La plupart des employés de l'entreprise de photovoltaïque Viva Solar à Rebstein, dans le canton de Saint-Gall, sont des monteurs qui s'en sortent tout juste financièrement. Ces derniers mois, plusieurs d'entre eux ont attendu, en vain, leur salaire, tandis que le patron Ivan H.* s'offrait des vacances de luxe. «Je ne sais pas comment je vais pouvoir payer mon appartement, ma caisse maladie, ma nourriture», confie un employé à Blick.
Depuis la création de Viva Solar en juin 2023, son propriétaire Ivan a mis en colère de nombreux employés, en a poussé certains au désespoir. Robert Godlewski en fait parti. Il a dû s'inscrire pour la première fois au chômage fin 2024. Il a commencé à travailler en septembre dernier comme monteur chez Viva Solar. Le presque cinquantenaire a travaillé cinq semaines jusqu'à son licenciement – sans être payé. «Je n'ai pas vu un centime!»
Ivan a fondé Viva Solar en juin 2023. L'un de ses premiers employés était Gabriel L.* «Je faisais des heures supplémentaires tous les jours», raconte le monteur. «Mon patron me menaçait de me licencier si je ne terminais pas un chantier.»
Heures supplémentaires non payées
En novembre 2023, Gabriel a eu un accident. Lors d'un trajet entre le bureau et le chantier, l'échelle a glissé du toit de la voiture sur la route. Son patron l'a licencié sans préavis et a retenu sur son salaire 3000 francs pour les amendes et 1800 francs pour l'échelle.
Le monteur est irrité. «J'avais déjà reçu et payé l'amende!» De plus, il aurait dû avoir le droit au salaire de ses 111 heures supplémentaires: environ 4100 francs. «Je n'ai jamais reçu cet argent.»
Plusieurs employés rapportent qu'Ivan garde les charges sociales pour lui. Sofija V.*, autrefois assistante d'exploitation, décrit des conditions chaotiques. «Ivan ne tenait pas de comptabilité, mais empilait les créances et les documents dans une caisse.»
Pendant ce temps, le boss semble mener une vie de luxe. Il exhibe des montres Rolex, sa Lamborghini et envoie des photos de ses escapades du week-end. Robert Godlewski, qui a jusqu'ici travaillé gratuitement pour Viva Solar, s'énerve: «Avec nos salaires, il s'est acheté une Lamborghini!»
Extrait du registre des poursuites falsifié?
Pendant ce temps, Viva Solar se noie dans les dettes. Peu avant Noël, l'entreprise avait des commandements de payer, des poursuites et des saisies en cours pour une valeur de plus de 1,3 million de francs. Blick dispose d'un extrait du registre des poursuites.
Sofija V. raconte que son ancien patron envoie à ses clients un extrait vierge du registre des entreprises datant de juin 2024. Blick détient cet extrait, ainsi que des commandements de payer et des menaces de faillite déjà ouverts en juin 2024. En d'autres termes, l'extrait ne semble pas être authentique.
«Parfois, Ivan devenait nerveux vers la fin du mois parce qu'il n'avait plus d'argent. Il licenciait alors arbitrairement quelques collaborateurs», raconte Sofija. Il lui envoie aussi une lettre de licenciement fin novembre dernier. Il y affirme que Sofija a elle-même démissionné et qu'elle ne s'est plus présentée au travail. Elle n'aurait donc pas droit à son salaire de novembre. «Un mensonge éhonté!»
Sa collègue de travail Dunja L.* vit la même chose. Elle n'a pas reçu son salaire. «J'ai essayé de joindre Ivan. Il a bloqué mon numéro», explique-t-elle.
Ivan H. sèche les rendez-vous au tribunal
Lukas Auer, du service juridique du syndicat Unia, représente de nombreux ex-employés devant les tribunaux. «Chaque semaine, de nouvelles personnes concernées s'annoncent», assure-t-il. Certaines procédures ont déjà été portées devant l'office de conciliation. Lukas Auer précise: «Ivan n'a jamais comparu jusqu'à présent.»
Début décembre, il aurait dû se présenter devant le tribunal de district de Münchwilen (TG). Le monteur Gabriel, dont l'échelle était tombée du toit, a en effet réclamé ses heures supplémentaires et le remboursement des retenues sur salaire pour l'amende et l'échelle. Mais cette fois encore, Ivan fait l'école buissonnière et l'audience se déroule sans lui.
Selon le journal «Work» d'Unia, le tribunal a décidé qu'Ivan devait à la fois régler les heures supplémentaires et rembourser les retenues sur salaire au monteur. Au total, cela représente près de 9000 francs. De plus, Gabriel recevra 800 francs de dédommagement extrajudiciaire de la part du patron de Viva Solar. Ivan a toutefois la possibilité de faire recours, écrit le journal.
Le ministère public confirme la plainte
Certains reproches à l'encontre d'Ivan pourraient relever du droit pénal, par exemple la rétention des cotisations aux assurances sociales ou la falsification de l'extrait du registre des poursuites. La présomption d'innocence s'applique néanmoins.
Viva Solar est enregistrée à Saint-Gall. Pour Blick, le Ministère public confirme qu'une plainte a été déposée contre le propriétaire.
Ivan n'a répondu à aucune de nos demandes. Fin novembre, il a nié toutes les accusations dans un article du journal «Work» d'Unia. Les salaires ont été «payés correctement» et les «manquements antérieurs» ont été «rapidement réglés» avec les autorités. Il a ajouté: «Si quelqu'un a un problème, qu'il vienne me parler. Ma porte est ouverte à tous.»
Depuis début décembre, le patron de Viva Solar ne s'est pratiquement plus montré dans son magasin. Le loueur des voitures de l'entreprise a réclamé le remboursement des véhicules. La plupart des employés restants n'ont pas reçu leur paie de décembre et leur 13e salaire. Ils ne se rendent plus au magasin, ils ont abandonné l'espoir qu'Ivan les paie pour leur travail.
*Les noms ont été modifiés