Damien Brunner a-t-il une deuxième jeunesse? Ou une troisième? À force de le voir dans le paysage, on en vient presque à oublier que le toujours jeune ailier a 35 ans. Pourtant, son début de saison rappelle les années durant lesquelles il était l’attaquant suisse le plus dominant de la ligue. «À cette période, je savais que je pouvais prendre n’importe quel défenseur de vitesse», se souvient-il sans nostalgie. Aujourd’hui? «C’est un peu différent. J’ai dû apprendre à me réinventer pour continuer d’être performant.»
«Damien est d'accord de vous rencontrer mais il préfère manger avec vous plutôt que de boire un café. Cela vous convient?» S'il est un joueur qui a le don de surprendre, c'est bien Damien Brunner. Rendez-vous est donc pris au restaurant «Il Capitano» de la patinoire pour un entretien qui durera finalement plus d'une heure.
Au menu: sa carrière, sa réputation, le HC Bienne... et des médaillons de cheval au poivre vert. «C'est le Wochenhit, je vous le conseille.» Souriant et sympathique, le Zurichois a tenu à parler le bon allemand en laissant le dialecte dans sa poche arrière. Hormis lors de quelques «envolées» dont il a le secret. On ne se refait pas. Et le français? «Une catastrophe», rigole-t-il dans la langue de Molière avant de repartir dans sa zone de confort.
Au bout de 60 minutes d'enregistrement, Damien Brunner prend congé non sans oublier de s'assurer que le moment était qualitatif. «Vous avez tout ce qu'il vous faut?» Tout et même un peu plus.
«Damien est d'accord de vous rencontrer mais il préfère manger avec vous plutôt que de boire un café. Cela vous convient?» S'il est un joueur qui a le don de surprendre, c'est bien Damien Brunner. Rendez-vous est donc pris au restaurant «Il Capitano» de la patinoire pour un entretien qui durera finalement plus d'une heure.
Au menu: sa carrière, sa réputation, le HC Bienne... et des médaillons de cheval au poivre vert. «C'est le Wochenhit, je vous le conseille.» Souriant et sympathique, le Zurichois a tenu à parler le bon allemand en laissant le dialecte dans sa poche arrière. Hormis lors de quelques «envolées» dont il a le secret. On ne se refait pas. Et le français? «Une catastrophe», rigole-t-il dans la langue de Molière avant de repartir dans sa zone de confort.
Au bout de 60 minutes d'enregistrement, Damien Brunner prend congé non sans oublier de s'assurer que le moment était qualitatif. «Vous avez tout ce qu'il vous faut?» Tout et même un peu plus.
Mission totalement accomplie puisqu’il est le meilleur compteur d’un HC Bienne leader de National League. Un début de saison qui lui vaut logiquement le statut de «Joueur du Mois de septembre.»
Damien Brunner, c’est le retour des fans qui vous donne une telle pêche?
On s’habitue à tout. Même à jouer devant des gradins vides. Mais c’est sûr que d’avoir le soutien des supporters, ça te pousse à te dépasser. C’est tellement agréable lorsque tu peux jouer avec les émotions. Cela fait partie de notre raison d’être. Le hockey, c’est du divertissement. Si personne n’est là pour voir ce que l’on fait, à quoi ça sert?
Ce plaisir retrouvé s’est traduit par un début extraordinaire avec huit victoires de rang.
Et si nous n’avions pas été à ce point touchés par les blessures, nous aurions peut-être pu battre le record (ndlr 9 victoires de suite pour commencer la saison). J’avais déjà vécu un début de championnat du même style avec Zoug. Ici, j’aurais pu parier que nous allions bien commencer.
Comment le ressent-on?
C’est un tout. Dès le premier jour des entraînements d’été, nous sentions que cela pouvait bien se passer. Nos étrangers sont excellents et nous sommes une bonne équipe. Nous n’avons peut-être pas eu des matches amicaux de grande qualité, mais nous avions confiance. L’ambiance dans le vestiaire est vraiment extraordinaire.
