Actuellement, Craig MacTavish est toujours dans la région lausannoise. Pourtant, rien ne l'y retient. Surtout depuis le 19 mai et l'annonce de la non-reconduction de son contrat par le Lausanne HC après une saison seulement. Mais le Canadien de 62 ans n'a pas quitté les bords du Léman. C'est à quelques pas de chez lui, dans l'Est lausannois, qu'il a accepté de revenir sur cette situation ubuesque. D'un côté, le club annonce ne pas prolonger son contrat arrivé à échéance pendant que lui, pour sa part, revendique un bail de trois ans avec la formation de la Vaudoise aréna.
Dans les colonnes de 24 Heures, Petr Svoboda, l'un des propriétaires du club et également directeur du département hockey, a d'ailleurs été très clair sur le sujet: «Je ne vais pas entrer dans les détails de cette affaire publiquement. C’est entre Craig et moi. Mais croyez-moi, il n’y a eu qu’un seul contrat de signé: un contrat d’un an. Il y a eu des négociations pour un bail plus long, mais on ne les a pas finalisées.» Pour justifier la décision de ne pas le conserver, il a argué d'un manque de leadership. «J'ai senti que ce n’était pas MacTavish qui pourrait emmener l’équipe où on désire l’emmener dans le futur.» Une phrase qui fait sourire Craig MacTavish: «C'est peut-être le seul point sur lequel nous étions d'accord. Il y avait un manque de leadership. On n'était juste pas d'accord sur l'origine de cette lacune.»
En 2020, c'est Ville Peltonen qui avait lancé une procédure contre le club de la Vaudoise aréna. Aujourd'hui, le prédécesseur de MacTavish n'en a pas encore terminé et l'affaire est même toujours inscrite aux poursuites de la ville de Lausanne. Craig MacTavish, lui, va-t-il suivre le même chemin?
Pourquoi décider de parler désormais après avoir été discret depuis l'annonce de votre départ?
Craig MacTavish: Je tiens à préciser que je ne voulais pas que tout ceci soit public. Mais j’ai le sentiment que je dois répondre sur certaines choses erronées qui ont été dites sur moi ainsi que sur la manière dont j'ai géré mon équipe. Honnêtement, j'en ai marre de ne rien dire et de laisser Petr Svoboda parler librement sur les gens. Et je vais continuer de répondre si nécessaire. Il y a deux aspects importants que je tiens à rectifier. Tout d'abord, l'idée que je puisse avoir signé un contrat d’un an est totalement fausse. Depuis que je suis arrivé à Lausanne, je n'ai signé qu'un seul document à deux reprises. C'était un papier concernant l'immigration. J'en ai paraphé un lors de mon arrivée et un second en juillet pour étendre la validité du précédent. À aucun moment il ne s'agissait d'un contrat de travail. Pour moi, il m'est absolument impossible d'imaginer qu'il puisse avoir imaginé que c'en était un.
Mais aviez-vous un contrat?
En août dernier, nous avons trouvé un accord pour trois ans. Je n'ai même pas eu à négocier quoi que ce soit. Sa première offre m'a parfaitement convenu. D'ailleurs, durant toute la saison dernière, j'ai été payé exactement le montant que nous avions discuté pour la première des trois années. Je n'arrive pas à m'expliquer la genèse de cette histoire de contrat d'une année.
Avez-vous eu ce contrat en votre possession?
Non. Depuis ce jour, j'ai essayé de l'obtenir. Il y avait à chaque fois quelque chose qui bloquait. Pas de problème à proprement parler, mais toujours des problèmes et autres petits détails à régler. Rien de franchement grave.
Et puis?
Et puis la saison s'est déroulée jusqu'au 5 mai 2021, date à laquelle j'ai eu un meeting avec lui et il m'a viré. Vous vous doutez bien de ma première question à cet instant.
Vos deux années de contrat restantes?
Bien sûr. C'est logique. Il m'a dit qu'il n'y avait pas encore pensé et m'a demandé mon avis. Je lui ai dit que j'exigeais le paiement de ces deux années. Il m'a dit qu'il allait sorti de la pièce pour réfléchir. Il est revenu avec une offre. 300'000 francs nets pour mettre fin à tous nos rapports. En entrant dans cette salle, j'avais fixé une limite inférieure et cette offre se situait à cette limite. Je savais que ce n'était pas un deal fantastique pour moi, mais je voulais surtout pouvoir aller de l'avant. On est tombés d'accord et j'attends depuis ce jour les papiers des avocats afin de pouvoir commencer un nouveau chapitre.
Rien n'est venu?
