Depuis la grande terrasse qui mène à l’entrée principale de la nouvelle patinoire, on peut voir la Valascia. Si vous regardez de l’autre côté de l’aérodrome, vous apercevez le toit brun incurvé de l’ancienne arène. Là-bas, elle se blottit contre le flanc de la montagne, sur la trajectoire des avalanches qui auraient pu dévaler du Pizzo Massari mais ne l’ont jamais fait.
Il n’y a qu’une seule Valascia
Le moment est donc venu: la mythique enceinte n’est plus qu’une coquille vide. La nouvelle patinoire ne s’appellera pas «La nouvelle Valascia», affirme fermement le directeur sportif Paolo Duca. «La Valascia est là-bas, et il n’y en a qu’une». Le dirigeant sait de quoi il parle, lui qui a vibré en tant que joueur dans ce cadre unique.
Paolo Duca n’avait certainement pas le temps pour des réminiscences larmoyantes samedi, soir d’une inauguration marquée par un large succès contre Fribourg (6-2). Le directeur sport est autant sollicité qu’un chef de chantier ou un contremaître (il y a un mètre pliant dans la poche de son pantalon cargo). Quelques jours avant ce premier match, tout était encore en chantier à l’extérieur comme à l’intérieur. Il faudra encore un moment pour terminer les finitions. Des armées d’ouvriers s’affairaient à préparer la patinoire pour le début de la saison. La glace brille, le cube vidéo est installé, les sièges sont en place. Le reste suivra. Quand la construction sera-t-elle complètement terminée? «Peut-être en novembre ou décembre», se projette Paolo Duca.
Des sièges recyclés à la boutique
Juste à côté de l’entrée principale, une porte mène à la boutique du club, qui fait sensation avec des sièges verts sur les murs. Ces derniers viennent de la Valascia, évidemment. Ils sont désormais utilisés comme supports pour les différents produits vendus. Une idée intelligente. Les sièges rouges de la tribune principale seront bientôt (ou un peu plus tard) remis aux détenteurs d’abonnements, qui ont passé des années à les réchauffer avec leurs fesses.
Des efforts sont faits pour conserver un peu de l’esprit de la Valascia dans la nouvelle patinoire. Ce n’est pas facile. Comment transporter l’âme d’une infrastructure, si tant est qu’elle existe? En plus des sièges, une partie du bois situé devant l’ancien virage sud a été polie pour constituer le bar de la nouvelle loge.
Des loges dans l’arène d’Ambri-Piotta? Cette patinoire moderne marque le début d’une nouvelle ère dans la vallée léventine. Il y a même un espace bien-être avec des douches spacieuses, un sauna et une salle de sport.
La «Curva Sud» est à l’ouest
Et où est passée l’âme de la Valascia? Elle revient quand le public est là. Les supporters du kop comme tous les autres. La «Curva sud» est désormais installée à l’ouest de la patinoire, mais elle reste la «Curva sud». «Quand on emménage dans un nouvel appartement, on ne change pas de nom», dit sèchement Paolo Duca. Touché. Les ultras léventins sont bien plus qu’une simple appellation géographique. La Valascia a toujours été et sera toujours les personnes qui la peuplent. La Montanara – l’hymne historique du club tessinois – que le public a entonné samedi donnait des frissons.
L’équipe, les fans et les spectateurs, les durs à cuire sont les mêmes que dans la Valascia, même 600 mètres plus loin sur l’ancien aérodrome. Pour certains, ils évoqueront la belle époque et feront remarquer que tout était mieux là-bas. Mais les rampes des nouvelles tribunes sont tout aussi abruptes et arrivent aussi jusqu’à la surface de la glace. Cette arène moderne ne fera pas perdre ses moyens au petit club des montagnes tessinoises, au contraire. Cet écrin transportera la région, le club et ses fans vers l’avenir. Comme une machine à remonter le temps.
Un peu de mélancolie est naturelle, bien sûr, mais cette part de confort n’est plus un luxe, même pour Ambri. C’est désormais devenu une condition sine qua non pour que le club prospère dans le hockey moderne. Les toilettes étaient rares et la buvette trop exiguë dans l’ancienne Valascia. Tout le contraire désormais.
En attendant de porter le nom d’un sponsor
Juste à côté de l’entrée principale se trouve un restaurant qui sera un jour ouvert sept jours sur sept. Un regard sous le toit rappelle l’ancien domicile de l’équipe biancoblù. Une construction en arc de cercle a également été choisie pour le nouveau toit, par le célèbre architecte Mario Botta. À l’étage supérieur, côté est, les généreuses fenêtres permettent de jeter un coup d’oeil sur l’extérieur. Seul le vent ne siffle plus dans le bâtiment, mais les joueurs s’en passeront volontiers (surtout lorsque les températures seront négatives).
Et puis, les supporters d’Ambri-Piotta ont rendu un dernier hommage à la Valascia samedi. Les tifosi ont dit au revoir à l’ancienne «Pista» avant d’entamer une procession vers la nouvelle patinoire. Un stade de glace qui s’appelle pour l’instant «arène multifonctionnelle», en attendant de trouver un sponsor. Bien avant le premier lâché de puck contre Fribourg, le virage sud a chanté sa fierté. Les Léventins ont gagné leur premier match dans cette nouvelle arène avec dynamisme et passion. C’était écrit.