Le retour d’Antti Törmänen, qui a raté la saison dernière à cause d’un cancer, y est-il pour quelque chose?
Les joueurs ont une très grande confiance en lui. De toute ma carrière, c’est lui qui a été le plus capable de fédérer un vestiaire. De donner un rôle à tout le monde et de faire en sorte que les égos des 20 joueurs cohabitent.
Comment gagne-t-il cette confiance?
Il te permet de faire des erreurs. Cela peut paraître tout bête, mais si tu ne réussis pas quelque chose, il te renvoie immédiatement sur la glace et te dit «Vas-y, prouve moi que tu en es capable». Cela aide tout le monde, mais surtout les jeunes. Lorsque tu as la menace de terminer sur le banc à chaque faux pas, tu perds à chaque fois 1% de confiance en toi. Et au moment de prendre la bonne décision, c’est la différence entre une action réussie et une erreur.
Était-il beaucoup là malgré la maladie durant la saison dernière?
Oui lorsqu’il le pouvait. Après ses thérapies, il y avait plusieurs jours difficiles. Il venait à la patinoire et nous étions en contact. Mais nous échangions sur tout sauf sur le hockey. Pour lui, c’était l’occasion de penser à autre chose. De parler de la vie et, surtout, de pouvoir sortir de chez lui. Il venait voir les matches mais n’avait aucune influence sur le jeu.
Par respect par Lars Leuenberger qui a pris le rôle au pied lever, non?
Exactement. Pour Lars, ce n’était pas une situation facile. Tu te retrouves à remplacer un coach que le vestiaire adore. Nous avions également dû apprendre à jouer sans Jonas Hiller. Il s’en est bien sorti, je trouve. En fin de saison, nous étions prêts, mais nous avions juste eu un creux au mauvais moment.
De l’extérieur, on a l’impression que Bienne est un environnement spécial. Arrivez-vous à nous expliquer cela?
C’est vrai que c’est spécial. Ce qui me plaît et me convient tout particulièrement, c’est le caractère familial de ce club. Cela permet à tout le monde de travailler dans la sérénité. Et ce calme vient du haut de la pyramide par l’intermédiaire du Conseil d’Administration mais aussi par l'intermédiaire de Stoney (ndlr Martin Steinegger le directeur sportif) ou de la communication interne. Le vestiaire est super. Mais cette culture s’est instaurée petit à petit. Depuis la promotion, le club n’a jamais sauté une étape et a grandi petit à petit jusqu’à arriver deux fois en demi-finale. Cette progression graduelle est la clé du succès de Bienne.
Pourquoi a-t-on l’impression que rien ne vous ébranle jamais, pas même lorsque vous aviez perdu huit matches de suite? À cette époque, Antti Törmänen n’était jamais en danger…
Huit? Si vous ajoutez la Coupe et la Champions League, je crois que c’était dix (rires). Nous avions tellement de blessés. J’ai l’impression que tout se liguait contre nous à ce moment. Mais comme vous dites, tout était calme. Personne n’a commencé à accuser son voisin. Pour tout vous dire, j’ai rarement vu une atmosphère pareille malgré les résultats compliqués.
Revenons à vous. Votre dernière saison a tout de même été bien compliquée.
Vous sortez quand l’interview?
Mercredi 6 octobre.
Vous ne me croirez pas, mais ce sera le jour de mon dernier rendez-vous chez le dentiste. Un an après m’être cassé dix dents, j’aurai enfin terminé. Ensuite j’ai eu une commotion cérébrale. Bref, c’était vraiment une saison à oublier car je n’ai hélas pas pu beaucoup jouer. Depuis 2015, j’ai l’impression qu’il y a toujours quelque chose qui ne va pas. C’est spécialement dur lorsque cela touche le pied, le genou ou les ligaments. Tu peux faire la meilleure préparation et le meilleur travail avec le physio, c’est compliqué au niveau de la coordination de revenir au top.
Qu’avez-vous changé, dans cette optique?
Il y a toujours des petites choses qui évoluent. Moi, c’est surtout au niveau de la flexibilité et de l’équilibre que cela se passe. La coordination des petits muscles grâce au yoga, par exemple.