Non, rien. Depuis je l'ai pressé chaque jour. Des messages, des téléphones. Il me dit mettre la pression sur les avocats. Honnêtement, j'ai commencé à me dire que c'était vraiment étrange car il ne s'agissait pas là d'une affaire bien compliquée. Le 17 mai, nous nous sommes parlés. Il m'a dit qu'il aurait un meeting du comité le lendemain et qu'il savait ce qu'il aurait à faire. Je lui parle donc juste après. Et là, il me dit qu'il n'y a plus de deal. Que l'offre n'existe pas. Je vous laisse imaginer comment la discussion a évolué...
Mais ce contrat, pourquoi ne pas l'avoir exigé?
Je lui ai couru après jusqu'en décembre. A cette époque, je me suis dit que cette chasse était futile. J'avais alors deux choix. Menacer de quitter l'équipe ou mettre cette distraction derrière moi et régler mes affaires après la saison. Comme il était exclu que j'abandonne le groupe, j'ai pris la décision d'arrêter de ne pas lui courir après.
Cette équipe, justement, beaucoup de choses ont été supposées sur les ingérences de Petr Svoboda dans votre vestiaire. Qu'en est-il?
Avant tout, je voudrais réagir aux propos concernant la performance du coaching staff qui ont été remises en cause. Car tu ne vires pas un coach sans raison. Et j'ai l'impression que les gens en place n'ont absolument pas de quoi être embarrassés par le travail effectué. C'est en tout cas ce que je ressens. Pour moi, c'est un environnement difficile. Je n'avais pas un allié dans cette organisation hormis peut-être Leo (ndlr Girod, le coach vidéo parti depuis à Berne) et Kevin Ryan (ndlr licencié depuis). Les autres étaient tous des gens mis en place par Petr. Mais malgré cela, nous avons pu avancer tant bien que mal malgré les ingérences.
Il y en a donc eu?
Ha oui absolument. Mon plus grand regret est d'en avoir accepté certaines. Pas toutes, mais certaines quand même. Je vous assure, c'était chaotique. Quiconque connaît un peu le hockey et possède un Q.I. de plus de 23 sait que coacher est extrêmement difficile. Surtout si tu ne disposes pas de tous les outils et que tu n'as pas une complète autonomie sur tes décisions et ton alignement. C'est d'autant plus difficile lorsque tu ne contrôles pas le dialogue avec tes joueurs comme c'était le cas ici.
Si on vous suit bien, votre 4e place de la saison régulière vous a satisfait?
Oui. C'était une année difficile pour tout le monde. Nous avons dû gérer quatre quarantaines. Est-ce que j'ai été aussi exigeant avec l'équipe que d'habitude? Absolument pas. C'était une décision prise consciemment. Je ne voulais pas les cramer en étant trop structuré ou dur avec eux. Mais on a fait un bon job. Au début de la saison, l'objectif était de terminer dans le Top 6 pour nous assurer une place directe en play-off et nous l'avons atteinte. Sur la fin, je suis d'accord que les résultats étaient moins bons. Nous avions quelques blessures à gérer, mais je rappelle que si nous avions gagné le dernier match, nous aurions terminé deuxième. Pour moi, ce n'est pas un échec. Et pourtant il est perçu ainsi. C'est sur ce point que je voudrais répondre. Je trouve que le coaching staff a fait du bon travail.
Ces relations avec Petr Svoboda sont étranges si l'on songe au fait que vous étiez amis non?
Exactement! Nous étions coéquipiers dans les années 90. C'était un coéquipier extraordinaire. J'avais une admiration énorme pour lui et pour son parcours de vie. Lorsque je suis arrivé à Lausanne, je l'ai d'ailleurs souvent défendu lorsqu'il était critiqué. Même si nous ne nous étions plus trop vus ces dernières années, je gardais de merveilleux souvenirs de lui. Mais je dois bien avouer que ce que j'ai vécu depuis un an est très éloigné du scénario que l'on m'avait décrit avant de débarquer.
Et aujourd'hui, qu'attendez-vous?
De rentrer voir ma famille au Canada. Cela fait plus d'une année que je suis loin d'eux et je me réjouis. Mais je sais que je dois régler cette histoire également. Comprenez-moi bien. J'ai aimé mon passage à Lausanne et j'ai également aimé le contact avec les joueurs de cette équipe. Pour ne rien gâcher, Lausanne est une ville magnifique. Regardez-moi la beauté de ce lieu. La vue sur ce lac m'a souvent aidé à relativiser ce qui se passait. Mais au bout d'un moment, je souhaite juste que cela se termine pour passer à autre chose. Et si possible rapidement. Pour tout vous dire, je n'arrive pas à imaginer que quiconque puisse croire à la pérennité d'une telle situation.
