Loïc Meillard est heureux de revenir sur les pistes de son enfance. Il observe, avec toujours la même admiration, la vue sur les montagnes valaisannes. Comment ne pas être ébahi par ce paysage à couper le souffle. Puis, le skieur se retourne et fait travailler notre imagination. «Là, c'est la cabane d'arrivée», nous explique-t-il en pointant du doigt un édifice.
Car nous ne sommes pas n'importe où. Nous nous situons dans la station de Thyon-Les Collons, juste au-dessus d'Hérémence, là où Loïc Meillard a skié dans sa jeunesse. La météo – bien que maussade pour un mois de juin – n'est pas non plus catastrophique. Comme on dit par ici, il n'y a pas un pet de neige et donc, s'imaginer le tout jeune Loïc dévaler ces pistes n'est pas évident.
Évidemment, pouvoir se poser durant 90 minutes en toute tranquillité avec un skieur n'est pas possible quand le manteau blanc a recouvert la station valaisanne. À ce moment, Loïc Meillard est aux États-Unis, en Suède ou, au plus proche, à Adelboden (BE). Mais que très rarement en Valais. «Ça peut arriver que pendant un mois et demi, je ne mette pas les pieds ici, explique-t-il. Si au total, je passe deux semaines ici, c'est un très bon hiver de ce point de vue.»
Le ski plaisir avant toute chose
Pourtant, l'histoire du skieur ne débute pas dans le canton alpestre. Plutôt dans celui de Neuchâtel. C'est là qu'il y naît le 29 octobre 1996. Deux ans plus tard, il devient le grand frère de Mélanie (nous en reparlerons) et… met les skis aux pieds pour la première fois de sa vie. Là où nous nous retrouvons? «Pas cette piste-là exactement, en rigole Loïc Meillard. En haut, c'est bien raide.» Ses premières pentes, il les a donc dévalées entre Neuchâtel et le Valais.
Évidemment, le skieur de 27 ans ne se souvient pas de cet hiver 1998, cette grande première. «Mon premier souvenir, c'est plutôt quand je skiais ici pour le plaisir avec mes parents, pendant les vacances, se remémore-t-il. Quand je mettais les skis, je ressentais de la liberté, du plaisir. J'avais le choix de faire ce que je voulais selon mes envies… et les conditions. Passer du temps en famille sur la neige, c'est ça qui me plaisait le plus.»
Et c'est vrai que pour les parents Meillard, enseigner le ski à leurs enfants sonnait comme une évidence, eux qui étaient moniteurs dans ce sport. «Ils ont voulu nous faire goûter à ce qu'ils aimaient, nous confie Loïc. Par contre, au niveau compétitif, on a toujours été très libre. Moi-même au début, j'étais assez récalcitrant… jusqu'à ce que j'y prenne goût et que j'ai envie d'y aller (sourire).»
De Neuchâtel à Hérémence
Jusqu'en 2008, la famille neuchâteloise vient très régulièrement dans l'appartement qu'elle possède à Hérémence. «C'était l'escapade du week-end et des vacances», se souvient, sourire aux lèvres, Loïc Meillard. Sauf qu'il a depuis rejoint le ski-club local et les trajets deviennent longs. «J'ai commencé à m'entraîner durant la semaine. Ça faisait beaucoup d'aller-retour depuis Neuchâtel.»
Lorsque Carine et Jacques Meillard proposent à leurs enfants de déménager définitivement dans les Alpes valaisannes, la réflexion n'est pas longue pour le frère et la sœur. «On a directement dit oui, se rappelle Loïc. En fin de compte, ça s'est fait naturellement.» L'intégration à Hérémence n'en a jamais vraiment été une puisque la famille avait des contacts grâce au ski-club. «On n'arrivait pas dans un monde inconnu, précise le fils. Même à l'école, on connaissait beaucoup de monde. On ne repartait pas à zéro.» Plus précisément, c'est au cycle d'Euseigne que le néo-Valaisan a débuté ses études dans son nouveau foyer.