Sur la glace, vous êtes toujours le même joueur?
Vraiment pas (rires). Quand j'ai commencé à jouer, les arbitres étaient plus tolérants et le style de jeu était beaucoup plus accroché. Désormais, les joueurs créatifs ont plus d’espace. Mais cela ne veut pas dire que tout est plus simple pour les attaquants. Pour être créatif et tenter des trucs, il faut être courageux et, comme je l’ai dit auparavant, un entraîneur qui te permet de l’être.
Et hors glace, avez-vous changé?
J’ai beaucoup changé grâce notamment au fait que je suis à Bienne où tout est si calme. Désormais, je peux laisser les défaites à la patinoire sans les ruminer dans ma vie privée. Tu rentres à la maison et tu arrives à te ressourcer. Cet équilibre m’a aidé.
Tout au long de votre carrière, une mauvaise étiquette vous a collé à la peau. Comme l’avez-vous vécu?
Il y a eu beaucoup de choses en effet et énormément n’étaient pas fondées. Est-ce que j’ai toujours fait tout juste, notamment à Lugano? Probablement pas. Il y a eu des moments compliqués. Mais c’est également dans ce sens où – et je sais que j’insiste – tout est plus calme à Bienne. Cette ombre qui m’a suivi si longtemps a disparu dès que je suis arrivé ici.
C’est votre deuxième ou votre troisième jeunesse?
(Rires) Je ne sais pas quoi vous répondre. Ce que je peux vous dire, c’est que je ne suis plus le même joueur que celui qui a tenté sa chance en Amérique du Nord. Plus le même que durant une longue partie de ma carrière, non plus. Avec l’âge, tu dois trouver des aspects qui te permettent de faire la différence. Avant, j’étais beaucoup plus rapide. J’étais celui qui effectuait le plus de kilomètres en une saison. Aujourd’hui, je dois être beaucoup plus intelligent dans mes déplacements.
Il y a vraiment une telle différence?
Je vais vous donner un exemple. L’autre jour, un ami, Gianni Ehrensperger, est venu me voir jouer. J’ai bloqué un puck à la ligne bleue et un boulevard s’est ouvert devant moi jusqu’au but. Je n’ai jamais pu partir tout seul et ai toujours eu le défenseur sur le dos. À la fin du match, il m’a dit qu’à une certaine époque j’aurais fini avec trois mètres d’avance et aurais marqué (rires). Et vous savez le pire? Il a raison. Il y a quelques années, je pouvais provoquer tous les adversaires et faire la différence en 1 contre 1. Aujourd’hui, je n’ai plus la même explosivité qui me permet de passer en deux coups de patin. Je trouve des moyens de continuer à aider mon équipe d'une autre manière.
Comment est-ce que l’on se réinvente?
Beaucoup d'analyses à la vidéo. Lorsque tu regardes les autres joueurs, tu apprends énormément. Et puis il faut évaluer ses forces et trouver un moyen de les exploiter. Antti Törmänen est d’une grande aide dans ce processus. Il sera toujours honnête et te dira si tu es mauvais quelque part. Peut-être que cela ne fait pas plaisir dans un premier temps, mais il a souvent raison. Au lieu d’entraîner quelque chose qui ne te sert qu’une fois ou deux par match, tu commences à essayer de maximiser un domaine plus utile. Dans mon cas? À quoi cela me sert de shooter de 8 à 10 mètres alors que je suis beaucoup plus proche du but aujourd’hui? Je touche beaucoup plus de pucks autour de la cage et je travaille ma réactivité dans ces situations.
À quel moment voit-on que l’on va moins vite?
La tête doit comprendre que les jambes ne peuvent plus faire les mêmes choses qu’avant. Lancé, je pense que je suis toujours capable de générer pas mal de vitesse. Ce sont ces premiers mètres qui me posent problème. Mais je crois que j’ai compris quel joueur j’étais aujourd’hui et c’est sûrement pour cela que cela ne va pas si mal depuis le début de saison.