A cause de promesses de guérison
La demande de prières auprès d'églises libres prend l'ascenseur

Les églises libres et les groupes spirituels proposent des prières qui sont censées libérer des maladies physiques ou psychiques. Un expert en religion explique dans quels cas cela peut être problématique.
Publié: 05.12.2022 à 18:05 heures
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Dernière mise à jour: 05.12.2022 à 18:15 heures
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Dans les rues de Berne, le groupe "Heilung auf der Strasse Bern" propose des prières de guérison.
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Dana Liechti

Fin 2020, la joie de vivre d'Alisha Kleiner, 19 ans, fait place à des crises de panique répétées. Diagnostic: dépression. Au printemps 2021, la jeune Saint-Galloise se fait soigner dans une clinique. Mais même après cela, elle ne se sentait pas vraiment mieux, explique-t-elle. Alisha Kleiner est membre d'une église libre. En automne, elle participe à une conférence chrétienne en Allemagne, où l'on prie pour elle. Depuis, elle n'a plus de crises de panique: «Du jour au lendemain, j'étais guérie.»

Des témoignages comme celui-ci ne sont pas rares dans les milieux ésotériques, affirme Georg Schmid, expert en religion et directeur du centre d'information Relinfo. Dans certaines églises libres charismatiques pentecôtistes, qui mettent l'accent sur les dons du Saint-Esprit, il règne une croyance marquée pour les miracles. Les prières de guérison ne posent en principe aucun problème, explique Georg Schmid. En cas de soucis psychiques ou de dépendance, l'attente d'une guérison joue un rôle important dans le rétablissement du patient.

«Si je suppose que je vais mieux après une prière, cela peut avoir un effet placebo bénéfique», explique Georg Schmid. Si ce sont des troubles physiques qui sont soignés de cette manière, il s'agit souvent de douleurs qui peuvent disparaître d'elles-mêmes. «La guérison est alors attribuée à la prière.»

Ce qui est important, c'est que «les églises et les guérisseurs sérieux indiquent qu'il faut aussi recourir à une médecine basée sur la science». Alisha Kleiner affirme que c'est ce qu'elle a fait. Après la prière, elle a suivi une thérapie pendant un certain temps. Elle est convaincue de l'efficacité de la prière, mais elle explique: «Je crois aussi que Dieu a besoin en plus de psychiatres et de médecins pour aider les gens.»

Des prières pour soigner un cancer

Dans le contexte des prières de guérison, il y a malheureusement aussi des personnes qui en usent de manière inquiétante, raconte Georg Schmid. Par exemple ceux qui font des promesses ou qui déconseillent un traitement médical. «Cela peut vite devenir dangereux en cas de maladie grave.» Le scepticisme est également de mise lorsqu'il faut respecter des règles pour ne pas mettre en péril le succès de la guérison, ajoute-t-il.

De nombreuses organisations et personnes individuelles font de la publicité avec des récits de guérison. Dans le centre-ville de Berne, par exemple, «Heilung auf der Strasse Bern» (Guérison dans la rue), un regroupement de membres d'églises chrétiennes libres qui proposent leurs prières une fois par semaine. Le groupe décrit sur le net comment Dieu a libéré des personnes de leurs douleurs ou de leurs charges psychiques après leurs prières.

Et même du cancer: «Un homme est venu nous dire que nous avions prié pour lui il y a un an. A l'époque, une opération pour s'occuper d'un cancer était prévue. Après la prière de guérison, aucune opération n'a été nécessaire.» La prudence est de mise face à de tels témoignages, explique l'expert en religion Georg Schmid: la prière a souvent lieu juste après que le médecin de famille a émis un soupçon de cancer. Si la visite chez un spécialiste ne confirme pas une tumeur, ces gens partent du principe que leur vœu qui a éliminé le cancer.

Un guérisseur spirituel attire de plus en plus de monde

Le guérisseur spirituel Sananda, de son vrai nom Oliver Brecht, affirme également avoir libéré des personnes de tumeurs. Selon ses propres déclarations, il est un être de lumière et un guérisseur chrétien. Sur son site Internet, il affirme traiter 50'000 personnes et animaux par an au moyen de la guérison spirituelle par l'esprit: «Par moi, il y a eu plusieurs milliers de guérisons documentées», écrit-il.

Voici ce dont il est soi-disant capable: «Guérisons de tumeurs, épilepsie, redressement de la colonne vertébrale, redressement de la cage thoracique, disparition de douleurs qui étaient là depuis des décennies.» Selon ses propres dires, Sananda guérit à distance. Il n'a pas besoin de rencontrer ses clients pour cela. Les coûts? Plusieurs centaines de francs.

Sananda affirme que l'intérêt pour son offre augmente fortement. Si cela s'avérait, cela ne surprendrait pas Georg Schmid, un connaisseur du milieu: les récits de guérisons par la prière ainsi que les offres ésotériques correspondantes ont nettement augmenté pendant la pandémie.

«D'une manière générale, les gens cherchent de l'aide dans les situations d'urgence, notamment lorsqu'ils sont psychologiquement éprouvés. Certains ésotéristes, guérisseurs spirituels et certaines églises libres en ont énormément profité. Cela comprend des organisations inoffensives, mais aussi des personnages très inquiétants», explique Georg Schmid. Il n'est pas rare que ces dernières diffusent également des théories du complot.

«Je n'ai jamais promis à quelqu'un de le guérir»

Sur son site Internet, Sananda qualifie le secteur pharmaceutique et les médias de mafia et de menteurs. Il affirme que la population est empoisonnée par des armes à micro-ondes et des chemtrails, qu'elle est en outre surveillée et torturée de manière invisible.

Interrogé sur ses propos, le guérisseur répond par écrit qu'il connaît beaucoup de personnes qui ne sont pas en bons termes avec la pharma et la presse. Ce policier de formation, selon ses propres dires, ne s'exprime pas sur le fonctionnement exact d'une guérison spirituelle. Il n'oblige personne à lui confier une mission et ne déconseille pas non plus les offres médicales, mais se considère comme un complément. «Je n'ai jamais promis à quelqu'un de le guérir.»

Le groupe «Heilung auf der Strasse Bern» communique la même chose: «Nous ne faisons pas de promesses, mais proposons une offre gratuite et volontaire qui peut être utilisée par chaque passant(e) sans conditions préalables.» Les personnes qui utilisent leur offre sont en outre informées de ne pas arrêter de prendre des médicaments avant d'avoir parlé à un médecin.

(Adaptation par Lliana Doudot)

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