Cela faisait longtemps que l'on n'avait pas aussi peu vu Roger Federer avant le tournoi de Roland-Garros. Au moment de se rendre à Paris où il s'est qualifié lundi pour le 2e tour face à Denis Istomin (6-2 6-4 6-3), le Rhénan n'avait joué que trois matches en 2021, dont deux défaites. Sur terre battue, il lui manque des heures de vol après sa défaite au premier tour à Genève il y a deux semaines.
Cette année, le vainqueur du tournoi parisien en 2009 ne fait pas partie des prétendants au titre. Se qualifier pour la deuxième semaine serait déjà un succès. Pour Federer, il s'agit surtout de retrouver le rythme pour préparer au mieux son grand objectif, la saison sur gazon avec Wimbledon qui débutera à la fin du mois.
L'amour de Federer pour le football
Le gazon et Federer, c'est quelque chose de sérieux. Et pas seulement une raquette à la main. Il n'a jamais caché son amour pour le ballon rond. Le Bâlois est souvent invité dans les tribunes du Parc St-Jacques lors des matchs à domicile du FC Bâle. En 2016, il avait même amené le trophée de champion au milieu du terrain.
Pourtant, le premier amour de Federer n'était pas le grand FCB, mais le Concordia Bâle, rival local. En 1990-1991, l'ancien No 1 mondial faisait partie de l'équipe junior lors d'un tournoi de détection de talents avec plusieurs clubs de LNA. Son entraîneur de l'époque, Hermann Studer, se souvient: «Roger aurait certainement fait un bon footballeur, même s'il n'aurait pas gagné autant qu'en tennis.»
A l'époque, le Rhénan était déjà un battant, se souvient le formateur . «Sa condition physique était vraiment bonne. Cela sautait aux yeux qu'il pouvait bénéficier d'un entraînement intensif au tennis.» Hermann Studer le compare même à un autre célèbre junior de Concordia: «Roger avait une bonne vision du jeu. Il était un peu comme Hakan Yakin». Yakin, comme Federer, a grandi à Münchenstein. Le futur international suisse est passé par tous les niveaux juniors à Concordia. Cependant, la différence d'âge de quatre ans entre les deux enfants était trop importante pour qu'un duo Yakin/Federer ait pu exister.
Des larmes après les défaites
Roger aurait-il eu le petit truc en plus pour devenir pro? Il en avait en tout cas l'ambition, comme se remémore son ancien entraîneur: «Nous ne perdions pas très souvent. Mais lorsque cela arrivait, Roger était toujours très atteint. Ça lui arrivait de beaucoup s'énerver. Des fois, il pleurait même après les défaites.» Au sein de l'équipe, Federer était très bien intégré, apprécie-t-il. «Dans les camps d'entraînement, Roger était un farceur. Mais uniquement lorsqu'il n'était pas sur le terrain. Lorsqu'il fallait, il redevenait totalement concentré sur le sport», explique le mentor.
L'une de ses anecdotes préférées a eu lieu lors d'une fête de Noël au cours de laquelle le professeur de sport et d'anglais a joué le rôle du Père Noël. Hermann Studer en a conservé les vers écrits pour chacun de ses juniors. Pour Roger Federer, on peut traduire: «Il est clair pour tout le monde que Roger est un joueur de football aussi bien qu'une star du tennis. Si tu peux continuer de faire les deux, chaque adversaire va perdre son sourire.»
«Arrêter le football a été difficile pour Roger»
S'il possédait du talent dans les deux sports, Federer a vite dû se rendre à l'évidence: poursuivre les deux activités n'allait pas être possible sur le long terme. Allier le match de football du samedi et celui de tennis le dimanche aurait pu être possible, mais les séances d'entraînement durant la semaine auraient représenté une charge de travail trop importante. «Il lui a été difficile d'abandonner le football. Mais pour ses parents, il était clair qu'il devait se concentrer sur le tennis. Ils ont pris la bonne décision, c'est sûr», enchaîne Hermann Studer.
Au fil des ans, les contacts avec les Federer ont peu à peu diminué. L'homme de 76 ans, lui, est resté fidèle au football jusqu'à ce jour. Jusqu'en 2019, il était instructeur pour la formation des entraîneurs à l'Association de football du nord-ouest de la Suisse. Studer se souvient encore de ses dernières retrouvailles fortuites avec Federer. C'était il y a trois ans et demi, dans un centre commercial bâlois: «Roger poussait un chariot plein quand il m'a vu, il a crié 'Hoi Mäni' et s'est arrêté pour discuter. Nous aurions sûrement pu papoter pendant un long moment. Mais Mirka lui a rappelé qu'il devait tout de même rentrer à la maison.»