à Léman Bleu: «Il suffit de rappeler que la situation du Secrétaire général du DEE a été soulevée au Grand Conseil le 27 janvier 2023 pour comprendre que les attaques visant notre mandant sont, une fois encore, gravement biaisées et proférées au mépris des faits. Ces nouveaux courriels ne font en réalité que confirmer que M. Jean Rossiaud a soutenu la campagne électorale de Mme Fabienne Fischer dans le souci constant de séparer les rôles et d’agir dans le plus strict respect des lois.»