A cause du confinement?
Des cas de «puberté précoce» auraient été détectés chez de jeunes enfants

Partout dans le monde, de nombreux chercheurs ont constaté ces dernièes années une augmentation de 20 à 30% de cas de «puberté précoce» chez de très jeunes enfants. Ce développement accéléré et non désiré fait des dégâts physiques et psychologiques considérables.
Publié: 21.02.2024 à 20:31 heures
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Dernière mise à jour: 21.02.2024 à 20:33 heures
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La «puberté précoce» accélère le développement de caractéristiques sexuelles externes avant l'âge de 9 ans pour les garçons et de 8 ans pour les filles. (Image symbolique)
Photo: imago images/Westend61
Marian Nadler

On connaissait l'effet des perturbateurs endocriniens sur le développement précoce de jeunes enfants. Mais depuis la dernière pandémie, les cas de «puberté précoce» ont littéralement explosé: «On a enregistré 20 à 30% de cas supplémentaires», s'inquiète Bettina Gohlke de la clinique pédiatrique universitaire de Bonn. Et le phénomène touche la planète entière, les données provenant aussi bien d'Europe que des États-Unis et de Chine.

Également appelée pubertas praecox, cette puberté précoce accélère le développement de caractéristiques sexuelles externes avant l'âge de 9 ans pour les garçons et de 8 ans pour les filles.

Selon Bettina Gohlke, une charge psychosociale plus élevée pourrait également expliquer ce phénomène. Des études antérieures ont en effet montré que les enfants mûrissent physiquement plus tôt en période de confinement. De nombreux enfants ont mangé davantage, tout en bougeant nettement moins, entraînant un surpoids – considéré comme l'un des principaux facteurs de puberté précoce. «Mais même en excluant les prises poids, on constate que les cas de pubertas praecox ont augmenté», a déclaré Bettina Gohlke: «Il s'agit probablement d'un effet multifactoriel» sans que l'on sache pour l'instant s'il se dissipera dans le temps.

La durée de la puberté a évolué

Théoriquement, la puberté commence par une production accrue d'hormones sexuelles. Ainsi, chez les garçons, les testicules et le scrotum augmentent de volume, suivis par un allongement du pénis. Les poils pubiens et axillaires poussent. Chez les filles, les seins se développent puis, peu de temps après, viennent les poils pubiens et axillaires. Avant que les premières règles n'apparaissent des années plus tard.

Et selon les données d'une équipe de recherche dirigée par Bettina Gohlke, l'âge moyen du début de la puberté chez les filles a baissé d'environ trois mois par décennie depuis les années 70. De même chez les garçons. En revanche, la durée de la puberté n'a pas bougé au cours des 50 dernières années, la puberté dure donc en moyenne plus longtemps qu'avant. L'âge moyen des premières règles n'a pas changé non plus.

En principe, c'est surtout la génétique qui détermine le moment où la sécrétion hormonale et donc le déclenchement de la puberté, a lieu, explique l'endocrinologue hambourgeois Stephan Petersenn. Mais des facteurs tels que le stress psychologique permanent et l'alimentation favorisant l'obésité ont également une influence: dans les graisses corporelles se cache en effet de la leptine, une hormone qui accélère la puberté, explique Stephan Petersenn, porte-parole de la Société allemande d'endocrinologie (DGE).

Le début de la puberté serait donc lié au niveau de vie, selon Stephan Petersenn. Les cas de puberté précoce touche proportionnellement plus souvent les enfants issus de familles socialement défavorisées, plus souvent touchées par le surpoids. «La santé dépend du statut social et de l'éducation, on le voit clairement ici», a conclu un ancien président de la Société allemande d'endocrinologie.

Les hormones sexuelles «gèlent» la croissance des enfants

Mais ce n'est pas tout! Selon l'ancien endocrinologue allemand, les enfants touchés par une puberté précoce grandissent certes plus vite dans un premier temps, mais un processus «inversé» aurait pour conséquence, à terme, de bloquer leur croissance et de les rendre plus petits que ceux ayant eu une puberté plus tardive. Les hormones sexuelles, qui accélèrent la croissance dans un premier temps, «gèlent» ainsi le développement physique des enfants dans un second temps.

Outre de telles conséquences physiques, il peut y avoir des conséquences psychologiques: ainsi, en plus d'avoir honte de leur pilosité et de leurs poitrines: avec le début de la puberté, leur mode de pensée change également, ce qui peut entraîner des problèmes relationnels, explique Stephan Petersenn. «Ces enfants mûrissent plus tôt et pensent comme des adultes.»

D'autres conséquences à long terme, comme un risque plus élevé de certaines maladies, sont également évoquées par la communauté scientifique. Mais «il n'y a pas vraiment de bonnes données sur les conséquences à long terme», rassure Bettina Gohlke.

Une thérapie par injections pour ralentir la puberté

Il est toutefois possible de stopper le démarrage précoce de la puberté, en injectant tous les trois mois des messagers chimiques qui stoppent la production d'hormones sexuelles.

Cette thérapie commence en général avant l'âge de six ans et n'influence par la croissance et la taille définitive des enfants, rapporte Bettina Gohlke.

Mais dans la plupart des cas, la moitié des parents se montre réticente à suivre un tel traitement, conclut l'endocrinologue.

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