On sait que Genève compte quelque 2749 caméras de surveillance publiques sur l’ensemble du canton, qui appartiennent à une quarantaine d’institutions liées à l'État.
Problème: d'après l'institut Edgelands, qui étudie la surveillance physique et numérique de par le monde (y compris au bout du Léman), il y a plus de caméras privées que de caméras publiques dans les rues de la Cité de Calvin.
Combien sont-elles donc, au total? À qui appartiennent-elles, et où sont-elles placées? Personne, encore, ne s'est attelé à la tâche de les répertorier. C'est là que l'institut Edgelands entre en scène. Mais il ne peut accomplir cette tâche titanesque tout seul. Genevoises et Genevois, on a besoin de vous!
À l'occasion du festival d'innovation Open Geneva, qui se tiendra du 16 au 26 mars à travers la ville et en ligne, l'organisation propose un exercice démocratique bien particulier: mettre les citoyennes et les citoyens à contribution pour répertorier et cartographier toutes les caméras qui nous surveillent subrepticement dans la capitale diplomatique.
We want you!
Vous souhaitez participer? Rien de plus simple (promis, c'est très peu d'efforts, pour un projet aussi ambitieux). Voici la marche à suivre:
1. Envoyez simplement un courriel à l'adresse laura@edgelands.institute.
2. En parcourant les rues genevoises, prêtez attention aux caméras de surveillance visibles dans les espaces publics.
2. Prenez une photo d'une caméra de surveillance.
3. Envoyez la photo et l'emplacement de cette dernière à Edgelands via Signal ou WhatsApp, sur le numéro de téléphone qui vous aura été transmis lors de votre inscription.
4. Répétez l'opération aussi souvent que possible! À la fin de l'événement, il y a un prix à la clef pour celui ou celle qui aura repéré le plus de caméras.
L'opération se déroulera pendant toute la durée du festival Open Geneva, du 16 au 26 mars 2023.
Deux rendez-vous «en personne» sont au programme, au début et à la fin de l'événement. Un premier workshop sur la relation entre la sécurité et les technologies numériques se tiendra le 18 mars (plus d'informations via ce lien). Le deuxième marquera la fin de l'activité, le 26 mars. Il aura pour but de dévoiler les résultats et de mener une réflexion collective sur la méthodologie.
À noter que l'exercice ne s'arrête en réalité pas à la fin mars: les organisateurs comptent continuer à remplir cette carte des caméras genevoise jusqu'à ce qu'elle soit complète. Et les participants sont invités à en faire de même.
Vous pouvez retrouver toutes les informations au complet sur le site web de l'institut Edgelands, et via ce lien consacré au workshop en particulier.
«C'est la pointe de l'iceberg»
Bernard Rappaz, ancien journaliste — qui avait par ailleurs été la tête pensante de la transition numérique de la RTS — est aujourd'hui l'une des principales chevilles ouvrières de l'institut.
Il nous explique que sa démarche est motivée par un désir de davantage de transparence, mais aussi par la peur de voir émerger une société qui ressemblerait au roman dystopique «1984» (où l'on piste les gens 24h/24, via un écran omniprésent).
Cela, sans que personne ne s'en rende compte à temps. «L'idée, au fond, c'est de lancer un vrai débat public sur quelque chose qui se met silencieusement en place, à savoir une économie de la surveillance, affirme-t-il. Les caméras de plus en plus nombreuses dans nos rues — avec l'exemple récent des CFF et leur 36'000 yeux numériques — mais pas que. En fait, les caméras, ce n'est que la pointe de l'iceberg.»
«Une boîte de Pandore»
Mais c'est aussi la façon la plus «matérielle» et palpable dont nous sommes surveillés, d'où l'avantage de commencer par traiter cette problématique. Avant de s'empoigner de la surveillance numérique — moins évidente, mais en réalité bien plus inquiétante. Car sévèrement sous-réglementée à ce jour en Suisse.
«Vous verrez, la surveillance au XXIe siècle, c'est une vraie boîte de Pandore: vient ensuite la reconnaissance faciale, le partage de nos données numériques entre les institutions... Cela, sans que le citoyen n'aie jamais son mot à dire!» Sortez votre smartphone dès que vous voyez une caméra à Genève du 16 au 26 mars pour y remédier!