J-35: c'est le 20 novembre que sera donné le coup d'envoi de la Coupe du monde de football. Une affiche Qatar — Équateur qui n'est pas des plus emballantes et qui correspond à l'atmosphère générale autour du tournoi. Comme l'annonçait Blick il y a une semaine, seule la moitié du contingent de billets disponible pour les supporters suisses a été vendue.
Et ce n'est pas le seul signe de l'indifférence générale autour de cette édition de la plus prestigieuse des compétitions. Un signe ne trompe pas: même les fameuses vignettes Panini ne font pas recette cette année. Ezio Bassi, responsable de l'entreprise pour la Suisse, confirme l'impression de nombreux kiosquiers: «Nous n'atteindront pas les chiffres de la dernière Coupe du monde», reconnaît-il.
Le manager général de l'entreprise confesse une baisse «de quelques pourcents». Valora, qui exploite de nombreux kiosques partout en Suisse, évoque aussi un début de vente «bien plus modéré que les tournois passés». Les vignettes Panini s'y vendent à 1,10 franc pour cinq images.
Le Qatar, un pays sans culture du football
Le phénomène est un bon indicateur, car nulle part ailleurs dans le monde la population ne collectionne autant d'images que dans notre pays, explique Panini. Aussi bons collectionneurs que soient les Suisses, une Coupe du monde de football au Qatar est difficile à accepter, avance Ezio Bassi.
L'homme n'est pas surpris par cette réticence. Voilà des années que les critiques pleuvent à l'encontre de l'émirat du Golfe: charia en vigueur, homosexualité punie par la loi et situation précaire au niveau des droits de l'homme. Le «Guardian» a méticuleusement documenté les problèmes au niveau de la construction des stades, avec des ouvriers migrants qui ont dû faire face à la chaleur du désert et un traitement parfois scandaleuse. Et la Coupe du monde a lieu hors des vacances dans un pays sans culture de football.
À ce niveau, la Coupe du monde est dans une série négative, souligne le manager né à Côme, non loin du Tessin. Les deux précédentes éditions — au Brésil et en Russie — avaient aussi fait l'objet de polémiques et d'appels au boycott. Il estime donc que la baisse des ventes de vignettes n'est pas qu'imputable au Qatar, mais reflète aussi l'augmentation du coût de la vie. «De nombreuses familles sont plus prudentes en raison de l'inflation», avance-t-il. Valora, pour sa part, estime que c'est le fait que le tournoi se déroule en hiver qui est le plus grand motif explicatif.
Des sponsors de la Nati boycottent
Certains sponsors de l'équipe nationale suisse feront eux aussi l'impasse, au moins partiellement, sur le Qatar. L'entreprise horlogère Carl F. Bucherer, qui «voyage volontiers et soutient l'équipe nationale lors de ses matches», a décidé cette fois de ne pas se déplacer avec des invités au Qatar. Et Volkswagen Suisse a aussi fait savoir qu'elle ne ferait pas usage de son droit de prélocation des billets. L'entreprise automobile avait déjà renoncé à la Russie, il y a quatre ans.
Également sponsor de la Nati, Swiss fait preuve d'une certaine retenue diplomatique. Le groupe explique simplement qu'il ne dispose pas d'un contingent de billets et qu'il ne se rend pas régulièrement au Qatar. Les vols vers Dubaï seront simplement prolongés vers Doha durant deux jours en décembre.
Du côté de Puma, le processus interne pour une attribution de billets «est toujours en cours», répond l'entreprise. Le sponsor de la Nati ne semble pas prendre le chemin d'un boycott comme plusieurs autres. «L'intérêt est au rendez-vous comme pour les autres gros événements sportifs», nous répond l'équipementier depuis sa centrale en Allemagne.
Credit Suisse fidèle au Qatar
Enfin, quid du sponsor principal, Credit Suisse? «Nous soutenons les équipes nationales de football lors de tous les tournois», fait savoir le groupe bancaire. Qu'est-ce que cela signifie? «Les détails concernant les activités dans le cadre de ce partenariat ne sont pas communiqués», répond l'entreprise.
Il ne fallait pas vraiment s'attendre à une critique directe du Qatar de la part du géant financier. Après tout, Credit Suisse appartient lui aussi à l'émirat: le fond souverain détient 5% des actions du No 2 bancaire de notre pays. «Du pain et des jeux», aurait-on dit dans la Rome antique.