Sur le papier, l'arrivée de Pierre-Edouard Bellemare au HC Ajoie est un coup retentissant. L'international français débarque en effet avec un CV à faire pâlir la quasi-totalité des joueurs du championnat de Suisse. Ses 39 ans ont-ils refroidi les autres clubs? Comment se retrouve-t-il à Porrentruy? Et dans quelle forme? Le plus simple est de lui poser la question. Interview avant de prendre l'avion pour venir en Suisse.
Pierre-Edouard, cette signature en a surpris plus d'un. Raconte-moi comment on en est arrivé là.
Disons que ce n'est pas un seul facteur qui m'a décidé. C'était une décision dans laquelle plusieurs facteurs devaient être pris en compte. Ma femme, mes enfants, la destination, les conditions. Bref, c'est un ensemble de choses mises bout à bout qui ont fait que la décision de signer au HC Ajoie s'est faite naturellement.
J'imagine que tu avais d'autres offres.
Oui et en un sens, cela m'a aidé à me décider.
Comment ça?
Mon équipe en Suède, Skellefeteå avec qui j'ai joué entre 2009 et 2014, m'a dit que je pouvais les rejoindre directement si je décidais de rentrer en Europe. Et finalement, qu'une équipe aussi forte me veuille, c'est quelque chose qui te réconforte dans tes aptitudes et dans ma discipline ainsi que ma culture du hockey. Mais c'était justement là que le choix est devenu plus difficile. C'était finalement la Suisse ou la Suède.
Et comment on en arrive à choisir la Suisse, avant de parler du HC Ajoie juste après?
Depuis le début de ma carrière, avec ma femme, on prend notre décision ensemble. En NHL durant 10 années, j'ai toujours eu la chance d'avoir un bon nombre d'offres lorsque que je me retrouvais sans contrat. Cela fait que nous pouvions prendre une décision basée sur le hockey, ma carrière, les chances de gagner la Coupe, l'argent évidemment, mais surtout au niveau familial. C'était la même chose ici. Mais pour moi, l'aspect central a toujours été le même: si j'ai l'impression de ne plus rien apprendre, j'arrête ma carrière.
Que vas-tu encore pouvoir apprendre?
On ne va pas se mentir. Durant les dix dernières années et mon départ de Suède pour la NHL, j'ai tout de même eu un rôle assez bridé. J'ai dû oublier tellement d'aspects du jeu pour me faire ma place. Et je ne m'en plains pas. J'ai eu du plaisir, surtout que j'ai eu la chance de faire partie des joueurs dont on se dit «lui, on peut en avoir besoin pour avoir du succès». Mais je me réjouis de me prouver à moi-même que je suis capable de jouer un autre style de jeu.
Et Ajoie, dans tout ça?
C'est une région qui parle français et pour moi, c'était un point très attractif. Mes enfants parlent suédois et anglais couramment et la seule langue qu’ils ne possèdent pas, c’est le français. Lors d'une saison de NHL, j'étais absent de la maison 120 jours sur 190 et n'ai que peu la chance d'être avec eux. Ma femme leur parle couramment suédois. Même s'ils sont un peu inquiets de se retrouver dans une nouvelle école exclusivement en français, ils sont habitués à déménager. Pour eux, ce sera une belle expérience.
Dans quel état d'esprit as-tu passé ces derniers mois sans avoir de club?
Je suis quelqu'un de très exigeant avec moi-même. J'ai participé à la qualification olympique avec l'équipe de France et je n'ai eu aucun problème à me lever tous les jours à 5h45 pour faire ma musculation avant de trouver de la glace pour patiner tous les jours. Après le tournoi international, j'ai continué sur le même rythme et ai pris part à un essai du côté de Colorado. Le 3 octobre, ils m'ont annoncé que je n'avais pas été conservé.
Ils t'ont donné une explication?
Oui et ce n'était rien contre moi. Mais pour me conserver, ils auraient dû se séparer de joueurs plus jeunes et ce n'était pas dans leur intérêt. J'aurais préféré que l'on me dise que je suis nul (rires). À cet instant, il y a eu de l'intérêt de la part d'autres équipes de NHL, mais tout le monde me demandait de patienter. Avec ma mentalité, ce n'est pas vraiment possible, surtout que cela faisait désormais un petit moment que j'attendais.
