En 58 ans d'histoire de la Coupe du monde de ski, il existe quelques chapitres qui prouvent que les grands succès ne sont pas toujours le fruit d'une préparation sérieuse. «J'ai fait l'expérience qu'une bonne fête après le ski peut avoir des effets bénéfiques», avoue l'Autrichien Hans Knauss. «Après un début de saison 1998/99 catastrophique, j'ai fait une fête spontanée le jour de Noël dans un chalet et j'ai bu tellement d'alcool que j'ai vu deux fois le petit Jésus. Je suis ensuite allé à Bormio, où j'ai obtenu mon premier bon classement de l'hiver en me classant quatrième de la descente». Quelques semaines plus tard, Hans Knauss a triomphé sur la Streif à Kitzbühel.
Des clopes lors de la reconnaissance
L'ancien champion suisse Bernhard Russi sait qu'au début de la Coupe du monde, les attitudes étranges étaient particulièrement nombreuses. «La première fois que j'ai été convoqué pour une course de Coupe du monde, j'ai constaté avec de grands yeux qu'environ la moitié de l'équipe française, mais aussi le Vaudois Willy Favre, médaillé olympique en slalom géant, et le légendaire Grison Jos Minsch, spécialiste de la descente, fumaient des cigarettes pendant la reconnaissance du parcours».
Jos Minsch s'est rendu douloureusement célèbre au Lauberhorn en 1965, après avoir décollé comme une fusée sur l'arête située sous le Hundschopf et s'être fracturé le bassin lors de son atterrissage extrêmement brutal. Depuis, cet endroit porte son nom!
Trois ans après cette chute lourde de conséquences, le mécanicien sur machines de Klosters a fêté sa seule victoire en Coupe du monde à Cortina d'Ampezzo. Pour Dumeng Giovanoli, camarade de longue date de Jos Minsch, le fait que ce minimaliste ait réussi à se hisser au sommet de la hiérarchie mondiale tient du miracle: «Si je m'étais entraîné aussi peu que Jos, je n'aurais sans doute jamais réussi à intégrer l'équipe nationale. Si l'entraîneur nous demandait de courir en été, il refusait en disant en dialecte 'Segglä hani nid nötig', ce qui veut dire: 'Je n’ai pas besoin de courir!'»
Dumeng Giovanoli, double vainqueur de la Coupe du monde de slalom, constate que Jos Minsch n'a jamais réduit sa consommation de nicotine: «Pour que Jos puisse satisfaire son addiction le plus rapidement possible après une course, il cachait sa cigarette dans son casque pendant qu'il skiait». Triste fin pour cette histoire: Jos Minsch est décédé à 67 ans des suites d'une maladie pulmonaire, en 2008.
La chute de Bernhard Russi avec une pince
Roland Collombin, qui se bat actuellement contre le cancer, traverse actuellement des temps difficiles. Le Valaisan, qui a triomphé deux fois au Hahnenkamm et une fois au Lauberhorn, est considéré par beaucoup comme le roi de la fête dans les années 70. Mais Bernhard Russi, qui a remporté la descente olympique de Sapporo (Japon) en 1972 devant Collombin, relativise: «Je suis à peu près sûr d'avoir été plus souvent ivre que Roland au cours de ma carrière. Pas parce que je buvais particulièrement beaucoup d'alcool, mais parce qu'en tant que sportif sérieux, je ne supportais pas grand-chose!»
L'Uranais a connu l'une de ses plus violentes chutes en janvier 1977, en compagnie de Franz Klammer, son grand adversaire autrichien. «Avant la descente de Coupe du monde à Morzine, Franz et moi étions invités par la télévision romande à Genève. Après le passage à la télévision, j'ai disparu dans ma chambre d'hôtel. Mais comme je n'arrivais pas à m'endormir, j'ai commandé une bière au bar de l'hôtel. Soudain, Franz Klammer a fait son apparition au bar, où nous avons décidé de nous lancer ensemble dans la vie nocturne genevoise. Nous sommes sortis jusqu'à 5h du matin. Ensuite, je me suis senti si mal que j'ai dû me désister auprès de l'entraîneur pour le premier entraînement de descente à Morzine».
Mais lors de la course, Bernhard Russi s'est littéralement déchaîné. Après plus de 1000 jours sans victoire, l'Andermattois a fêté en France sa dixième et dernière victoire en Coupe du monde.
Les folles nuits olympiques de Bode Miller
L'Américain Bode Miller a remporté 33 victoires en Coupe du monde. De plus, ce surdoué polyvalent a été champion du monde en combiné, en slalom géant en super-G et en descente. Les seuls titres qui manquent à son palmarès sont ceux de Kitzbühel et des Jeux olympiques. Dans le cas de Bode Miller, Hans Knauss est certain qu'il a exagéré en ce qui concerne les soirées olympiques: «En 2006 à Turin, Bode a fait le tour des bars toutes les nuits. Une fois, il a affirmé dans la discothèque, en discutant avec moi, que sa génétique lui permettait de se contenter de trois heures de sommeil par jour. Mais à Turin, il n'a pas remporté de médaille, alors qu'il était dans une forme éblouissante lors des courses précédentes».
En revanche, Bruno Kernen a remporté la médaille de bronze en descente à Turin. Lors de sa fête des médailles, le Bernois de l'Oberland a ensuite fait une rencontre légendaire avec Bode Miller: «Tout à coup, Bode s'est retrouvé devant moi avec deux très belles femmes. Dans une main, il tenait une bouteille de vodka, dans l'autre un verre de whisky. Je lui ai dit: 'Bode, tu fais vraiment tout pour ne pas gagner de médaille ici'. Sa réponse: 'Si vous, les Suisses, étiez un peu plus décontractés, vous gagneriez beaucoup plus!'.»
Pendant les courses de Coupe du monde à Wengen, Bode Miller était un habitué du bar de Beni Scheiber, originaire de Bâle. «Il arrivait que Bode reste assis au bar jusqu'à 4h du matin la nuit précédant une course», raconte Beni Scheiber, qui poursuit en souriant: «Une fois, dans l'aire de départ, Bode - marqué par la vie nocturne - s'est penché sur ses bâtons de ski et s'est presque endormi. Il est alors venu me voir au bar et, contrairement à d'habirude, il a commandé un thé à la menthe. Après ça, il était vraiment en forme». Bode Miller a triomphé en 2007 sur la plus longue descente du monde.
Sevrage d'alcool sur l'alpage
La biographie de Dominik Paris prouve qu'à l'heure actuelle, on ne peut plus se permettre de faire des escapades régulières dans le ski de compétition. A 18 ans, le Tyrolien du Sud était sur le point de mettre un terme à sa carrière de skieur. «Dès l'âge de 16 ans, j'ai préféré les festivals aux salles d'entraînement. Et comme j'ai consommé trop d'alcool à cette époque, je n'étais soudain plus performant!»
Pour mieux résister à la tentation de la consommation excessive d'alcool avec ses copains, Dominik Paris a passé un été comme berger dans un alpage isolé du col du Splügen. C'est là qu'il a remis son corps en forme. Il n'a certes jamais gagné au Lauberhorn, mais, à 35 ans, il peut se targuer de quatre succès à Kitzbühel, de 22 victoires en Coupe du monde et de la médaille d'or en super-G des Championnats du monde 2019! A cette œuvre sportive de toute une vie, Dominik Paris, qui s'éclate en été comme chanteur du groupe de métal Rise of Voltage, peut au moins trinquer avec une petite bière.