En Valais, Loïc Meillard est épanoui. «Ce que j'ai préféré, c'est de pouvoir participer à tous les entraînements avec l'équipe, souffle-t-il. À Neuchâtel, on en ratait parfois un. Ici, les coachs venaient nous chercher à l'école et on partait s'entraîner l'après-midi. Ce sont de beaux souvenirs.»
Pourtant, rejoindre le ski-club n'était pas une évidence quelques années plus tôt pour le jeune Loïc. «Mon papa m'a posé plusieurs fois la question et je répondais toujours non, nous confie-t-il. Un jour, il m'a dit d'aller au moins tester le concours interne et que, si ça ne me plaisait pas, il n'y avait aucun souci.» Résultat des courses: il rentre le soir à la maison et annonce à ses parents qu'il a entraînement le lendemain.
En parallèle du ski, Loïc Meillard entame un apprentissage d'employé de commerce à la banque Raiffeisen de Vex. Avec des horaires adaptés? «Non, un apprentissage tout à fait normal, à 100%, répond-il. Mais j'ai eu de la chance car ils m'ont beaucoup soutenu et me laissaient partir quand j'en avais besoin.» Et au niveau des cours, le skieur parle de l'importance de l'organisation et d'un bon coup de main des camarades de classe pour les notes – «ce qui était important, voire crucial».
Des étoiles dans les yeux pour sa première
Au niveau du ski également, il gravit les échelons. «À cette époque, je me dis que c'est un rêve, mais qui semble encore tellement loin», avoue-t-il. Dans cette quête, Loïc Meillard peut aussi compter sur un soutien très proche: celui de sa sœur, également skieuse professionnelle. «Je ne sais pas si on s'est tirés vers le haut car le niveau n'était pas toujours le même, mais on a en tout cas toujours pu s'entraider. On discute du ski, mais aussi de la vie en général», développe l'aîné.
En janvier 2015, c'est un début de consécration pour Loïc Meillard. Il participe à sa première épreuve de Coupe du monde, devant ses proches, à Adelboden. «À ce moment, j'avais des étoiles dans les yeux, avoue-t-il. J'étais complètement dépassé par les choses. Mais c'était une superbe expérience.» Serein, le Valaisan ne s'enflamme pas à l'époque. «La prochaine étape, c'était de rejoindre le top 30. Et une fois que c'est fait, on en veut toujours un peu plus.»
Car au début de sa carrière dans l'élite, Loïc Meillard a rapidement une énorme pression sur les épaules. De nombreuses personnes le considèrent comme le futur Marcel Hirscher, skieur qui a remporté à huit reprises le classement général de la Coupe du monde. Comment l'a-t-il vécu? «Je dirais que c'est du blabla de journalistes, en rigole le principal intéressé. À la fin de cette saison, on m'a comparé à Stan Wawrinka. Et dans deux ans, ce sera peut-être quelqu'un d'autres. On peut toujours tirer des parallèles mais moi, je fais mon chemin, ma carrière et je suis heureux ainsi.»
La comparaison avec le tennisman n'est toutefois pas absurde. Car, de la même manière que le Vaudois avait Roger Federer, Loïc Meillard doit faire face à un monstre de l'histoire du ski: le Nidwaldien Marco Odermatt. «Mais je ne suis pas frustré de skier en même temps que lui, tempère Loïc Meillard. C'est avec ce genre de personne que le sport avance.»
Une autre passion: la photographie
Le Valaisan n'a pourtant pas à rougir de ses prestations. La saison dernière, il était le dauphin de l'intouchable «Odi» au classement général. «J'aurais ri au nez de tous ceux qui m'auraient dit ça en milieu de saison», sourit le skieur, en référence à son début d'exercice compliqué.
Gentiment, le temps imparti pour notre entretien arrive à son terme. Extrêmement sympathique du début à la fin, Loïc Meillard se prête volontiers au jeu du shooting photo – un exercice aisé pour lui. Pendant qu'il se fait tirer le portrait sur de vieux skis et en équilibre sur un caillou, il discute avec plaisir d'ISO, d'ouvertures et d'objectifs avec notre photographe. Car outre le ski, le Valaisan d'origine Neuchâteloise a une autre passion: prendre des clichés. Et au vu de son Instagram, il semble autant talentueux que sur les skis.