Selon l’une ou l’autre des deux parties, le contrat porte soit sur un an, soit sur trois. Une nuance de taille toutefois. Pour Craig MacTavish, rien n'a jamais été signé. Ni son contrat de trois ans, ni celui d'un an. Comment se sortir d'une telle situation? Cette absence de durée est-elle légale? Nous avons soumis ces questions à un avocat spécialisé dans le droit du travail ne souhaitant pas être cité nommément. Pour lui, la situation n'est pas exceptionnelle. «Je vous dirais néanmoins que je suis surpris d'entendre qu'un contrat aussi important ne soit pas formalisé, nous détaille-t-il. Mais le fait qu'il n'y ait pas d'accord écrit n'a, en soi, rien d'exceptionnel.» S'il ne peut évidemment pas parler du cas entre Craig MacTavish et le Lausanne HC qu'il ne connaît pas, il peut tout de même préciser certaines généralités. «Le contrat de travail est un accord sur la volonté de deux parties à entamer une collaboration, moyennant une rémunération. Pour sa validité, la forme écrite n'est pas requise.» L'homme de loi précise toutefois: «Selon le Code des Obligations à l'article 330 b, on peut y lire que lorsque le rapport de travail a été convenu pour une durée indéterminée ou pour plus d’un mois, l’employeur doit informer le travailleur par écrit, au plus tard un mois après le début du rapport de travail, sur les points suivants: nom des parties; la date du début du rapport de travail; la fonction du travailleur; le salaire et les éventuels suppléments salariaux; la durée hebdomadaire du travail.» L'avocat précise tout de même qu'un manquement à cette disposition est dénué de sanctions directes, mais que cela peut jouer un rôle dans l'appréciation des preuves par la suite.
Dès lors, comment se règle une telle situation? Soit par un accord à l'amiable, soit devant les tribunaux. L'avocat détaille: «Les deux parties pourront amener des éléments au dossier pour confirmer leur interprétation. Cela peut être par la convocation de témoins, la production de pièces telles que des échanges de SMS, courriers ou courriels.» L'absence de contrat complique toutefois la chose. «C'est la parole d'une partie opposée à celle d'une autre. En l'absence d'un accord en bonne et due forme, on peut considérer des preuves indirectes de l'existence d'un accord sur plusieurs années. Là encore, je parle sans connaître le dossier, mais on peut imaginer un échange de courriel évoquant le projet sur l'an II et l'an III du contrat. C'est un moyen de prouver que la volonté de signer un contrat sur plusieurs années a existé.»
Selon l’une ou l’autre des deux parties, le contrat porte soit sur un an, soit sur trois. Une nuance de taille toutefois. Pour Craig MacTavish, rien n'a jamais été signé. Ni son contrat de trois ans, ni celui d'un an. Comment se sortir d'une telle situation? Cette absence de durée est-elle légale? Nous avons soumis ces questions à un avocat spécialisé dans le droit du travail ne souhaitant pas être cité nommément. Pour lui, la situation n'est pas exceptionnelle. «Je vous dirais néanmoins que je suis surpris d'entendre qu'un contrat aussi important ne soit pas formalisé, nous détaille-t-il. Mais le fait qu'il n'y ait pas d'accord écrit n'a, en soi, rien d'exceptionnel.» S'il ne peut évidemment pas parler du cas entre Craig MacTavish et le Lausanne HC qu'il ne connaît pas, il peut tout de même préciser certaines généralités. «Le contrat de travail est un accord sur la volonté de deux parties à entamer une collaboration, moyennant une rémunération. Pour sa validité, la forme écrite n'est pas requise.» L'homme de loi précise toutefois: «Selon le Code des Obligations à l'article 330 b, on peut y lire que lorsque le rapport de travail a été convenu pour une durée indéterminée ou pour plus d’un mois, l’employeur doit informer le travailleur par écrit, au plus tard un mois après le début du rapport de travail, sur les points suivants: nom des parties; la date du début du rapport de travail; la fonction du travailleur; le salaire et les éventuels suppléments salariaux; la durée hebdomadaire du travail.» L'avocat précise tout de même qu'un manquement à cette disposition est dénué de sanctions directes, mais que cela peut jouer un rôle dans l'appréciation des preuves par la suite.
Dès lors, comment se règle une telle situation? Soit par un accord à l'amiable, soit devant les tribunaux. L'avocat détaille: «Les deux parties pourront amener des éléments au dossier pour confirmer leur interprétation. Cela peut être par la convocation de témoins, la production de pièces telles que des échanges de SMS, courriers ou courriels.» L'absence de contrat complique toutefois la chose. «C'est la parole d'une partie opposée à celle d'une autre. En l'absence d'un accord en bonne et due forme, on peut considérer des preuves indirectes de l'existence d'un accord sur plusieurs années. Là encore, je parle sans connaître le dossier, mais on peut imaginer un échange de courriel évoquant le projet sur l'an II et l'an III du contrat. C'est un moyen de prouver que la volonté de signer un contrat sur plusieurs années a existé.»