Et donc c'est Julien Vauclair, directeur sportif d'Ajoie, qui prend contact avec toi? Ou comment cela se passe?
Non. Boris Gellé, le chef mat’ d'Ajoie et de l'équipe de France, m’avait parlé pendant le dernier Mondial afin de savoir ce que je voulais faire après. Vu mon âge, il se disait peut-être que j'allais vouloir arrêter. Mais il m'a demandé la permission de donner mon numéro à Julien. J'ai accepté, mais j'ai également dit que je n'en saurais rien avant octobre. Et lorsque j'ai été relâché par Colorado, on s'est posés avec femme. J'avais l'impression d'être en train de me surentraîner. J'avais trop envie de jouer. C'est pour cela qu'à ce moment les discussions avec Julien ont commencé à prendre tout leur sens. Ce d'autant plus qu'entre le 18 et le 28 octobre, il y avait les relâches à l'école de mes enfants.
Tu arrives avec quel état d'esprit à Ajoie? Peur de te retrouver dans une équipe du bas de tableau?
Pas spécialement peur, non. Mais c'est sûr que c'est une situation différente de ce que j'ai connu durant de nombreuses années dans ma carrière. Que ce soit à Skellefteå en Suède ou en NHL, j'ai souvent joué dans des équipes évoluant dans le haut de tableau. Mon but, c'est de faire le plus rapidement possible partie du groupe. Car, lorsqu'un joueur arrive en cours de saison, cela change certaines choses. Admettons que je joue sur une deuxième ligne, cela pousse peut-être un autre gars en troisième et un de troisième en quatrième. Il faut que la cohésion du groupe soit bonne pour que cela se passe bien. C'est ce qui me fait le plus peur.
Dans quel sens?
Je ne veux pas être une distraction plutôt qu'un maillon positif. Même si les résultats ne sont pas à la hauteur, il y a une cohésion et je ne veux pas que tout s'éclate à cause de moi. Je ne viens pas pour ma pomme, mais je viens pour aider l'équipe. Si je ne marque pas, mais qu'on gagne grâce à un tir bloqué par moi-même, je serai content.
Tu as parlé avec Kevin Bozon et Thomas Thiry, tes coéquipiers en équipe de France au moment de choisir?
J'ai parlé avec 'Titi' et nous nous sommes écrits avec 'Kéké'. Je leur ai fait part de ma crainte d'être une distraction. Plus que sur l'aspect du jeu, j'ai demandé comment était l'endroit, car je suis parti depuis un certain temps de l'Europe. J'ai joué à Leksands et Skellefteå. Ma femme vient de Borlänge, une autre petite ville. Ce n'est pas un souci pour nous. Et j'ai l'habitude de ne pas être proche de tout. La saison dernière à Seattle, il me fallait 50 minutes sans trafic pour rejoindre la patinoire.
Tu seras à disposition du coach pour le match de reprise la semaine prochaine?
Je voyage mercredi, donc j'espère bien. Ça fait trop longtemps que je n'ai pas joué. Je n'ai pas le temps de rater un match de plus (rires).
Équipe | J. | DB. | PT. | ||
---|---|---|---|---|---|
1 | Lausanne HC | 31 | 12 | 59 | |
2 | ZSC Lions | 28 | 31 | 58 | |
3 | HC Davos | 32 | 25 | 58 | |
4 | SC Berne | 31 | 18 | 55 | |
5 | EHC Kloten | 32 | -1 | 54 | |
6 | EV Zoug | 30 | 20 | 49 | |
7 | SCL Tigers | 30 | 4 | 44 | |
8 | EHC Bienne | 30 | 2 | 42 | |
9 | Rapperswil-Jona Lakers | 32 | -11 | 42 | |
10 | HC Ambri-Piotta | 31 | -18 | 41 | |
11 | HC Fribourg-Gottéron | 31 | -12 | 39 | |
12 | Genève-Servette HC | 28 | -3 | 36 | |
13 | HC Lugano | 30 | -23 | 36 | |
14 | HC Ajoie | 30 | -44 | 26 |