Michael Schär est cycliste professionnel depuis 14 ans et participe cette année au Tour de France pour la onzième fois.
Cette édition sort de l'ordinaire. Stupéfait, le Suisse explose en évoquant les nombreux accidents qui ont rythmé ce début mouvementé de la Grande Boucle: «Je n'ai jamais vécu ça». Il y a bien sûr eu des chutes malencontreuses, pas uniquement à cause de l'inconscience de supporters. Toutefois, la plupart des accidents ont été provoqués par le peloton lui-même.
«Rien que dans mon équipe, on dénombre 14 chutes dans la première étape. Certains cyclistes sont tombés trois fois. C'est complètement fou», a déclaré Michaël Schär. Lui-même est tombé et s'en est sorti avec une entorse cervicale grâce à un atterrissage plus ou moins en douceur dans l'herbe.
Le cycliste est en colère. «On ne peut pas continuer comme ça, il faut que les choses changent.» Le professionnel d'AG2R assène avec fermeté: «Il faut interdire la radio au plus vite!».
Des coureurs télécommandés
En effet, c'est l'oreillette qui garantit un lien direct entre le coureur et son directeur sportif qui est selon lui responsable de ces drames à répétition. Chaque directeur de 180 coureurs commente la course à l'arrière du peloton. Assis dans une voiture, il suit le parcours sur une tablette, écoute la radio officielle du Tour, observe la piste et détermine la stratégie de l'équipe. Mais surtout, il n'arrête pas de jacasser avec ses coureurs, dénonce Michael Schär. «Beaucoup d'entre eux parlent sans arrêt. Leur stress se transmet au peloton.»
Il en résulterait que les coureurs, en particulier les jeunes, sont distraits et commettent des erreurs provoquant des accidents. «Trop de coureurs roulent sur la route comme des poulets sans tête. La pression sur leurs épaules est énorme: on leur assène constamment de rouler en tête. Et ils se laissent téléguider au lieu d'étudier la piste avant la course.»
Les superstars sont silencieuses
Pour le cycliste, il est clair que les courses de vélo sans radio - comme aux Jeux olympiques et aux championnats du monde de cyclisme - sont plus sûres. «En cas de danger, les cyclistes peuvent nous avertir à l'aide de drapeaux jaunes, comme au Tour de Suisse. Ce système fonctionne parfaitement.» Les courses pourraient également être plus intéressantes. «Parce qu'il y aurait moins de robots, et plus de coureurs qui se fient à leur intuition.»
Michaël Schär va écrire une lettre à l'Union Cycliste Internationale, l'UCI, pour lui faire part de sa demande. «Je ne suis pas le seul à vouloir abolir la radio. La majorité des cyclistes le feraient s'ils le pouvaient», affirme-t-il. Y aura-t-il du changement? Le coureur ne se fait pas d'illusions. «Ce serait bien qu'une superstar comme Roglic ou Alaphilippe s'exprime. Mais ils sont absorbés par leurs propres problèmes.»