Au moment où Léman Bleu a signé un contrat de cinq ans pour la diffusion de matches de National League, la chaîne genevoise ne pensait pas réaliser un tel coup. Mais dès ce vendredi, l'antenne régionale diffusera les sept matches de la finale du championnat entre Genève et Bienne. «C'est une sacrée chance, rigole Jérémy Seydoux, rédacteur en chef du média. Le fait que Genève soit présent, c'est déjà génial pour nous. Mais que Bienne soit aussi de la partie, c'est la belle surprise, car nous ne nous adressons pas qu'aux fans du GSHC.»
Au moment d'accorder trois sous-licences à Léman Bleu, TeleTicino et TV 24, la Ligue suisse de hockey sur glace a pris un pari. Celui de faire migrer les téléspectateurs du service public vers les télévisions régionales. Pour l'heure, les chiffres des audiences ne sont pas connus et une analyse détaillée sera effectuée après la saison. Ce risque est-il payant? Selon de nombreuses indiscrétions, les clubs sont inquiets de la perte de visibilité inhérente à ce changement.
Frustration à la RTS
Si Jérémy Seydoux est forcément content du «coup» réalisé, le ton est logiquement différent du côté de la RTS. «Bienne dynamite Zurich et Genève bat Zoug, mais on n'a rien sur notre antenne, peste Massimo Lorenzi, responsable des sports. Cela m'attriste et pour tout dire, cela me frustre énormément. Je ne dis évidemment pas cela contre Léman Bleu. Mais je trouve que le hockey national mérite une présence sur le service public. Pas tous les matches, évidemment. Mais nous avons été capables de trouver un accord avec le football et Blue. Pourquoi ce n'est pas possible en hockey?»
«Léman Bleu remplit une mission de service public dont la SSR n’a pas le monopole, précise Jérémy Seydoux. Nous réalisons un excellent travail et comme les années précédentes, toutes les rencontres seront diffusées gratuitement.» Et les fans purs et durs de hockey sur glace devraient trouver le chemin de Léman Bleu pour regarder les duels entre Genève-Servette et Bienne.
Mais qu'en est-il des téléspectateurs épisodiques? Ceux qui suivent du hockey sur glace lorsque cela compte vraiment? «Nous faisions d'excellentes audiences sur les matches de finale, détaille Massimo Lorenzi. Les gens viennent voir du hockey lorsque cela devient chaud. Et avec une finale Genève - Bienne, les Romands s'y seraient intéressés. Je voyais venir cette situation, mais cette affiche amplifie encore mon sentiment. J'aurais été agacé pour un Berne - Davos. Là, c'est bien pire.»
L'annonce de cette finale 100% romande n'aurait-elle pas pu permettre à la RTS de négocier quelque chose avec les détenteurs des droits pour une sous-licence? Toutes les parties concernées ont rejeté cette option jugée irréaliste par tout le monde. Au détriment de Monsieur et Madame Tout-le-monde. «On ne peut rien montrer avant 23 heures, précise Massimo Lorenzi. Et nous ne pouvons rien faire de plus qu'un grand format de quinze minutes. Cela m'attriste profondément.»
Problème de visibilité
Il faudra donc zapper plus loin que le No 2 pour trouver trace du hockey. Les dirigeants du hockey suisse sont convaincus que ce n'est qu'une petite adaptation pour les téléspectateurs. «Mais je suis conscient que c'est un problème, concède Jérémy Seydoux. Cela pose d'autres questions quant à la manière dont les chaînes sont agencées par les différents fournisseurs. Ce n'est pas le débat qui nous intéresse aujourd'hui, mais c'est un fait que nous perdons une certaine visibilité.»
Du côté de la RTS, on se veut fataliste. «Voilà où mène la privatisation, se désole Massimo Lorenzi. Au final, c'est la promotion de ce sport qui est moins bonne. Ce n'est pas un mot tabou, la promotion. Mais qu'a-t-on voulu en signant ce contrat avec des partenaires privés? Les dirigeants n'y ont probablement pas pensé et aujourd'hui, on paie cette décision. Priver les chaînes de la SSR du direct de la finale, c’est nuire à la promotion du hockey et c’est, à mon sens, une lourde erreur à terme.»
Concrètement, Léman Bleu diffusera le signal de la chaîne spécialisée MySports avant et pendant les matches. En saison régulière, la chaîne genevoise avait organisé ses propres plateaux pour entourer les matches. Ce n'est plus le cas désormais. «C'est on ne peut plus simple avec notre flux qui sera repris intégralement, précise Alex Burkhalter, rédacteur en chef du canal dédié au hockey sur glace. Dès que les rencontres seront décisives, nous assurerons également une présence en patinoire.»
Restes dorénavant à savoir si le téléspectateur «lambda» trouvera le chemin de Léman Bleu ou non. C'est l'un des enjeux de cette fin de saison. «Mais pour nous, c'est une magnifique occasion de faire connaître notre produit, conclut Jérémy Seydoux. Nous avons un contrat sur plusieurs années et cette affiche va nous aider à créer le réflexe de venir chez nous voir les matches de hockey.»