Lorsque Christof Innerhofer a disputé sa première course de Coupe du monde, le 20 novembre 2006, lors du slalom de Levi (Finlande), Franjo von Allmen, originaire de l'Oberland bernois, n'était qu'un petit garçon de quatre ans. Entre-temps, le jeune homme, qui a grandi à Boltigen au pied du Jaunpass, est devenu une référence pour le champion du Tirol du Sud. Avec sa deuxième place au classement général de la descente en Coupe d'Europe, von Allmen s'est assuré une bonne place pour cette saison de Coupe du monde. Au Hyat-Bar à Beaver Creek, le jeune du Simmental et le vétéran italien se livrent à une conversation pleine d'humour.
Innerhofer: Franjo, as-tu travaillé comme boucher dans le passé?
Von Allmen: Non, pourquoi le penses-tu?
Innerhofer: J'ai lu qu'il existait des saucisse en hommage à tes résultats!
Von Allmen: C'est juste! Lorsque j'ai remporté trois médailles d'argent aux championnats du monde juniors en 2022, le boucher de notre village a inventé la «Silberblitz-Wurscht» en mon honneur. Mais j'ai appris le métier de charpentier.
Innerhofer: Alors nous savons tous les deux ce que signifie travailler dur. J'ai aussi été actif dans le bâtiment par le passé.
Von Allmen: Je suis très impressionné par toi. Le fait qu'à bientôt 40 ans, tu continues à réaliser des performances sportives aussi fortes est vraiment extraordinaire. Et je pense connaître une recette de ton succès.
Innerhofer: Laquelle?
Von Allmen: Je te trouve toujours très joyeux. Et c'est pourquoi je pense que tu peux rester aussi longtemps à un haut niveau, parce que tu apprécies vraiment le ski de compétition.
Innerhofer: J'ai des frissons quand tu dis ça. Et tu as raison. J'apprécie le fait de pouvoir continuer à faire ce que je préfère à plein temps. Je trouve formidable de pouvoir me mesurer à des garçons qui pourraient presque être mes enfants. La compétition contre les jeunes me maintient en forme. Pour moi, c'est aussi un peu une tentative d'arrêter le temps. Même si je suis conscient que cela ne marchera pas. Mais lorsque je suis assis ici avec toi, des souvenirs particuliers me reviennent d'avant ma première course à Beaver Creek en 2007.
Von Allmen: Qu'y avait-il de si spécial à l'époque?
Innerhofer: Je me souviens encore très bien de la fois où j'ai découvert la pente raide avec ton célèbre compatriote Didier Cuche et qu'il m'a conseillé de retourner les skis ici, avant la vague. J'étais d'avis que c'était beaucoup trop tôt. Didier m'a dit: «Bon, va tout droit, tu verras bien ce qui se passera!» Je suis content d'avoir finalement suivi son conseil! Grâce à ma curiosité, j'ai énormément appris des routiniers à l'époque, et grâce à eux, j'ai rapidement grandi. C'est pourquoi je te conseille vivement de demander des conseils aux coureurs plus âgés.
Von Allmen: Je ne l'ai pas fait souvent jusqu'à présent. De par ma nature, je suis plutôt réservé envers les personnes que je rencontre.
Innerhofer: Je vais te poser une question très importante: sais-tu combien de protéines tu consommes par jour?
Von Allmen: Non, aucune idée!
Innerhofer: Je connais très bien mon taux de protéines, car les protéines sont particulièrement utiles pour la récupération. Mais à ton âge, on se régénère encore plus vite.
Von Allmen: Cela dépend des cas. Quand je dois m'habituer à une nouvelle piste et à un nouvel environnement, comme ici à Beaver Creek, je dépense déjà plus d'énergie. C'est pourquoi j'ai aussi remarqué qu'il est important de se nourrir sainement. Mais je ne mange pas toujours sainement.
Innerhofer: Une chose m'intéresse particulièrement: à quoi penses-tu dans les cinq minutes qui précèdent le départ de la course?
Von Allmen: Avant d'entrer dans la cabane de départ, je visualise encore une fois la course mentalement. Dans le portique de départ, je me dis que je vais prendre beaucoup de plaisir pendant la course. J'essaie toujours de me rappeler que c'est un privilège de pouvoir pratiquer ce merveilleux sport et d'en avoir fait ma profession.
Innerhofer: Dans mon cas, c'est toujours lorsque j'étais vraiment en colère au départ que cela a le mieux fonctionné. Comme en 2013 au Lauberhorn !
Von Allmen: Qu'est-ce qui t'a mis en colère à ce moment-là?
Innerhofer: Quelques heures avant le départ, mon coéquipier Peter Fill a affirmé que ma petite amie sortait avec un autre homme. Après cela, j'ai commencé la course de manière si agressive... L'affirmation de Peter m'a mis en colère et m'a poussé. Après la traversée du Brüggli-S et du tunnel, je me suis dit: «Maintenant, je vais montrer à ma copine qui est le chef!» Et j'ai gagné la course.
Von Allmen: Cela ne fonctionnerait pas pour moi. Je dois faire redescendre mes émotions au départ. Si je suis trop chargé et que j'en veux trop, je fais trop d'erreurs.
Innerhofer: Combien de chaussures de ski as-tu sur toi?
Von Allmen: Deux paires. Mais je n'ai besoin que d'une paire. Je n'ai les autres chaussures qu'au cas où quelque chose se casserait sur mon modèle préféré.
Innerhofer: Cela ne suffirait jamais, j'ai sept paires dans mes bagages pour être vraiment équipé pour toutes les conditions. Parfois, j'ai même voyagé avec onze paires de chaussures.
Von Allmen: Si j'avais autant de chaussures à choisir, je ne saurais pas comment faire!
Innerhofer: Je peux te comprendre... J'ai parfois trop réfléchi dans ce domaine. C'est pourquoi je n'ai plus que sept paires au lieu de onze... Mais j'aimerais encore te donner un dernier conseil.
Von Allmen: Lequel?
Innerhofer: Le sexe avant la course, ce n'est pas bon!
Von Allmen: Sérieusement?
Innerhofer: Je suis très sérieux. Je ne vais pas m'entraîner des milliers d'heures pour ensuite gaspiller une énergie précieuse en faisant l'amour un jour avant la compétition. Mais après la course, il est important de faire des bêtises. Je l'ai fait suffisamment pour pouvoir vraiment bien déconnecter. De toute façon, j'ai toujours suivi mon propre chemin. Quand je suis apparu dans le journal en sous-vêtements pour mon sponsor, beaucoup se sont demandé: «Innerhofer est-il complètement fou?» Mon entraîneur m'a dit qu'il n'était pas du tout d'accord. Mais cela m'était totalement égal.
Von Allmen: Pour les publicités pour les slips, il faudrait que j'améliore un peu mon corps.
Innerhofer: Ça va venir, cher Franjo!